Le mystère toxique du lac Érié enfin résolu : des scientifiques identifient le micro-organisme coupable
Auteur: Mathieu Gagnon
Ces fleurs d’eau peuvent libérer des poisons capables de mettre en danger à la fois la vie aquatique et, pire encore, notre propre santé. On se souvient tous, j’espère, de l’épisode de 2014 où la ville de Toledo a failli se retrouver sans eau potable. Ce genre de situation, ça donne froid dans le dos.
Mais, jusqu’à très récemment, un des poisons les plus puissants qui hantait le lac restait un mystère. Des chercheurs de l’Université du Michigan ont réussi, par un travail de fourmi, à identifier l’espèce spécifique qui produit la saxitoxine. Et ils ont trouvé un coupable : une cyanobactérie nommée Dolichospermum. Quelle trouvaille, non ?
La saxitoxine : un poison redoutable au profil mystérieux
En 2014, c’était la microcystine qui avait causé des ravages, menaçant l’approvisionnement en eau potable de Toledo. Pourtant, avant ça, dès 2007, on avait détecté des traces d’une autre toxine, bien plus terrifiante, la saxitoxine. Ce sont des neurotoxines, un groupe de poisons naturels considéré parmi les plus puissants au monde. Imaginez la puissance ! Mais pendant des années, personne ne savait qui, dans le lac, était le petit fabricant de cette horreur.
Comme l’a dit très justement Gregory Dick, professeur de sciences de la terre et de l’environnement : « Le principal avantage de connaître l’organisme qui produit la toxine est que cela nous aide à comprendre les conditions qui provoquent la production de cette toxine. » C’est logique, n’est-ce pas ? Savoir pourquoi ils réussissent est essentiel pour la gestion de la politique environnementale.
Décodage de l'ADN : la méthode du « shotgun sequencing »
Une fois qu’ils ont toutes ces données, ils reconstruisent le génome complet des microbes et cherchent les gènes spécifiques qui sont la signature de la production de saxitoxine.
L’analyse a été révélatrice : ils ont trouvé plusieurs souches de Dolichospermum dans le lac, mais figurez-vous que seulement certaines d’entre elles avaient le gène capable de générer le poison. Pourquoi cette différence ? On ne sait pas encore vraiment, mais cette découverte a permis de se concentrer sur les conditions environnementales qui font basculer ces organismes du côté toxique.
Le lien inquiétant avec les températures chaudes
Et devinez quoi ? Ils ont trouvé plus de ce gène maudit dans les eaux chaudes. Ce n’est pas une surprise totale, bien sûr, mais c’est une confirmation qui donne à réfléchir.
« C’est intéressant parce que nous savons que les lacs changent avec le changement climatique », a souligné Den Uyl. La grande question, qu’il a bien formulée, est simple : comment le réchauffement de nos lacs va-t-il modifier ces communautés biologiques, y compris les algues nuisibles ? C’est une boucle infernale, je suppose. L’eau chauffe, le poison se répand potentiellement davantage. C’est la réalité.
La « superpuissance » des Dolichospermum
Parce que Dolichospermum possède une adaptation tout à fait inhabituelle. Il a la capacité d’utiliser l’azote sous forme de diazote, le gaz qui est abondant dans l’atmosphère. C’est ce que le professeur Dick appelle une « superpuissance » !
Peu d’organismes peuvent faire ça. Cette capacité leur permet d’être beaucoup plus compétitifs lorsque les autres sources de nourriture (comme l’ammonium) sont rares. Avoir le plan complet du génome, comme l’a expliqué Dick, c’est fascinant, car cela révèle tout ce que l’organisme peut faire, du moins en théorie. Et obtenir l’azote directement de l’air ? C’est un avantage énorme.
Surveiller le gène, pas seulement l'algue
« Maintenant que nous savons qui le produit, je pense que nous pouvons mieux surveiller ces organismes et évaluer directement l’abondance du gène au fil du temps », a conclu Gregory Dick. C’est la bonne nouvelle dans toute cette histoire, non ? Nous avons enfin un marqueur précis.
Même s’il est trop tôt pour dire si cet organisme est déjà en train de devenir plus abondant, cette corrélation entre la température et la présence du gène est clairement un signal d’alarme. Cette étude, publiée dans Environmental Science & Technology, nous rappelle qu’en matière d’environnement, chaque petit microbe compte, et que le réchauffement climatique pourrait bien donner un avantage mortel à certains d’entre eux. Il faudra rester très attentifs.
Selon la source : scitechdaily.com