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Un système stellaire à quatre étoiles en train de fabriquer une planète : bienvenue dans le chaos cosmique de HD 98800
Crédit: lanature.ca (image IA)

HD 98800, la pépinière cosmique

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Imaginez un peu : un système stellaire avec non pas une, non pas deux, mais quatre étoiles. Et le plus fascinant, c’est que ce quatuor cosmique est peut-être en train de « mettre au monde » une planète ! C’est le cas étonnant de HD 98800, niché dans la constellation du Cratère, à environ 150 années-lumière de la Terre. Pour nos yeux humains, c’est loin, très loin, bien sûr, mais en termes de distance galactique, c’est notre voisin immédiat.

Ce système est jeune, très jeune : environ 10 millions d’années. C’est à peine un bébé à l’échelle du cosmos, ce qui le place dans une phase cruciale de formation, quand les étoiles finissent de se stabiliser et que la matière environnante brille encore d’une lumière infrarouge intense. HD 98800 fait partie de l’association TW Hydrae, un regroupement d’une vingtaine de très jeunes étoiles. Voyons voir ce qui rend cette découverte si particulière et pourquoi elle bouleverse un peu nos modèles de formation planétaire.

Une architecture stellaire d’une complexité déconcertante

credit : lanature.ca (image IA)
La façon dont ces quatre étoiles sont agencées est pour le moins alambiquée. Elles sont organisées en deux paires binaires très serrées. Chaque paire forme un « couple » qui orbite autour de l’autre couple, créant ainsi une paire plus large. C’est un chaos organisé, je suppose, maintenu par la gravité.

Ce qui est vraiment intéressant, c’est que l’une de ces paires serrées, nommée HD 98800B, est entourée d’un disque de poussière. L’autre paire, par contre, n’a rien. Ces deux systèmes binaires sont gravitationnellement liés, mais ils sont séparés par une distance de 50 unités astronomiques (UA). Pour vous donner une idée, 50 UA, c’est approximativement 4,65 milliards de miles. C’est loin, mais pas assez pour ignorer les effets gravitationnels de l’autre couple.

L’énigme du disque de poussière et la spéculation planétaire

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C’est le disque de poussière autour de la paire HD 98800B qui excite les astronomes. Les observations montrent qu’il y a des lacunes et des espaces dans ce disque. Habituellement, quand on observe de tels vides dans un disque de débris, on se dit qu’une planète est passée par là, balayant et « nettoyant » tout sur son passage. La Dre Elise Furlan, qui a dirigé l’étude à l’UCLA, compare d’ailleurs les planètes à des « aspirateurs cosmiques » qui font le ménage autour des étoiles centrales.

Cependant, dans ce cas précis, la présence de la paire d’étoiles « sans disque » à 50 UA complique énormément l’équation. La poussière qui migre vers l’intérieur est soumise à des forces gravitationnelles incroyablement complexes et changeantes. Du coup, même si l’hypothèse d’une planète est séduisante, la Dre Furlan a bien souligné que, pour l’instant, l’existence d’une planète n’est que pure spéculation. Il y a trop d’influences extérieures pour être certain.

Des orbites excentriques qui remuent la poussière

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Un autre détail technique qui n’est pas anodin concerne les orbites. Chaque paire binaire effectue une révolution en quelques centaines de jours. Mais attention, leurs trajectoires ne sont pas de beaux cercles réguliers. Elles sont dites « excentriques », c’est-à-dire qu’à certains moments, les étoiles se rapprochent considérablement, puis s’éloignent à nouveau. Ce changement de distance, constant et imprévisible, a une importance capitale : il chauffe et agite la poussière environnante, ce qui est essentiel pour la formation des planètes.

Concernant l’âge des étoiles, elles ne sont plus des « bébés étoiles » (la phase T Tauri), mais elles ne sont pas encore parvenues à la maturité de notre Soleil. Les astronomes appellent ce stade intermédiaire le « post–T Tauri ». Elles se trouvent sur le diagramme de Hertzsprung–Russell juste au-dessus de la « séquence principale », où les étoiles adultes passent la majeure partie de leur vie. Les estimations de masse et de température sont cohérentes, s’alignant sur des âges compris entre sept et douze millions d’années, ce qui confirme leur jeunesse et le fait qu’elles sont encore en contraction.

La vue détaillée de Spitzer : deux ceintures de poussière distinctes

Grâce au télescope spatial Spitzer de la NASA, les scientifiques ont pu obtenir un aperçu très précis du disque formateur de planètes autour de HD 98800B. Le spectromètre infrarouge de Spitzer a révélé la présence, non pas d’une, mais de deux ceintures de poussière distinctes. C’est pas rien, ça !

La ceinture extérieure se trouve à environ 5,9 UA du binaire central (environ 549 millions de miles). On suppose qu’elle contient des matériaux plus volumineux, peut-être des astéroïdes et des comètes, agissant comme un véritable « entrepôt » de matériaux solides. L’autre ceinture est beaucoup plus proche, à seulement 1,5 à 2 UA des étoiles. Elle, par contre, est composée de très fines particules de poussière. Cette distinction indique un environnement structuré où les collisions sont fréquentes, réduisant les corps solides en grains très fins près du centre, tandis que les corps plus gros sont conservés plus loin. Le système brille d’ailleurs fortement dans l’infrarouge, ce qui confirme l’abondance de cette poussière chaude.

Une salle de classe cosmique unique

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La découverte de HD 98800 nous offre une occasion en or d’étudier la formation planétaire dans un environnement gravitationnel diablement complexe. C’est un cas rare, situé juste à côté de chez nous, si l’on peut dire, qui fournit des contraintes cruciales pour les modèles théoriques.

Le fait que deux ceintures de poussière très structurées puissent subsister malgré l’influence gravitationnelle de quatre étoiles montre que même sous des forces extrêmes, le matériau solide nécessaire à la formation des planètes peut persister tant que les étoiles achèvent leur contraction. En retraçant son mouvement (la cinématique), les astronomes ont pu déterminer que HD 98800 a probablement vu le jour dans l’association Scorpius-Centaurus, avant de dériver vers sa position actuelle, renforçant l’idée d’une origine commune avec l’association TW Hydrae. Ce « foyer cosmique » est donc un véritable laboratoire pour comprendre non seulement comment les disques protoplanétaires évoluent sous l’effet de plusieurs étoiles, mais aussi quelles formes prendront les planètes qui naîtront de ces conditions si particulières.

Selon la source : earth.com

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