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Ce pays connaît la plus forte augmentation de cas de cancer et de décès au monde
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Introduction : l’urgence sanitaire silencieuse qui frappe le Liban

C’est une statistique qui glace le sang. Le Liban vit une véritable urgence sanitaire, une épidémie de cancer qui s’aggrave chaque année. Une nouvelle analyse du programme Global Burden of Disease, publiée dans la prestigieuse revue NRP, révèle une vérité choquante : le Liban connaît la plus forte augmentation au monde à la fois du nombre de nouveaux cas de cancer et du nombre de décès liés à cette maladie. Entre 1990 et 2023, l’incidence a bondi de 162% tandis que la mortalité a augmenté de 80%. Ces chiffres ne sont pas que des statistiques ; ils sont le reflet d’une tragédie qui se joue chaque jour dans les cliniques et les foyers à travers le pays.

Un cocktail mortel de crises qui a préparé le terrain

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Pourquoi le Liban ? Comment en est-on arrivé là ? La situation actuelle est le résultat d’années de crises qui se sont superposées. L’effondrement économique post-2019, la perte de valeur quasi totale de la monnaie et l’explosion de la pauvreté ont mis le système de santé à genoux. Les hôpitaux sont en difficulté, les chaînes d’approvisionnement en médicaments sont rompues. Bien sûr, le vieillissement de la population et l’urbanisation avaient déjà fait grimper les cas de cancer, comme dans le reste de la région. Mais l’accélération récente est bien plus brutale. Aujourd’hui, les familles doivent jongler entre les factures de générateur, le loyer et les visites à la clinique, ce qui pousse beaucoup de gens à repousser les dépistages jusqu’à ce que les symptômes deviennent impossibles à ignorer.

Cause n°1 : L’air empoisonné que tout le monde respire

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L’un des principaux coupables est la pollution de l’air. Les coupures d’électricité incessantes obligent la population à dépendre de générateurs diesel privés, qui crachent en permanence des particules fines et ultrafines toxiques. Une étude de l’Université Américaine de Beyrouth a révélé qu’environ 87% de ces particules étaient ‘quasi-ultrafines’, capables de pénétrer profondément dans les poumons, d’entrer dans la circulation sanguine et d’atteindre tous les organes. Ajoutez à cela la pollution due au trafic automobile mal contrôlé, et vous obtenez un cocktail cancérigène que les habitants respirent chaque jour, sans aucun moyen d’y échapper.

Cause n°2 : Le tabac, un fléau omniprésent et banalisé

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Le tabagisme est l’autre grand fléau qui aggrave la situation. Le Liban a l’un des taux de prévalence du tabagisme les plus élevés de la région. L’usage de la cigarette et du narguilé est banalisé, y compris chez les jeunes. Le tabagisme passif est omniprésent dans les cafés, sur les lieux de travail et dans les foyers, exposant même les non-fumeurs à un risque accru. Les experts de la santé publique déplorent que les lois anti-tabac et les campagnes de prévention soient très peu appliquées, laissant les normes sociales largement inchangées. En conséquence, le cancer du poumon reste une menace imminente, sans parler des cancers de la bouche, de la gorge, du pancréas et de la vessie, également liés au tabac.

Cause n°3 : Un système de santé à l’agonie

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L’impact de la crise économique sur le système de santé est dévastateur. Les cliniciens rapportent des pénuries constantes de médicaments essentiels contre le cancer. Une étude récente a révélé que près d’un tiers des patients interrogés avaient subi des interruptions de traitement à cause de ces pénuries. Quand un médicament manque, les oncologues doivent parfois changer de protocole, ce qui peut réduire les chances de guérison. Les hôpitaux manquent aussi de personnel, car de nombreux infirmiers et médecins ont émigré pour trouver de meilleurs salaires. Le système actuel ‘fonctionne sur la résilience et l’improvisation’, alors que le traitement du cancer exige précision et constance.

L’impact humain : des choix impossibles et un fardeau écrasant

Derrière les statistiques, il y a des drames humains. Une mère à Beyrouth raconte avoir perdu sa sœur et sa mère du cancer, tout en avouant qu’elle continue de fumer car le stress lui semble ingérable. Son histoire est celle de milliers de familles qui doivent faire des choix impossibles. Quand un proche a besoin d’une chimiothérapie, la famille doit se démener pour trouver l’argent du transport, obtenir un rendez-vous. Certains doivent manquer le travail pour devenir aidants, d’autres font des heures supplémentaires pour payer les factures. La pression est si forte que même les patients les plus motivés finissent par abandonner leur traitement. C’est ce coût humain qui révèle pourquoi la prévention et le dépistage sont si cruciaux.

Des solutions existent : l’exemple d’autres pays

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La situation du Liban est dramatique, mais elle n’est pas une fatalité. D’autres pays ont réussi à inverser leur courbe du cancer grâce à des politiques publiques fortes et volontaristes. Plusieurs pays ont fait chuter la mortalité par cancer du poumon grâce à un contrôle strict du tabac (taxes élevées, avertissements chocs, interdiction de fumer dans les lieux publics). Des programmes de dépistage organisés ont permis de réduire les décès par cancer du sein, du col de l’utérus et colorectal. Des villes ont amélioré la qualité de leur air en renforçant les normes pour les véhicules et en stabilisant leur réseau électrique pour mettre fin à la dépendance aux générateurs. Le Liban peut s’inspirer de ces exemples.

Conclusion : un appel à l’action pour ne plus choisir entre la crise et le cancer

La courbe du cancer au Liban n’est pas obligée de continuer à grimper au rythme le plus rapide du monde. Les statistiques sont alarmantes, mais elles pointent directement vers des solutions qui peuvent sauver des vies. Une électricité plus propre, un contrôle strict du tabac, un dépistage accessible et des médicaments disponibles en permanence. C’est un défi immense, surtout dans le contexte de crise actuel. Mais comme le soulignent les experts, ces politiques ne sont pas seulement des interventions sanitaires, ce sont des stratégies de croissance qui maintiennent les gens en vie et au travail. Le Liban a la science et l’expertise pour changer de cap. La question est de savoir si ses dirigeants et sa société choisiront de le faire maintenant, pendant que tant de vies peuvent encore être sauvées.

Selon la source : oncodaily.com

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