La schizophrénie, une maladie aux racines fœtales : Quand la génétique des premiers jours dicte l’âge adulte
Auteur: Mathieu Gagnon
Une étude monumentale menée par des chercheurs de l’Icahn School of Medicine à Mount Sinai et d’autres institutions américaines pourrait bien avoir trouvé la clé de cette énigme. Leur travail, publié dans Nature Neuroscience, s’est concentré sur des parties de notre ADN que nous avions tendance à ignorer, les fameuses « régions non codantes ».
L'énigme des interrupteurs génétiques et de l'accessibilité de la chromatine
Ces interrupteurs régulent si un gène doit être allumé ou éteint, sans pour autant changer la séquence génétique elle-même. C’est ce que l’on appelle l’épigénétique. L’un des leviers les plus cruciaux de ce contrôle est l’accessibilité de la chromatine. En termes simples, la chromatine est la manière dont l’ADN est emballé. Si l’emballage est lâche, le gène est accessible et peut être activé. S’il est serré, il est inaccessible, donc éteint. C’est vraiment un point essentiel, non ?
Une cartographie cellulaire inédite : 1 300 cerveaux analysés
Ils se sont concentrés sur le cortex préfrontal, cette zone du cerveau qui gère nos fonctions cognitives supérieures : le jugement, la prise de décision, tout ce qui nous rend, disons, très humains. Ensuite, utilisant une technique appelée ATAC-seq, ils ont méticuleusement séparé les noyaux des neurones de ceux des autres cellules. Pourquoi ? Pour voir distinctement ce qui se passe dans chaque type de cellule. L’ATAC-seq, c’est un outil de pointe qui permet de marquer les régions d’ADN « ouvertes » et potentiellement actives, créant une carte détaillée du paysage génomique.
Le lien surprenant avec le développement fœtal
Et ce qui est fascinant, franchement, c’est que ces zones avec une chromatine plus « ouverte » chez l’adulte ressemblaient étrangement aux schémas de chromatine typiques observés durant le développement du cerveau fœtal. En d’autres termes, des signatures moléculaires qui devraient disparaître après la naissance persistent jusqu’à l’âge adulte, contribuant ainsi au risque de maladie. C’est une espèce d’arrêt du développement à un stade précoce qui laisserait des empreintes indélébiles, n’est-ce pas inquiétant ?
Le rôle du 'chef d'orchestre' génomique
Ce centre de contrôle était particulièrement actif, ou enrichi, dans les neurones glutamatergiques immatures. Ce domaine est apparu comme le consolidateur clé des signatures neurodéveloppementales liées à la schizophrénie. Autrement dit, si l’on arrive à cibler ce chef d’orchestre, peut-être qu’on pourrait rectifier la partition génétique avant qu’elle ne devienne dissonante.
Un espoir pour des thérapies plus précises
C’est une preuve solide. Nos chercheurs l’affirment : « L’architecture moléculaire de la maladie est profondément enracinée dans le développement cérébral précoce, même si les symptômes n’apparaissent que bien plus tard. » L’avenir de la recherche passera maintenant par une analyse encore plus fine, en identifiant les sous-types de neurones précis et les couches corticales spécifiques qui portent ces changements. En créant cette carte détaillée, l’objectif ultime est de découvrir des cibles thérapeutiques exactes pour enfin offrir des traitements plus précis et, espérons-le, plus efficaces contre cette maladie dévastatrice.
Selon la source : medicalxpress.com