Des scientifiques ont reniflé des momies égyptiennes antiques… et ont fait une découverte surprenante
Auteur: Simon Kabbaj
Les musées regorgent de trésors archéologiques, mais un élément essentiel du passé est souvent oublié : l’odeur. Derrière les vitrines et les sarcophages, les objets ont conservé des traces olfactives qui peuvent révéler des aspects insoupçonnés de leur histoire. Une équipe de chercheurs a récemment mené une étude innovante pour analyser l’odeur de momies égyptiennes antiques, offrant ainsi une nouvelle perspective sur les techniques d’embaumement et les substances utilisées.
1. Une approche sensorielle pour comprendre le passé

L’archéologie repose traditionnellement sur l’étude visuelle et matérielle des objets anciens, mais le patrimoine sensoriel émerge comme une nouvelle discipline qui explore l’histoire à travers l’odorat. L’un des chercheurs impliqués, spécialiste des senteurs patrimoniales, a déjà travaillé sur la reconstitution des odeurs de lieux historiques, comme la bibliothèque de la cathédrale Saint-Paul. Cette fois, son expertise a été sollicitée pour étudier l’odeur des momies égyptiennes, en collaboration avec les universités de Ljubljana et de Cracovie ainsi que le Musée égyptien du Caire.
2. Une étude minutieuse et non destructive

L’étude des momies doit se faire avec le plus grand respect et en suivant des protocoles stricts. Afin de ne pas endommager ces corps millénaires, les chercheurs ont utilisé une approche non invasive : ils ont capturé l’air contenu dans les sarcophages pour en analyser les composés volatils. Cette méthode a permis de préserver l’intégrité des momies tout en récoltant des données essentielles sur leur composition chimique et les matériaux utilisés pour leur conservation.
3. Une équipe d’experts au service de l’odorat

our cette expérience unique, huit spécialistes en analyse olfactive ont été mobilisés. Certains avaient déjà travaillé sur des projets similaires, tandis que d’autres étaient des conservateurs du Musée égyptien spécialement formés à la reconnaissance des odeurs. Leur mission : décrire et catégoriser les senteurs perçues à partir des échantillons d’air prélevés dans les sarcophages.
4. Des résultats surprenants : des senteurs agréables et inattendues

Contrairement aux idées reçues, les momies égyptiennes ne dégagent pas de mauvaises odeurs. Bien au contraire, l’analyse olfactive a révélé des senteurs boisées, florales, épicées et résineuses, évoquant des parfums raffinés. Parmi les ingrédients détectés, on retrouve l’encens, la myrrhe, la cannelle et des huiles de conifères, tous utilisés pour honorer les défunts et préserver leur corps.
Mais la plus grande surprise vient d’une odeur marquée de thé noir perçue sur l’une des momies. Intrigués, les chercheurs ont identifié sa source : le caryophyllène, un composé naturel aussi présent dans le poivre et certains thés. Comment un corps vieux de plusieurs millénaires peut-il sentir le thé ? Une transformation chimique des résines appliquées à l’embaumement pourrait être à l’origine de cette fragrance inattendue.
Autre découverte étonnante : les momies exposées en vitrine dégagent une odeur plus intense que celles conservées en réserve. Cela signifie qu’elles continuent à libérer des composés volatils, interagissant encore avec leur environnement après des milliers d’années. Ces résultats montrent que l’embaumement était bien plus qu’une technique de conservation : c’était un art du parfum, une signature olfactive pensée pour l’éternité.
5. Un projet innovant pour le futur des musées

Les chercheurs ne comptent pas s’arrêter là. Ils prévoient de recréer ces odeurs afin que les visiteurs du Musée égyptien du Caire puissent les découvrir en 2026. L’objectif est d’offrir une expérience immersive permettant de ressentir le passé à travers l’odorat, comme si l’on pénétrait dans une tombe égyptienne au moment de sa découverte. D’autres musées s’intéressent déjà à cette approche, qui pourrait révolutionner notre façon d’interagir avec les collections archéologiques.
6. Redécouvrir l’histoire avec nos sens

Ce projet s’inscrit dans une démarche plus large visant à préserver le patrimoine olfactif. En parallèle, des chercheurs travaillent sur un catalogue des odeurs marquantes de l’histoire, qu’il s’agisse de véhicules anciens, de plats traditionnels ou même de l’odeur des bibliothèques historiques. Loin d’être un simple détail, ces senteurs permettent de mieux comprendre notre passé et d’enrichir notre connexion avec l’histoire.
Conclusion

L’archéologie sensorielle ouvre de nouvelles perspectives passionnantes sur la manière dont nous percevons le passé. Grâce à ces recherches, il sera bientôt possible de sentir les mêmes odeurs que les anciens Égyptiens, ajoutant une dimension immersive à la visite des musées. Loin des clichés sur les momies poussiéreuses et malodorantes, cette étude révèle au contraire un raffinement insoupçonné dans l’art de l’embaumement. Qui aurait cru que, plusieurs millénaires plus tard, les momies égyptiennes pourraient encore surprendre nos sens ?