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Le poumon de la Terre s’essouffle : comment les satellites alertent sur la perte de stockage de carbone en Amazonie
Crédit: lanature.ca (image IA)

Quand le grand puits de carbone devient une source d’inquiétude

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Pendant des décennies, nous avons considéré la forêt amazonienne comme l’un de nos meilleurs alliés contre la crise climatique, un gigantesque aspirateur à dioxyde de carbone. Franchement, c’est un peu le poumon de la planète, non ?

Mais, c’est une chose sérieuse et assez terrifiante qui se passe. Certaines parties de cet écosystème ne font plus leur travail correctement. Pire, elles émettent désormais plus de carbone dans l’atmosphère qu’elles n’en absorbent. On ne parle pas d’une petite variation, mais d’un changement fondamental qui doit nous forcer à revoir nos calculs.

Ce revirement est un véritable signal d’alarme. Nous devons absolument baser nos décisions climatiques sur des faits concrets et indiscutables. Et pour cela, il nous faut des outils fiables, indépendants de toute déclaration nationale. C’est là que la science spatiale, que l’on croyait lointaine, devient cruciale.

Regarder la Terre depuis l’espace : une méthode de suivi essentielle

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Si l’on essaie de suivre le carbone uniquement depuis le sol, les chiffres reposent souvent sur des estimations. Combien de carburant une usine a brûlé ? Combien d’arbres ont été plantés ? Ces rapports sont utiles, certes, mais il est facile de manquer ce qui se passe réellement, surtout sur des étendues aussi vastes que la forêt tropicale.

C’est pourquoi les satellites d’observation de la Terre, développés en partie grâce aux décennies de travail de l’Agence spatiale européenne (ESA), sont devenus indispensables. Grâce à eux, les scientifiques reçoivent des données claires, indépendantes et non biaisées, directement de l’espace.

Ces yeux là-haut surveillent nos forêts et notre atmosphère. Ils nous aident à quantifier précisément les mouvements de carbone entre la terre et le ciel. Une prouesse technologique qui nous offre, enfin, une vue d’ensemble.

Le budget carbone : une course contre la montre

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Le « budget carbone » est peut-être le chiffre le plus important dans la science du climat. C’est la quantité de dioxyde de carbone que nous pouvons encore émettre avant de dépasser cette fameuse limite de 1,5°C fixée par l’Accord de Paris. Est-ce que ce terme n’est pas un peu effrayant, ce compte à rebours ?

La situation est critique. Au début de l’année 2025, il restait environ 235 gigatonnes dans ce budget. Au rythme actuel des émissions, les experts estiment que nous pourrions dépasser ce seuil critique en six petites années. C’est demain, en fait.

Pour gérer ce budget, les scientifiques doivent surveiller deux choses : combien de carbone est injecté dans l’air, et combien les puits naturels (les forêts et les océans) en retirent. Les océans, eux, sont relativement stables. Mais les puits terrestres, c’est une autre histoire ! Les changements, même infimes, dans la capacité des forêts tropicales à stocker le carbone peuvent avoir des répercussions énormes.

Un point crucial, souvent ignoré : les perturbations de moins de deux hectares – ce qui est très petit – ont été responsables de près de 90 % de la perte nette de carbone de la biomasse entre 1990 et 2020. C’est ça qui est étonnant : ce sont les petites blessures qui font le plus mal.

L’Amazonie et les forêts du nord en difficulté

L’Amazonie est un acteur majeur. Rien que le bassin amazonien absorbe chaque année environ 14 % de l’absorption végétale totale de la Terre. C’est colossal.

Pourtant, les données récoltées montrent une tendance alarmante. Entre 2010 et 2020, la forêt amazonienne a perdu 370 millions de tonnes de carbone, surtout dans sa région sud-est. Ces pertes ne ralentissent pas, au contraire. On s’approche dangereusement d’un point de bascule, un seuil après lequel la forêt ne pourrait plus se remettre. C’est terrible d’imaginer ça.

