Une machine quantique pourrait prédire le destin ultime de l’univers

Les physiciens théorisent que l’univers tel que nous le connaissons repose peut-être sur une structure instable, comparable à un sol qui pourrait s’effondrer sous nos pieds à tout instant. Ce concept, appelé faux vide, suggère que l’univers pourrait être en équilibre temporaire, mais qu’un changement brutal dans l’énergie fondamentale pourrait provoquer une transformation irréversible de la réalité.

Dans les années 1980, les physiciens Sidney Coleman et Frank De Luccia ont émis une hypothèse inquiétante : notre univers pourrait être piégé dans un faux vide. Imaginez un ballon posé sur une table : il semble stable, mais il pourrait en réalité rouler et tomber si un léger coup le fait basculer. De la même façon, l’univers pourrait être dans un état qui semble stable, mais qui ne l’est pas totalement. Si quelque part, une fluctuation suffisante survenait, elle pourrait créer une bulle d’un nouvel état de l’univers, qui s’étendrait alors à la vitesse de la lumière.

Si un tel événement se produisait, nous ne verrions rien venir. Contrairement aux scénarios habituels de fin de l’univers, comme le Big Crunch (un effondrement sous l’effet de la gravité) ou le Big Rip (un déchirement dû à l’expansion), le passage du faux vide au vrai vide serait instantané. La structure même de la matière changerait, ainsi que toutes les constantes fondamentales de la physique. En clair, notre univers ne ressemblerait plus à rien de ce que nous connaissons.

Jusqu’ici, ces idées restaient purement théoriques, impossibles à vérifier par l’expérience. Mais une équipe de chercheurs européens a conçu une machine quantique utilisant un procédé appelé recuit quantique (quantum annealing). Ce type de calcul repose sur les propriétés floues et indéterminées de la physique quantique, permettant de modéliser des scénarios que les ordinateurs classiques ne peuvent pas traiter.

Grâce à cet outil, les scientifiques ont pu simuler l’évolution d’un faux vide et observer comment des bulles d’un nouvel état de l’univers pouvaient émerger et interagir.

Le fonctionnement de cette machine repose sur des milliers d’unités supraconductrices fonctionnant comme les éléments d’un ordinateur quantique avancé. En l’utilisant, les chercheurs ont pu créer une version simplifiée du vide, où des bulles de faux vide apparaissent et évoluent. Leurs observations ont confirmé que la taille de ces bulles dépend d’un équilibre subtil entre l’énergie interne et la tension de surface. Autrement dit, la manière dont elles grossissent ou disparaissent suit des lois précises, qui pourraient s’appliquer à l’univers réel.

Lorsque plusieurs bulles de vide apparaissent en même temps, leur interaction devient imprévisible. Certaines peuvent fusionner et accélérer la propagation du changement, tandis que d’autres peuvent ralentir ou même s’annuler. Ce phénomène rappelle une dynamique de marché financier, où des fluctuations peuvent entraîner un effondrement généralisé ou au contraire stabiliser un système. Si l’univers réel fonctionne de la même manière, alors il est possible qu’une bulle de faux vide n’ait jamais eu l’occasion de se propager jusqu’à nous.

Faut-il s’inquiéter de cette possibilité ? Pas vraiment. Les chercheurs estiment que même si l’univers est dans un faux vide, un tel événement mettrait des milliards, voire des quadrillions d’années à se produire. Pour donner une idée, c’est infiniment plus long que l’âge actuel de l’univers (environ 13,8 milliards d’années).

De plus, il est possible que notre compréhension du vide soit incomplète. Nous ne savons pas encore si ce faux vide existe réellement ou s’il s’agit d’une idée mathématique sans véritable conséquence physique.

Même si cette étude ne permet pas encore de conclure sur le destin final de l’univers, elle marque une étape importante dans l’exploration des mystères du cosmos. Ces expériences pourraient un jour nous aider à comprendre comment notre univers est né et pourquoi les lois de la physique sont ce qu’elles sont aujourd’hui.

En poussant plus loin ces recherches, les physiciens pourraient aussi mieux comprendre la nature même de l’espace et du temps, et peut-être même découvrir de nouvelles dimensions de la réalité.

L’utilisation d’une machine quantique pour simuler des scénarios cosmiques est une avancée révolutionnaire. Elle ne nous dit pas encore si l’univers est réellement en danger d’un effondrement soudain, mais elle nous aide à comprendre les processus sous-jacents qui façonnent notre réalité.

Si un jour, la science parvient à répondre à ces questions, nous pourrions non seulement découvrir si notre univers a une fin, mais aussi mieux comprendre comment tout a commencé. En attendant, une chose est sûre : chaque découverte nous rapproche un peu plus des secrets les plus profonds du cosmos.