La gabapentine. Ce nom ne vous dit peut-être rien, mais il s’agit d’un antidouleur très couramment prescrit, souvent présenté comme une alternative plus sûre aux opioïdes pour les douleurs chroniques, comme celles du dos. Une nouvelle qui fait l’effet d’une bombe vient pourtant remettre en question cette réputation. Une étude à grande échelle suggère un lien inquiétant entre la prise de ce médicament et un risque accru de démence et de troubles cognitifs légers.
Des chiffres qui interpellent
Publiée dans la revue Regional Anesthesia & Pain Medicine, cette étude a analysé les dossiers médicaux anonymisés de dizaines de milliers d’Américains. Les conclusions sont frappantes. Les patients ayant reçu six prescriptions ou plus de gabapentine étaient 29% plus susceptibles de développer une démence et même 85% plus susceptibles de souffrir de troubles cognitifs légers dans les dix ans suivant leur premier diagnostic de douleur.
Un risque surprenant pour les plus jeunes
Le plus surprenant, c’est peut-être que le risque ne touche pas seulement les plus âgés. Au contraire. Si aucun risque accru n’a été détecté chez les 18-34 ans, la situation change radicalement pour la tranche d’âge des 35-49 ans. Pour eux, le risque de démence a plus que doublé et celui de troubles cognitifs a plus que triplé. Une tendance similaire a été observée chez les 50-64 ans. La fréquence des prescriptions joue aussi un rôle clé : avec 12 ordonnances ou plus, le risque de démence grimpe de 40%.
Attention, pas de conclusion hâtive
Alors, faut-il jeter sa boîte de gabapentine ? Pas si vite. Les chercheurs eux-mêmes et d’autres experts appellent à la plus grande prudence. Il s’agit d’une étude observationnelle et rétrospective, ce qui signifie qu’elle montre une association, une corrélation, mais ne peut en aucun cas prouver un lien de cause à effet. « On doit s’inquiéter que ce genre de résultats soit un artefact », prévient le professeur Sir John Hardy, expert en démence. Autrement dit, le lien pourrait être une coïncidence ou le résultat d’autres facteurs non mesurés.
Un lien complexe à démêler
Plusieurs bémols importants ont été soulevés. L’étude n’a pas pu prendre en compte la dose exacte de gabapentine ni la durée du traitement. De plus, elle ne portait que sur des personnes souffrant de douleurs chroniques. Or, la douleur chronique elle-même, ou d’autres facteurs liés à ce état, pourrait influencer le risque cognitif. D’ailleurs, comme le note le Dr Leah Mursaleen d’Alzheimer’s Research UK, des études précédentes sur des patients prenant de la gabapentine pour d’autres raisons (comme l’épilepsie) n’ont pas montré ce lien avec la démence.
Conclusion : que faut-il faire ?
Cette étude ne doit pas semer la panique, mais plutôt encourager la vigilance. Les chercheurs concluent que leurs résultats « soutiennent la nécessité d’une surveillance étroite des patients adultes à qui l’on prescrit de la gabapentine ». La gestion de la douleur chronique est essentielle et la recommandation des experts est claire : n’arrêtez jamais un traitement sans en parler à votre médecin. Si vous avez des inquiétudes concernant vos médicaments, la meilleure chose à faire est de prendre rendez-vous pour en discuter avec un professionnel de santé.
Selon la source : newsweek.com