Une machine qui lit dans les pensées en mandarin ? La science fait un pas de géant
Auteur: Mathieu Gagnon
Imaginez un instant ne plus pouvoir parler, vos pensées prisonnières de votre propre esprit. C’est une réalité terrible pour des milliers de personnes. Mais à Shanghai, des chercheurs viennent peut-être de trouver une clé pour ouvrir cette prison. Ils ont réussi quelque chose d’incroyable : décoder le mandarin, une langue particulièrement complexe, directement depuis les signaux du cerveau. Et en temps réel !
Le plus fou dans tout ça ? La personne qui a participé à l’étude a pu non seulement communiquer, mais aussi contrôler un bras robotisé et même un avatar numérique par la simple force de sa pensée. On n’est plus dans la science-fiction, mais bien dans une avancée qui pourrait changer des vies.
À quoi servent ces 'lecteurs de pensée' ?
Quand on entend parler de lire dans les pensées, on peut vite s’imaginer des scénarios un peu inquiétants. Soyons clairs : l’objectif ici est purement médical. Ces interfaces cerveau-ordinateur (ou BCI, pour faire plus court) sont développées pour redonner une voix à ceux qui l’ont perdue à cause d’un AVC, de la maladie de Charcot (SLA) ou d’autres problèmes neurologiques.
C’est une technologie qui offre un espoir immense de restaurer la communication. Pensez-y, pouvoir à nouveau échanger avec ses proches, exprimer ses besoins… ce n’est pas un gadget. C’est une question de dignité. Ces appareils ne sont pas tout à fait nouveaux, mais la recherche s’était jusqu’à présent concentrée sur l’anglais, une langue bien plus simple à déchiffrer pour une machine.
Le défi particulier du mandarin
Pourquoi le mandarin a-t-il donné tant de fil à retordre aux scientifiques ? Eh bien, c’est une langue tonale. Qu’est-ce que ça veut dire ? Simplement que la signification d’un mot peut changer du tout au tout selon l’intonation avec laquelle vous le prononcez. Une même syllabe peut avoir quatre, voire cinq sens différents. Un vrai casse-tête pour un ordinateur qui essaie de deviner ce que vous voulez dire.
Ajoutez à cela que le mandarin a beaucoup de mots très courts (monosyllabiques) et de nombreux homophones (des mots qui se prononcent pareil mais ne veulent pas dire la même chose). Jusqu’à présent, les tentatives de décodage étaient très limitées, bien loin d’une utilisation pratique au quotidien.
Comment ont-ils réussi cet exploit ?
L’équipe de chercheurs a travaillé avec une patiente de 43 ans, suivie pour une épilepsie. Pour surveiller son cerveau, les médecins avaient déjà implanté une grille d’électrodes très fine et très dense (on parle de 256 capteurs !) à la surface de son cerveau. C’est ce qu’on appelle un ECoG.
Pendant 11 jours, ils lui ont demandé de lire des caractères et des phrases. Pendant ce temps, la machine enregistrait l’activité de son cerveau, apprenant à associer tel signal à tel mot, à telle intonation. En gros, elle apprenait le mandarin neuronal de la patiente. Et les résultats sont bluffants : une précision de plus de 73 % pour décoder des phrases complètes en temps réel, avec une vitesse de communication d’environ 50 caractères par minute. C’est déjà énorme.
Tout n'est pas encore parfait, et c'est normal
Bien sûr, il faut rester mesuré. Les chercheurs sont les premiers à le dire : leur étude a des limites. D’abord, elle n’a été menée que sur une seule personne. Il faudra donc la reproduire sur d’autres patients pour s’assurer que ça fonctionne pour tout le monde. C’est la base de la science, après tout.
De plus, la grille d’électrodes n’était pas placée de manière idéale pour capter tous les signaux liés aux tons, car son but premier était de surveiller les crises d’épilepsie. Malgré cela, les résultats sont déjà très prometteurs. On peut imaginer que des recherches futures, avec du matériel spécifiquement conçu pour cela, donneront des résultats encore meilleurs. C’est un premier pas, mais un pas de géant.
Conclusion : Et maintenant, que nous réserve l'avenir ?
Cette avancée est bien plus qu’une simple prouesse technique. C’est une porte qui s’ouvre pour des millions de locuteurs de langues tonales à travers le monde. Cela prouve que la technologie BCI peut être adaptée à des langues très différentes de l’anglais.
L’avenir ? Les scientifiques espèrent bien sûr améliorer la précision du système. Peut-être en écoutant d’autres zones du cerveau qui gèrent le sens des mots, pas seulement celles qui commandent les muscles de la bouche. L’objectif final reste le même : rendre la communication à ceux qui l’ont perdue. Offrir la possibilité de contrôler des appareils par la pensée et, surtout, de briser le silence. Et ça, c’est un espoir qui n’a pas de prix.
Selon la source : medicalxpress.com