L’idée semble presque tirée d’un roman. Et pourtant, elle est au cœur d’une recherche scientifique très sérieuse menée en Australie. Une molécule issue du venin d’abeille s’est révélée capable de détruire, en un temps record, les cellules d’un des cancers du sein les plus redoutables : le triple négatif.
Cette découverte ouvre une perspective fascinante, même si le chemin vers un traitement est encore long. Elle met en lumière une maladie complexe qui, jusqu’ici, laissait les médecins avec peu d’options.
Le 'triple négatif', un adversaire particulièrement complexe
Derrière ce nom un peu technique se cache une réalité brutale pour près de 9 000 femmes chaque année en France, soit 15 % des cas de cancer du sein. On l’appelle ‘triple négatif’ car il est dépourvu des trois cibles habituelles des thérapies : les récepteurs à l’œstrogène, à la progestérone et la protéine HER2. Résultat, les traitements hormonaux ou ciblés sont inefficaces.
Ce cancer frappe de surcroît des femmes souvent plus jeunes, dont près de la moitié n’a pas 40 ans au moment du diagnostic. Très agressif, son risque de récidive est élevé, ce qui en fait un véritable casse-tête pour les oncologues.
L'effet foudroyant du venin d'abeille
C’est de l’autre côté du globe, en Australie, que la surprise est venue. L’équipe de Ciara Duffy, du Harry Perkins Institute of Medical Research, a fait une découverte stupéfiante, publiée en 2020. La mélittine, principal composant du venin d’abeille, s’est montrée capable d’anéantir les cellules cancéreuses en une heure à peine, tout en laissant les cellules saines quasiment intactes.
« Le venin était extrêmement puissant », a sobrement commenté la chercheuse. En 60 minutes, les membranes des cellules tumorales étaient complètement détruites. Une efficacité redoutable, et une précision chirurgicale.
Une double action qui entrave la prolifération
Mais l’action de la mélittine ne s’arrête pas là. Les scientifiques ont observé qu’elle brouillait aussi les signaux de communication qui permettent aux cellules cancéreuses de se multiplier. En clair, non seulement elle tue, mais elle empêche aussi la tumeur de grandir.
Passant du laboratoire à l’expérimentation animale, les chercheurs ont confirmé ce potentiel. Chez des souris, une version de synthèse de la molécule, associée à une chimiothérapie classique, a permis de freiner considérablement la croissance des tumeurs. Une étape cruciale qui valide la piste.
En France, une recherche tout aussi active
Si cette découverte australienne a fait grand bruit, la France n’est pas en reste dans la lutte contre le cancer triple négatif. À Toulouse, l’Oncopole s’est imposé comme un centre névralgique de la recherche européenne sur le sujet.
Sous la houlette du Professeur Florence Dalenc, plusieurs études de pointe cherchent à percer les secrets de ce cancer. L’une vise à comprendre pourquoi certains traitements finissent par ne plus fonctionner ; une autre, baptisée METABREAST, explore les mécanismes de dissémination des métastases à partir d’une simple prise de sang. « Nous devons comprendre les mécanismes impliqués dans les résistances pour les contourner », martèle la spécialiste.
Un arsenal thérapeutique qui s'étoffe
Car la bataille se joue sur plusieurs fronts. Au-delà du venin d’abeille, de nouvelles armes rejoignent progressivement l’arsenal thérapeutique. On y trouve des ‘anticorps conjugués’, qui agissent comme des missiles à tête chercheuse pour délivrer une chimiothérapie directement au cœur de la tumeur.
D’autres pistes, comme l’immunothérapie, visent à réarmer le propre système immunitaire des patientes pour qu’il s’attaque lui-même au cancer. Chaque avancée, qu’elle vienne de la nature ou de la haute technologie, rapproche un peu plus d’une réponse efficace.
un espoir à cultiver avec prudence
Faut-il alors voir dans chaque abeille un futur remède ? Pas si vite. La route est encore longue entre ces résultats spectaculaires en laboratoire et une application sur l’humain. Des essais cliniques seront indispensables pour évaluer la toxicité et les doses efficaces.
La découverte reste cependant une source d’espoir immense. Elle rappelle que les solutions thérapeutiques de demain se cachent parfois là où on les attend le moins : au cœur même de la nature, dans le dard d’une simple abeille.
Selon la source : passeportsante.net