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Le reptile grimpeur: il y a 55 millions d’années, des crocodiles australiens de cinq mètres chassaient dans les arbres
Crédit: lanature.ca (image IA)

Le paradoxe du prédateur terrestre

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L’image classique du crocodile est celle d’un chasseur aquatique, dissimulé sous les eaux troubles, attendant patiemment l’occasion de bondir. Pourtant, une récente découverte paléontologique en Australie vient bousculer cette certitude. Il y a 55 millions d’années, l’ancêtre du crocodile moderne ne se contentait pas de patrouiller les rivières : il grimpait aux arbres.

Cette révélation spectaculaire repose sur l’analyse minutieuse de fragments de coquilles d’œufs fossilisées. Elle suggère l’existence d’une lignée de reptiles, aujourd’hui disparue, dont le comportement de chasse rappelait étrangement celui des grands félins africains.

Chasser en hauteur : une stratégie habituelle, sauf pour les reptiles

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Dans le règne animal, l’aptitude à se hisser en hauteur est une stratégie de prédation éprouvée. Qu’il s’agisse du margay, ce petit félin d’Amérique, ou du léopard, grimper permet d’atteindre des proies inaccessibles comme les singes, les oiseaux ou de petits mammifères comme les écureuils. Pour ces carnivores, l’arbre est également un garde-manger, un moyen de mettre la nourriture à l’abri des charognards.

Mais imaginer un crocodile de plusieurs mètres de long s’agripper aux branches est une tout autre histoire. Les reptiles actuels peuvent se hisser légèrement, mais leur morphologie n’est absolument pas adaptée à une chasse arboricole. Cette nouvelle étude remet en question ce que l’on croyait savoir sur la diversité comportementale des crocodiliens de l’Éocène.

L’énigme des œufs découverts dans un jardin

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L’existence de ces crocodiles grimpeurs a été confirmée grâce à une trouvaille étonnante réalisée il y a quelque temps dans le Queensland. C’est dans le jardin d’un éleveur de moutons, à Murgon, une petite ville du nord-est de l’Australie, que les scientifiques ont mis la main sur des fragments de coquilles d’œufs datant de 55 millions d’années.

Baptisés Wakkaoolithus godthelpi, ces fragments, même minuscules, ont été soumis à un examen poussé, combinant microscope optique et électronique. Les chercheurs ont ainsi pu confirmer qu’ils appartenaient à un groupe spécifique et aujourd’hui éteint : les crocodiles mékosuchines.

Les mékosuchines, seigneurs des eaux intérieures

Les mékosuchines étaient les maîtres incontestés des eaux intérieures australiennes – lacs, fleuves et rivières – il y a environ 55 millions d’années. À cette époque, rappelons-le, la géographie du continent était très différente, l’Australie étant encore partiellement reliée à l’Antarctique et à l’Amérique du Sud. Les crocodiles d’eau douce et d’eau salée que nous connaissons aujourd’hui n’arriveraient sur ces terres que beaucoup plus tard, il y a environ 3,8 millions d’années.

Cette équipe internationale, menée par l’Institut Català de Paleontologia Miquel Crusafont (Espagne) et incluant des chercheurs de l’UNSW Sydney, a publié ses conclusions dans le Journal of Vertebrate Paleontology.

Des dents de dinosaure pour un reptile de cinq mètres

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Grâce à des découvertes antérieures, notamment un fragment de mâchoire mis au jour en 1975, les spécialistes savaient déjà que les mékosuchines n’étaient pas des crocs ordinaires. Ils possédaient notamment des dents massives, souvent décrites comme étant de type «dinosaure». De plus, d’autres ossements avaient permis d’estimer leur taille à au moins cinq mètres de long, ce qui en faisait des prédateurs terrifiants.

Mais ce n’est pas leur puissance brute qui a fasciné les scientifiques, c’est bien leur technique de chasse. L’idée qu’un tel mastodonte ait eu la faculté de grimper aux arbres pour trouver son repas est la véritable révolution de cette étude.

« Ils chassaient peut-être comme des léopards »

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Le contraste avec le comportement des crocodiliens modernes – qui guettent tapis dans l’eau pour effectuer un bond fulgurant – est saisissant. Les mékosuchines, eux, devaient utiliser l’environnement vertical comme un atout, une position de frappe dominante.

«Ils chassaient peut-être comme des léopards, fondant sur toute proie imprudente qui leur faisait envie pour le dîner», a suggéré le professeur Michael Archer, paléontologue à l’University of New South Wales (UNSW) et co-auteur de l’étude, lors de ses échanges avec Phys.org. Si l’on imagine la scène, la surprise devait être totale pour les mammifères ou les oiseaux de l’époque qui pensaient être en sécurité en hauteur.

réécrire l’histoire des prédateurs australiens

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Cette découverte réécrit une partie significative de l’histoire évolutive des reptiles australiens. Elle nous rappelle à quel point les lignées disparues pouvaient développer des adaptations comportementales éloignées de celles que nous observons aujourd’hui. Les mékosuchines, avec leurs dents archaïques et leur stratégie arboricole, représentent un chapitre fascinant et inattendu de la biodiversité du Paléocène.

L’analyse des fossiles, même les plus fragmentaires comme des coquilles d’œufs, continue de révéler des mondes perdus où les lois de la nature semblaient moins fixes et bien plus surprenantes que ce que nos manuels d’histoire naturelle nous avaient laissé croire.

Selon la source : science-et-vie.com

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