Un regard différent sur le voyage spatial

Partir dans l’espace, c’est le rêve de beaucoup d’entre nous. Flotter en apesanteur, voir notre belle planète bleue de là-haut… Mais ce grand voyage n’est pas sans conséquences pour le corps humain. Et ce qui est fascinant, c’est que nous ne sommes pas tous égaux face à ces défis. Une étude récente vient de mettre en lumière quelque chose d’assez inattendu : les yeux des hommes et des femmes ne réagiraient pas du tout de la même manière à un séjour en orbite.
On pourrait penser que l’apesanteur est la même pour tout le monde, mais il semblerait que notre biologie, elle, ait son propre avis sur la question. C’est une découverte qui pourrait bien changer la façon dont on prépare les futures missions spatiales.
Les premiers constats : une affaire du genre ?

C’est une équipe de l’Université de Floride, menée par la chercheuse Rachael D. Seidler, qui a soulevé ce lièvre. En analysant les examens des yeux et les scanners du cerveau d’astronautes avant et après leur vol, ils ont remarqué des schémas bien distincts. Chez les hommes, le principal souci semble être des changements au niveau des yeux, surtout après de longues missions. En revanche, chez les femmes astronautes, ce sont plutôt les fluides dans le cerveau qui bougent de manière plus marquée, notamment vers le sommet du crâne.
Le chiffre est assez parlant : environ 70% des astronautes de la Station Spatiale Internationale connaissent des problèmes de vision. Ce n’est pas rien quand on prépare des voyages qui dureront des mois, voire des années. Rachael D. Seidler le dit elle-même : « Fait intéressant, les changements oculaires étaient plus fréquents chez les hommes que chez les femmes ». Une tendance notable, même si les scientifiques attendent d’avoir plus de données pour en être absolument certains.
Le SANS, ce mal étrange des astronautes

Ce phénomène porte un nom un peu compliqué : le Syndrome Neuro-oculaire Associé au Vol Spatial, ou SANS pour les intimes. C’est devenu l’une des préoccupations majeures pour la santé des équipages. Mais qu’est-ce que c’est, au juste ?
En gros, à cause de l’apesanteur, les fluides du corps ont tendance à remonter vers la tête. Ce déplacement de liquide peut causer plusieurs soucis : un gonflement du nerf optique, des plis dans une membrane de l’œil et, le plus courant, un aplatissement de l’arrière du globe oculaire. Imaginez que votre œil, normalement bien rond, se déforme légèrement. Forcément, cela peut perturber la mise au point et donc la vision. Et le plus inquiétant, c’est que ce changement peut parfois persister jusqu’à un an après le retour sur Terre.
Le cerveau, lui, raconte une autre histoire

Si les yeux des hommes semblent plus touchés, le cerveau des femmes, lui, montre des adaptations différentes. L’étude a révélé une plus grande réduction de ce qu’on appelle « l’eau libre » près du sommet de leur cerveau après un vol. C’est un signe clair que les fluides cérébraux se réorganisent différemment.
Mais voilà le mystère : les chercheurs n’ont pas trouvé de lien direct et évident entre ces changements dans le cerveau et les problèmes aux yeux. C’est un peu comme si le corps réagissait au même stress – l’apesanteur – mais que le cerveau et les yeux suivaient des chemins séparés. Cela pourrait expliquer pourquoi certains astronautes ont de gros problèmes de vue sans que leur scanner cérébral ne montre de changements majeurs. Tout n’est pas encore clair, loin de là.
Les limites de l’étude et les pistes à explorer

Il faut rester prudent, bien sûr. Les scientifiques sont les premiers à le dire. L’un des défis, c’est qu’il y a encore beaucoup moins de femmes astronautes que d’hommes. Difficile, donc, de tirer des conclusions définitives avec des échantillons si déséquilibrés. C’est un peu comme essayer de comprendre une population entière en n’interrogeant qu’une petite partie.
L’étude a aussi montré que les symptômes pouvaient varier. Chez les femmes qui développaient ce fameux SANS, on observait soit l’aplatissement de l’œil, soit une tendance à devenir hypermétrope, mais sans le gonflement du nerf optique parfois vu chez les hommes. Chaque cas est un peu différent. Une chose est sûre cependant : l’âge ne semble pas être un facteur déterminant, ce qui est une information en soi.
Conclusion : Comment protéger nos explorateurs de demain ?

Alors, que faire de toutes ces informations ? D’abord, il est clair que les équipes médicales doivent surveiller de très près l’aplatissement du globe oculaire pendant et après les missions. C’est un signal d’alarme précoce et fiable. Ensuite, il faudra sans doute développer des programmes de prévention personnalisés, qui tiendront compte du genre de chaque astronaute pour mieux anticiper les risques.
Des solutions sont déjà à l’étude, comme des appareils qui créent une pression négative sur le bas du corps pour aider à faire redescendre les fluides vers les jambes. Heureusement, de plus en plus de femmes participent aux vols spatiaux, et les missions privées et internationales nous fournissent toujours plus de données. Avec le temps, les chercheurs pourront y voir plus clair et trouver les meilleures solutions pour que nos astronautes gardent un œil perçant, même au fin fond de l’espace.