Cancer : des scientifiques découvrent un moyen puissant de prévenir son apparition
Auteur: Mathieu Gagnon
Pendant des années, on a pensé que le cancer, c’était un peu comme une mauvaise herbe qui pousse toute seule dans un coin. Une seule cellule qui devient folle, qui se multiplie sans contrôle, et c’est le début des ennuis. Une vision assez simple, finalement. Mais la science avance, et ce que les chercheurs découvrent aujourd’hui est bien plus fascinant. Et si ce n’était pas l’histoire d’une cellule isolée, mais plutôt une sorte de compétition, une lutte acharnée entre nos propres cellules ? C’est une idée qui change tout, et qui ouvre des pistes vraiment prometteuses pour l’avenir.
Des 'mauvaises' cellules ? pas si simple...
La première surprise, c’est que les mutations génétiques qui peuvent conduire à un cancer sont en fait très courantes dans notre corps. On pourrait penser que c’est rare, mais pas du tout. Prenez la peau, par exemple. Les scientifiques en trouvent dans environ un quart des cellules d’une peau qui a l’air parfaitement saine. C’est encore plus étonnant quand on regarde l’œsophage : passé la quarantaine, plus de la moitié de sa paroi est déjà couverte de cellules avec des anomalies. Et on en trouve aussi dans le côlon, les poumons, l’estomac… Alors, la question qui se pose est évidente : pourquoi ne tombons-nous pas tous malades ?
La compétition cellulaire, notre alliée secrète
La réponse se trouve dans une sorte de guerre civile microscopique qui se déroule en permanence à l’intérieur de nous. Nos cellules ne vivent pas chacune dans leur coin ; elles sont en compétition les unes avec les autres pour l’espace et les ressources. C’est un peu comme un jeu de chaises musicales permanent. Les cellules les plus fortes et les plus adaptées survivent et réussissent à pousser dehors les plus faibles. Et la bonne nouvelle, c’est que nos cellules saines, parfois dotées de mutations bénéfiques, peuvent être plus fortes que les cellules précancéreuses et les éliminer avant même qu’elles ne forment une tumeur. Des expériences sur des souris ont même montré que de toutes petites tumeurs peuvent être neutralisées de cette façon. Notre corps sait se défendre !
Un médicament pour le diabète à la rescousse ?
Alors, si c’est une compétition, peut-on aider les ‘gentilles’ cellules à gagner ? C’est exactement ce que des chercheurs britanniques ont essayé de faire. Ils se sont intéressés à une mutation très fréquente d’un gène appelé PIK3CA, qui aide les cellules à se développer plus vite. Ils ont remarqué que les cellules saines pouvaient être désavantagées. Mais, et c’est là que ça devient incroyable, en donnant aux souris de la metformine, un médicament très connu contre le diabète, ils ont réussi à donner aux cellules saines le même coup de pouce. Elles pouvaient alors se battre à armes égales ! À l’inverse, un régime riche en graisses donnait l’avantage aux cellules dangereuses, ce qui explique peut-être le lien entre obésité et certains cancers.
Chaque organe a sa propre bataille
Attention, ce n’est pas si simple. Une mutation qui pourrait être ‘protectrice’ dans l’œsophage pourrait n’avoir aucun effet, ou même être dangereuse, dans la peau. Chaque partie de notre corps est un champ de bataille différent avec ses propres règles. Pour y voir plus clair, les scientifiques utilisent maintenant un outil révolutionnaire, le CRISPR. Pensez-y comme à des ciseaux génétiques ultra-précis qui leur permettent de tester des milliers de gènes en quelques mois seulement. Un travail qui aurait pris des années auparavant. Cela les aide à cartographier toutes ces interactions complexes pour comprendre qui est ami et qui est ennemi dans chaque organe.
L'inflammation, le carburant du cancer
Les mutations ne sont pas les seules à jouer un rôle. L’environnement est tout aussi crucial. Et le grand coupable, c’est souvent l’inflammation chronique. Des choses comme la pollution de l’air, le reflux gastrique répété ou même certaines infections ne provoquent pas directement de mutations, mais elles créent une sorte d’état d’alerte permanent dans le corps. Cette inflammation agit comme un engrais : elle ‘réveille’ les cellules précancéreuses qui dormaient tranquillement et les pousse à se multiplier. Une étude a montré que vivre seulement trois ans dans une ville très polluée suffisait pour déclencher ce processus chez des non-fumeurs. Ça fait réfléchir, n’est-ce pas ?
Une nouvelle piste : calmer le feu
Cette découverte ouvre une porte complètement nouvelle pour les traitements. Au lieu de chercher seulement à tuer les cellules cancéreuses avec des traitements lourds, pourquoi ne pas simplement ‘calmer le feu’ de l’inflammation ? Les scientifiques ont testé cette idée en bloquant certaines protéines du système immunitaire, comme l’interleukine-1. Chez les souris exposées à la pollution, cela a permis de freiner l’apparition des tumeurs. Ce genre de traitement pourrait un jour protéger les personnes à haut risque, comme les anciens fumeurs ou ceux qui ont déjà eu un cancer. C’est une approche beaucoup plus douce, axée sur la prévention.
Conclusion : un espoir immense pour demain
On est peut-être à l’aube d’un vrai tournant. La lutte contre le cancer ne serait plus seulement une guerre pour éradiquer les ‘méchants’, mais plutôt une stratégie pour maintenir l’équilibre dans notre corps. L’idée est de renforcer nos bonnes cellules et de maîtriser l’inflammation avant même que la maladie n’ait une chance de s’installer. La route est encore longue, bien sûr, et il reste beaucoup à découvrir. Mais une nouvelle porte s’est ouverte, et avec elle, un immense espoir de pouvoir un jour prévenir le cancer plutôt que de devoir le guérir.
Selon la source : slate.fr