Imaginez un instant la savane africaine. Vous voyez ces immenses troupeaux où les zèbres et les gnous avancent d’un même pas ? Parfois, des gazelles ou des impalas se joignent à eux. Ensemble, ils sont plus forts face aux prédateurs. C’est une stratégie de survie fascinante. Mais alors, une question nous vient naturellement à l’esprit : nos chers dinosaures faisaient-ils la même chose ?
Les films comme « Le Petit Dinosaure » nous ont souvent montré ces images attendrissantes de créatures de toutes sortes voyageant en groupe. Pourtant, dans la réalité, les preuves manquaient cruellement. Jusqu’à aujourd’hui. Une découverte au Canada pourrait bien tout changer et nous offrir un aperçu inédit de la vie sociale de ces géants disparus.
Une découverte inattendue dans les badlands canadiens
L’histoire se passe au cœur du parc provincial de Dinosaur, au Canada. Deux paléontologues, Brian Pickles et Phil Bell, cherchaient des os, sans grand succès, comme cela arrive souvent dans ce métier de patience. « Nous étions en train de chercher des os, sans grand succès », se souvient Brian Pickles. Et puis, soudain, le regard de Phil Bell est attiré par une étrange protubérance sortant du sol.
Ce n’était pas un os. C’était bien plus rare. En s’approchant, il a compris : c’était une empreinte de dinosaure parfaitement conservée. Ce qui a suivi fut une course contre la montre de 48 heures d’excavation, menant à ce que Brian Pickles décrit lui-même comme « une révolution de la paléoécologie des dinosaures » dans ce parc.
Ce que racontent les traces : une 'communauté' préhistorique
Alors, que nous disent ces empreintes vieilles de 76 millions d’années ? Sur une surface à peine plus grande que deux parkings, l’équipe a mis au jour une dizaine de traces. Mais le plus incroyable, c’est leur disposition : elles ne se chevauchent pas et sont à égale distance les unes des autres. C’est la signature d’un groupe qui marche ensemble, de manière organisée.
En analysant les formes, les chercheurs ont dressé le portrait d’un groupe pour le moins hétéroclite. Il y aurait eu des cératopsiens (des dinosaures à cornes), un ankylosaure bien protégé par son armure, et peut-être même deux petits théropodes. Une sorte de petite communauté d’aventuriers, un peu comme dans les histoires que l’on aime tant.
L'ombre des prédateurs : des tyrannosaures à l'affût ?
Et comme dans toute bonne histoire, il y a des méchants ! Non loin du troupeau, l’équipe a trouvé les traces de deux grands tyrannosaures. Se sont-ils retrouvés là par hasard, ou étaient-ils en pleine partie de chasse ? Ces prédateurs redoutables traquaient-ils ce petit groupe ? Et ce troupeau s’était-il justement formé pour mieux se défendre ?
« C’est assez évocateur de penser que cette situation est similaire à ce que l’on peut voir aujourd’hui dans les plaines d’Afrique », explique Brian Pickles. Il reste prudent, car rien ne prouve que les traces ont été faites au même moment. « Nous ignorons à quel moment les marques ont été faites, les tyrannosaures auraient très bien pu passer par là les premiers. » Le mystère reste entier.
Une interprétation qui ne fait pas l'unanimité
Bien sûr, en science, une découverte aussi spectaculaire suscite le débat. D’autres experts, qui n’ont pas participé aux fouilles, sont plus sceptiques. C’est le cas d’Anthony Romilio, un paléontologue australien. Selon lui, l’enthousiasme peut parfois mener à des « surinterprétations ». Il pense que les traces pourraient simplement être des empreintes mal préservées de grands hadrosaures, une espèce déjà connue pour se déplacer en groupe.
Christian Meyer, un chercheur suisse, va même plus loin, qualifiant les conclusions de « spéculatives ». Pour lui, la qualité de conservation des traces ne permet pas d’être aussi affirmatif. « Je trouve que la préservation des traces… n’a pas de base solide », explique-t-il, soulignant que l’idée de troupeaux mixtes est, pour l’instant, un peu « tirée par les cheveux ».
une affaire à suivre de très près
Alors, qui croire ? La vérité, c’est que la science est une longue enquête. Cette découverte n’est peut-être que le premier chapitre d’une histoire bien plus grande. Brian Pickles et son équipe ne baissent pas les bras. Au contraire, ils ont annoncé avoir déjà découvert plus de dix nouvelles pistes de circulation de dinosaures depuis cette première trouvaille.
Cela signifie que de nouvelles preuves sont en chemin et pourraient bientôt confirmer ou infirmer cette belle hypothèse. Comme le conclut Brian Pickles lui-même : « Il y a potentiellement bien plus à dire que ce que nous avons pu révéler jusque-là ». Une chose est sûre : le sol de notre planète a encore de nombreux secrets à nous livrer, et nous serons là pour vous les raconter.
Selon la source : nationalgeographic.fr