La fin d’un géant : l’iceberg le plus vieux du monde est en train de disparaître
Auteur: Mathieu Gagnon
Imaginez un bloc de glace aussi grand qu’une île, voyageant sur les océans pendant près de 40 ans. C’est l’histoire de A23a, l’iceberg le plus grand et le plus vieux que l’on connaisse. Mais voilà, après une longue et incroyable épopée, ce géant est en train de vivre ses derniers moments. Il se dirige vers des eaux plus chaudes où, comme tous les icebergs avant lui, il finira par fondre et retourner à l’océan. C’est la fin d’une ère, mais aussi une histoire fascinante que les scientifiques ont suivie de très près.
Un colosse qui se brise en morceaux
Son voyage touche à sa fin, c’est une certitude. Les scientifiques du British Antarctic Survey, qui le surveillent comme le lait sur le feu, nous disent que l’iceberg A23a se brise « rapidement ». On ne parle pas de petits glaçons, non. Il perd d’énormes morceaux, si gros qu’ils sont eux-mêmes considérés comme de grands icebergs ! À une époque, il faisait la taille de l’île hawaïenne d’Oahu. Aujourd’hui, sa superficie a bien diminué, pour atteindre environ 1 700 kilomètres carrés. Pour vous donner une idée, c’est à peu près la taille de la ville de Londres et de sa grande banlieue. C’est encore immense, mais plus pour très longtemps.
La naissance d'une légende en 1986
Pour bien comprendre, il faut remonter le temps. L’histoire de A23a commence en 1986, lorsqu’il s’est détaché d’une immense barrière de glace en Antarctique, appelée Filchner-Ronne. Depuis, il a souvent porté le titre de « plus grand iceberg du monde ». Parfois, un autre plus gros apparaissait, mais comme ces nouveaux venus fondaient plus vite, A23a finissait toujours par récupérer sa couronne. C’est aussi pour ça qu’il est devenu le doyen des icebergs actuels.
Un voyage pour le moins... chaotique
Son secret pour vivre si longtemps ? Il a été un peu casanier. Juste après sa naissance, il s’est coincé sur les fonds marins, dans une mer appelée la mer de Weddell. Et il est resté là pendant des décennies ! Ce n’est qu’en 2020 qu’il a réussi à se libérer pour enfin commencer son grand voyage. On pensait l’aventure lancée, mais non. Figurez-vous qu’il s’est de nouveau retrouvé coincé, cette fois dans une sorte de grand tourbillon marin. Pendant des mois, les images satellite le montraient tournant sur lui-même, avant qu’il ne parvienne enfin à s’échapper, emporté par un fort courant vers le nord.
Une menace évitée de justesse
Dans sa course, A23a a causé une dernière grosse frayeur. Au début de cette année, il a semblé se diriger tout droit vers l’île de Géorgie du Sud. C’était une vraie source d’inquiétude, car cette île abrite d’immenses colonies de phoques et de manchots. Un iceberg de cette taille s’échouant près de leurs plages aurait pu être une catastrophe pour eux. Heureusement, le géant a finalement changé de cap et s’est immobilisé à environ 80 kilomètres de la côte. Ouf !
Un destin naturel, pas une affaire de climat
On pourrait vite penser que cette fonte est une nouvelle preuve du réchauffement climatique. Mais les scientifiques sont formels : ce n’est pas le cas ici. Ted Scambos, un grand spécialiste des pôles, explique que c’est le cycle de vie tout à fait normal d’un iceberg. Après tout, ça fait des millénaires que ça se passe comme ça. A23a a simplement dérivé trop au nord, dans une zone où l’eau de l’océan est bien au-dessus de zéro. À cette température, un iceberg, même aussi grand, ne peut tout simplement pas survivre. C’est la nature qui suit son cours.
Même en disparaissant, il nous aide à comprendre l'avenir
La mort de A23a n’est pas vaine. Pour les scientifiques, c’est une occasion en or. Des équipes ont prélevé des échantillons d’eau tout au long de son parcours. En fondant, l’iceberg libère une énorme quantité d’eau douce dans l’océan salé, ce qui a un impact sur la vie marine et sur la capacité de l’océan à absorber le carbone. En étudiant ces changements, les chercheurs espèrent mieux comprendre le rôle de ces méga-glaciers. Et ces connaissances sont cruciales, car elles les aideront à mieux prévoir la montée du niveau de la mer dans les décennies et les siècles à venir.
Conclusion : la fin d'un long chapitre de glace
Bientôt, A23a sera trop petit pour être suivi par les satellites. Il se fondra complètement dans l’océan, terminant un voyage de près de quarante ans. Pour les scientifiques qui l’ont observé pendant si longtemps, c’est la fin d’un chapitre. Mais ce géant de glace nous laissera un héritage précieux : des données qui nous aideront à mieux protéger notre planète pour les générations futures. Une belle fin pour le roi des icebergs.
Selon la source : npr.org