Une « étoile ratée » imite un signe de vie, une mauvaise nouvelle pour les chasseurs d’extraterrestres
Auteur: Simon Kabbaj
C’est une molécule qui a fait couler beaucoup d’encre et fait rêver des millions de personnes. La phosphine. Sur Terre, elle est principalement produite par des formes de vie. Alors, quand on en a détecté des traces dans l’atmosphère de Vénus en 2020, certains y ont vu un signe possible de vie extraterrestre. Mais une nouvelle découverte vient de jeter un grand froid sur cet espoir. Des astronomes ont détecté d’énormes quantités de phosphine sur une ‘étoile ratée’, un objet où la vie est impossible. Une découverte qui nous rappelle que, dans la quête de vie extraterrestre, il faut se méfier des conclusions hâtives.
La fin d'une longue et étrange énigme pour les astronomes
Cette découverte, publiée aujourd’hui dans la prestigieuse revue *Science*, est d’abord une excellente nouvelle pour les astronomes. Depuis dix ans, ils étaient face à un grand mystère. Leurs modèles prédisaient que l’on devrait trouver de la phosphine en abondance dans l’atmosphère des géantes gazeuses ou des ‘naines brunes’ (ces astres à mi-chemin entre une planète et une étoile). Mais malgré des années de recherche, ils n’avaient presque rien trouvé. La détection de fortes signatures de phosphine sur une naine brune, nommée Wolf 1130C, vient enfin confirmer que leurs modèles n’étaient pas complètement faux.
La découverte grâce au télescope James Webb
C’est grâce à la puissance du télescope spatial James Webb que l’équipe, dirigée par l’astrophysicien Adam Burgasser, a pu faire cette découverte. Ils ont choisi de pointer le télescope vers cette naine brune un peu particulière, située à 54 années-lumière de nous. Et leur intuition a payé. En analysant la lumière provenant de l’astre, ils ont vu une signature très nette, une sorte de ‘coche’ dans leur graphique, qui est la marque caractéristique de la phosphine.
Pas d'aliens ici : une origine purement chimique
Mais alors, s’il y a de la phosphine, y a-t-il de la vie sur cette naine brune ? La réponse des scientifiques est un ‘non’ catégorique. Les naines brunes sont des astres très chauds et riches en hydrogène. Ces conditions sont parfaites pour la formation de phosphine de manière purement chimique, sans aucune intervention de la vie. ‘Chimiquement, il n’y a pas de vie impliquée là-dedans’, a insisté Adam Burgasser.
Qu'est-ce qu'une 'biosignature' ? Une question de contexte
Cette découverte nous rappelle une chose essentielle dans la recherche de vie extraterrestre. Comme l’explique Nathalie Cabrol, directrice de recherche au centre Carl Sagan de l’institut SETI, aucune molécule n’est en soi une ‘biosignature‘ (une preuve de vie). ‘Ce que nous cherchons, c’est la co-évolution de la vie et de son environnement’, dit-elle. Une molécule ne devient un signe de vie que si l’environnement qui l’entoure suggère qu’elle n’aurait pas pu se former de manière naturelle. Et pour la phosphine sur les naines brunes, ce n’est clairement pas le cas.
Un nouveau casse-tête pour les scientifiques
Si cette découverte résout une énigme, elle en crée une nouvelle. Les scientifiques ne savent pas encore pourquoi cette naine brune en particulier, Wolf 1130C, a produit autant de phosphine. ‘C’est comme si la nature était venue nous dire : ‘Ouais, voici plus de devoirs, une question de test plus difficile pour vous », a plaisanté Adam Burgasser. ‘Nous ne comprenons même pas la chimie naturelle du phosphore. Tant que nous n’aurons pas compris ça, nous ne pourrons pas vraiment nous fier à la phosphine comme une biosignature viable’.
Conclusion : un pas en avant, et un appel à la prudence
Selon la source : gizmodo.com