Certains cancers seraient causés par des infections courantes : ce que disent les chercheurs
Auteur: Adam David
L’idée peut paraître surprenante, et pourtant, elle est bien réelle. Plus d’un cancer sur six à l’échelle mondiale n’est pas le fruit du hasard ou de la génétique seule, mais la conséquence directe d’une infection. Cela représente plus de deux millions de nouveaux diagnostics chaque année, où un virus ou une bactérie a discrètement joué le rôle de déclencheur, comme le souligne l’Institut Pasteur.
Epstein-Barr, le pionnier tristement célèbre
Tout a commencé, ou presque, avec lui : le virus d’Epstein-Barr (EBV). Connu du grand public comme l’agent de la mononucléose, ce virus est en réalité un passager clandestin chez une immense majorité de la population, souvent sans faire de vagues. Pourtant, dès les années 1970, les chercheurs ont fait le lien formel entre sa présence et des cancers bien spécifiques, comme le lymphome de Burkitt, une forme agressive de leucémie, ou certains cancers du nasopharynx. Il fut le premier à être officiellement mis sur le banc des accusés.
L'hépatite B, ou la naissance du premier vaccin anti-cancer
Le cas de l’hépatite B est encore plus parlant. Imaginez : un porteur chronique du virus aurait un risque jusqu’à 200 fois supérieur de développer un cancer du foie. Une étude menée en Chine au début des années 80 a mis en lumière cette corrélation terrifiante, le virus se transmettant souvent de la mère à l’enfant ou par voies sanguine et sexuelle.
Cette découverte a été un véritable électrochoc dans le monde médical. Elle a poussé l’Institut Pasteur sur la voie du développement d’un vaccin. Mis sur le marché en 1985, il est devenu le tout premier vaccin de l’histoire capable non pas de guérir, mais de prévenir un cancer. On estime que des millions de cancers ont ainsi été évités depuis.
Papillomavirus, un enjeu majeur de santé publique
Dans le débat public, on entend plus souvent parler des papillomavirus humains, ou HPV. Et pour cause. Certaines souches de ce virus, transmises sexuellement, sont aujourd’hui reconnues comme la cause principale du cancer du col de l’utérus, deuxième cancer le plus fréquent chez la femme dans le monde.
Là encore, la science a apporté une réponse : un vaccin. Depuis 2007, il est recommandé, notamment en France, chez les jeunes filles et garçons dès 11 ans, pour tenter d’enrayer une maladie qui tue encore plus d’un millier de femmes chaque année rien que dans l’Hexagone. Une prévention efficace, qui permettrait d’éviter plus de 60% de ces cancers.
Helicobacter pylori, la bactérie qui défie notre estomac
Mais les virus ne sont pas les seuls en cause. Une bactérie, particulièrement coriace, est aussi pointée du doigt : Helicobacter pylori. C’est une survivante. Elle est la seule bactérie connue capable de coloniser sur le long terme l’environnement pourtant ultra-acide de notre estomac, un milieu qui élimine normalement tous les autres microbes. On estime qu’elle est présente chez la moitié de la population mondiale.
Si elle est souvent discrète, sa présence chronique peut entraîner des ulcères, des gastrites et, dans une minorité de cas (environ 1 à 3 %), dégénérer en cancer de l’estomac. Un risque faible à l’échelle individuelle, mais considérable à l’échelle de la population infectée.
une bataille menacée par la résistance
Pendant longtemps, la parade à H. pylori semblait simple : un traitement antibiotique suffisait à l’éradiquer. Mais c’était sans compter sur un autre fléau sanitaire : l’antibiorésistance. La bactérie apprend à se défendre, et les traitements perdent en efficacité, obligeant les chercheurs à explorer de nouvelles pistes.
Le tableau est donc complexe. D’un côté, la prise de conscience qu’une part non négligeable des cancers est évitable, car liée à des agents infectieux. De l’autre, des outils puissants comme la vaccination. La bataille, cependant, n’est pas terminée. Entre les virus qui restent à débusquer et les bactéries qui résistent, la vigilance reste plus que jamais de mise.
Selon la source : passeportsante.net