Le cancer du pancréas pirate le système nerveux pour s’accélérer : une découverte révolutionnaire ouvre de nouvelles pistes thérapeutiques

Auteur: Mathieu Gagnon

2025-11-12 09:35:18

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Crédit: lanature.ca (image IA)

C’est une vérité difficile à accepter : le cancer du pancréas reste, hélas, l’un des types de tumeurs les plus mortels que nous connaissions. Les traitements sont complexes, et trouver de nouvelles façons de le combattre est une quête incessante pour les chercheurs du monde entier. Mais figurez-vous qu’une équipe de la Technical University of Munich (TUM) vient peut-être de mettre le doigt sur un mécanisme inattendu, une sorte de talon d’Achille que la tumeur utilise pour prospérer.Leurs travaux, publiés dans la prestigieuse revue Cancer Cell, révèlent que ces tumeurs pancréatiques ne se contentent pas d’attaquer les organes. Elles s’introduisent carrément dans le système de communication du corps, celui des nerfs, en créant des structures que l’on appelle des « pseudosynapses ».

Quand le système nerveux alimente la maladie

Ce n’est pas la première fois qu’on observe un lien étroit entre les nerfs et le cancer. On savait déjà, depuis un certain temps, que notre système nerveux peut vraiment influencer le développement des tumeurs. Par exemple, il arrive que des cellules nerveuses issues de tissus sains se mettent à pénétrer directement dans les tumeurs. Ce phénomène, appelé « invasion neurale », est généralement synonyme de très mauvais pronostic.Mais il y a six ans, une équipe américaine avait fait une découverte fascinante dans le cerveau : les tumeurs cérébrales peuvent créer leurs propres synapses pour détourner la communication neuronale à leur profit. Le professeur Ekin Demir, un clinicien-chercheur de la TUM, et son équipe se sont demandés : si ça marche dans la tête, est-ce que ça ne pourrait pas marcher ailleurs, dans des cancers hors du cerveau ?

La chasse aux 'pseudosynapses' pancréatiques

Puisque les tumeurs du pancréas sont souvent associées à cette fameuse « invasion neurale », c’était l’endroit idéal pour commencer leurs recherches. Les scientifiques se sont donc mis en quête de ces structures semblables à des synapses. Comment ont-ils procédé ? En cherchant des amas de récepteurs spécialisés dans la réception des messages chimiques (les neurotransmetteurs).Et surprise ! Dans plusieurs échantillons de tumeurs pancréatiques, ils ont déniché une concentration incroyable de récepteurs que l’on nomme les récepteurs NMDA. Ce sont exactement ceux qui sont faits pour capter un neurotransmetteur bien connu : le glutamate. En observant la chose sous un microscope électronique, ils ont bien confirmé l’existence de ces structures caractéristiques. En raison de quelques légères différences physiologiques avec les vraies synapses neuronales, ils les ont baptisées « pseudosynapses ».

Le piège du glutamate et des ondes de calcium

Mais quel avantage terrible la tumeur tire-t-elle de ces pseudosynapses ? C’est assez machiavélique, si vous voulez mon avis. Le pancréas, comme d’autres glandes, est naturellement régulé par le système nerveux. Il reçoit du glutamate par ses synapses pour fonctionner correctement.Les pseudosynapses imitent ce mécanisme naturel. Le professeur Demir l’explique très clairement : « Quand le glutamate se fixe sur ces récepteurs NMDA des cellules cancéreuses, cela ouvre un canal et le calcium se met à affluer dans la cellule. » Ce flot de calcium n’est pas anodin, loin de là. Il déclenche des signaux moléculaires qui, tenez-vous bien, sont là pour booster la croissance tumorale et la formation de métastases. En gros, c’est un signal d’accélération permanent !

Un signal de croissance soutenu et durable

Ce qui rend ce mécanisme particulièrement efficace pour le cancer, c’est la façon dont ces signaux se manifestent. L’équipe de recherche a observé que les cellules cancéreuses génèrent des ondes de calcium « lentes et durables ». Ce n’est pas juste un petit pic, non. C’est un signal soutenu qui alimente constamment l’expansion de la tumeur.Franchement, je trouve ça fascinant (et terrifiant) de voir à quel point ces cellules peuvent être intelligentes dans leur manière de détourner nos propres systèmes biologiques. C’est une véritable leçon d’ingénierie biologique, même si elle est au service d’une maladie si grave. Mais, et c’est là que l’espoir revient, la compréhension de ce mécanisme ouvre forcément une fenêtre pour de nouvelles thérapies.

Bloquer les récepteurs : une piste d’espoir

Heureusement, si la tumeur se sert d’une porte, on peut peut-être la verrouiller, n’est-ce pas ? C’est ce que les chercheurs ont réussi à faire lors d’expériences menées sur des souris. En utilisant un médicament pour bloquer spécifiquement ces récepteurs NMDA sur les cellules tumorales, les résultats ont été très encourageants. Les tumeurs pancréatiques ont ralenti leur croissance, elles ont développé beaucoup moins de métastases, et les animaux ont vécu plus longtemps. C’est énorme !Ce qui est vraiment prometteur, c’est que le professeur Demir et son équipe utilisent actuellement des méthodes informatiques pour identifier des médicaments qui sont déjà approuvés pour d’autres usages, mais qui pourraient aussi bloquer ces récepteurs NMDA. Si c’est le cas, cela accélérerait énormément le développement de nouveaux traitements.

Vers une application plus large pour d'autres cancers ?

Bien sûr, toute cette recherche a démarré avec le cancer du pancréas, mais la question qui brûle les lèvres des scientifiques est : est-ce que ce mécanisme de pseudosynapses existe aussi ailleurs ?L’équipe suspecte très fortement que d’autres types de tumeurs pourraient bien elles aussi former ces structures pour accélérer leur croissance. Si cette hypothèse se confirmait, cela voudrait dire que l’on aurait mis au jour un principe fondamental dans la progression du cancer. Une thérapie visant l’interface entre le système nerveux et les tumeurs pourrait alors ouvrir des options de traitement complètement nouvelles pour une grande variété de patients. C’est une révolution potentielle.

Un nouveau regard sur la maladie

Ce travail de la Technical University of Munich est une grande source d’espoir. Il nous rappelle que la bataille contre le cancer est loin d’être terminée, mais que chaque nouvelle compréhension de ses mécanismes est une victoire potentielle. Le fait que les tumeurs ne soient pas seulement des masses de cellules anarchiques, mais qu’elles piratent activement notre propre communication neurologique, change notre façon de voir les choses.Nous attendons avec impatience de savoir si des médicaments existants peuvent rapidement être détournés pour bloquer ces pseudosynapses. Identifier des thérapies qui ciblent l’action du glutamate sur les récepteurs NMDA pourrait vraiment changer la donne pour les patients atteints du cancer du pancréas, et peut-être bien d’autres aussi. Un pas de plus vers une meilleure prise en charge, c’est tout ce que l’on souhaite.

Selon la source : medicalxpress.com