Et ce n’est pas uniquement une histoire tropicale. Les forêts boréales et tempérées de l’hémisphère nord, qui représentent 41 % des zones forestières mondiales, sont aussi concernées. Depuis 2016, beaucoup d’entre elles ont aussi basculé, passant de puits à sources de carbone. La faute aux sécheresses, aux incendies de forêt, et aux pressions climatiques qui s’accumulent.

Ces réserves de carbone que l’on oublie (le bois mort et les sols)

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On se concentre toujours sur les arbres majestueux, le feuillage vert, n’est-ce pas ? Pourtant, il s’avère que les plantes vivantes ne stockent pas la majorité du carbone terrestre. C’est une idée reçue qu’il faut absolument corriger.

Entre 1992 et 2019, sur les 35 gigatonnes de carbone absorbées par la terre, seulement 6 % se sont retrouvées dans la végétation vivante. Où est passé le reste ? Il est allé dans les sols, le bois mort, et dans d’autres zones non vivantes.

Ces réserves cachées, que l’on a tendance à négliger, sont pourtant tout aussi importantes. Et le projet RECCAP-2 de l’ESA, qui mélange données satellitaires, recherches sur le terrain et modèles informatiques, travaille justement à démêler ces flux complexes pour nous donner une vision régionale plus claire de ce qui se passe réellement.

C’est une question de nuance : il ne suffit pas de regarder ce qui est debout, mais aussi ce qui est enfoui ou tombé.

Protéger ce qui est ancien : pourquoi les vieilles forêts sont vitales

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Bien sûr, de nouveaux arbres peuvent repousser. On coupe, on replante. Sauf que, même lorsqu’une forêt se reconstitue après avoir été coupée ou endommagée, elle ne retrouve qu’environ un quart du carbone qu’elle a perdu initialement. C’est une perte sèche et permanente, ou du moins, très longue à récupérer.

Voilà pourquoi la protection des forêts anciennes et intactes est si essentielle. Une fois qu’elles ont disparu, leur pleine capacité de stockage de carbone ne peut tout simplement pas être remplacée, ou du moins pas dans des délais qui nous sont utiles.

Aujourd’hui, la plupart des pays déclarent leurs émissions en se basant sur des estimations d’activité. L’organisme intergouvernemental sur le changement climatique (IPCC) insiste pourtant : ce n’est pas suffisant. Les pays sont fortement encouragés à comparer leurs chiffres avec des mesures indépendantes, car cela augmente la précision des données et assure une meilleure transparence dans le processus.

Les méthodes développées par l’équipe RECCAP-2 – en utilisant ces précieuses données satellitaires et la modélisation atmosphérique – offrent justement aux pays les outils pour le faire.

« La comparaison des résultats des inversions avec les inventaires nationaux de gaz à effet de serre peut être appliquée régulièrement pour surveiller l’efficacité des politiques d’atténuation et les progrès réalisés par les pays pour atteindre les objectifs de leurs engagements », a d’ailleurs rappelé Simonetta Cheli, la directrice des programmes d’observation de la Terre de l’ESA. Le futur de la transparence climatique passe par l’espace.

Vers une transparence climatique grâce aux données satellitaires

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Le message est clair, même si le constater fait mal : la capacité des forêts tropicales à absorber nos émissions s’affaiblit dangereusement. Ce n’est plus une question de « si », mais de « quand » les plus grands puits naturels cesseront de nous aider. Cette nouvelle information, tirée des travaux de l’ESA, nous oblige à agir.

Grâce à des projets comme RECCAP-2, nous avons désormais une vision globale, indépendante et détaillée du véritable budget carbone mondial. Ces données, issues de l’observation satellitaire, ne remplacent pas l’action sur le terrain, bien sûr, mais elles permettent aux pays de mesurer et de vérifier leurs progrès de manière objective.

En comprenant mieux où le carbone va – et surtout pourquoi il s’échappe – nous pouvons espérer prendre des décisions plus éclairées et, je l’espère sincèrement, plus efficaces pour protéger ces trésors naturels que sont nos forêts. Il y a urgence, et l’espace nous donne les clés pour ne plus fermer les yeux sur la réalité.

Selon la source : earth.com

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