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Québec : des données de nos enfants confiées aux Américains, malgré l’appel à la souveraineté
Crédit: lanature.ca / IA

Le grand écart entre les paroles et les actes

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Un choix d’hébergement surprenant

Franchement, il y a de quoi se gratter la tête. On nous parle de « souveraineté numérique » à grands coups de déclarations politiques, mais dans les faits, le gouvernement du Québec vient de prendre une décision qui semble aller à contre-courant de cet engagement. En effet, nous avons appris que le tout nouveau Portail d’inscription aux services de garde, qui remplacera bientôt l’ancien système La Place 0-5, sera hébergé par une immense entreprise américaine : Salesforce.

Cette plateforme, basée sur leur outil infonuagique Force.com, s’apprête à gérer toutes les inscriptions en garderie. Et là, c’est le hic. L’ancienne solution était gérée par une compagnie québécoise, InMédia. Une source travaillant même au ministère de la Famille avoue son incompréhension face à ce virage transfrontalier. Pourquoi, en 2023, confie-t-on les informations les plus sensibles de nos tout-petits à un fournisseur soumis aux lois des États-Unis? C’est la question que se posent les experts, et nous aussi, simple citoyen.

Attention, données sensibles : bien plus qu’un simple nom

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Quand on inscrit un enfant à la garderie, on ne donne pas juste un prénom et un nom. Non, c’est beaucoup, beaucoup plus personnel que ça. Les parents doivent fournir une montagne d’informations. Pensez-y : on parle de la date de naissance, de l’adresse, des coordonnées, bien sûr, mais aussi des détails sur l’allocation familiale reçue. On doit même indiquer les besoins particuliers de l’enfant, si c’est le cas.Et ce n’est pas tout. Le processus exige souvent des documents officiels qui confirment l’identité et le statut : le numéro d’État civil, le certificat de naissance, et parfois même des papiers d’immigration ou d’adoption. Bref, c’est l’identité complète de nos familles et, surtout, celle de nos enfants, qui est numérisée et hébergée sur une plateforme qui n’est pas sous notre plein contrôle. 

Le fantôme du Cloud Act : une menace bien réelle

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Le véritable danger ici porte un nom : le Cloud Act. C’est une loi américaine, mise en place sous le président Donald Trump en 2018. Qu’est-ce que ça veut dire, concrètement ? Très simple, malheureusement : cette loi permet aux autorités américaines d’obtenir un mandat pour exiger d’un fournisseur de services comme Salesforce de leur remettre les données qu’il héberge. Peu importe où ces données sont stockées dans le monde. Oui, même si les serveurs sont physiquement situés au Canada, comme l’affirme le Ministère. C’est la juridiction de l’entreprise qui compte, pas l’emplacement du serveur.Même si Ottawa et Washington discutent depuis 2022 d’un potentiel accord bilatéral pour encadrer cela, aucune entente n’est encore signée. Et la vaste majorité de nos données québécoises et canadiennes est déjà entre les mains d’entreprises américaines. C’est la dure réalité du web. 

La souveraineté numérique de Legault : un réveil sur le tard

Lea-KimCC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons
Le paradoxe est frappant. Le 10 novembre dernier, le premier ministre François Legault, lors de la présentation de sa vision économique, a déclaré vouloir faire plus affaire avec des entreprises québécoises. Le but? Renforcer la souveraineté numérique du Québec et garantir un meilleur contrôle sur nos données dans « les fameux nuages ».Sauf que la décision d’utiliser Salesforce pour le portail des garderies, elle, est antérieure à cette annonce. Un certain décalage qui fait dire à une source gouvernementale, ayant requis la confidentialité, que « Le réveil est sur le tard. » La ministre de l’Économie, Christine Fréchette, a d’ailleurs honnêtement admis que le gouvernement avait récemment eu un « wake-up call » (un coup de semonce, en français) concernant le Cloud Act. Elle a précisé que l’objectif est de « vouloir reposer moins sur les compagnies américaines dans le contexte actuel ». 

La défense du ministère : des données hébergées au canada

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Face aux questions de Radio-Canada, le ministère de la Famille se défend. Le porte-parole, Pascal Doyon, insiste : l’ensemble des données sont bel et bien hébergées au Canada et tout est conforme aux règles de protection des renseignements personnels.Le Ministère explique avoir fait l’acquisition en 2023 du CRM (un outil de gestion des relations clients) de Salesforce pour construire ce portail. Et, point crucial, cette solution serait « qualifiée au Catalogue d’offres infonuagiques » du ministère de la Cybersécurité et du Numérique. Le processus de qualification serait « rigoureux », basés sur des analyses de conformité administratives, technologiques et juridiques. En d’autres termes : ils ont suivi la procédure, non? 

Le verdict des juristes : vulnérabilité persistante

Malheureusement, avoir les données sur le territoire canadien ne suffit pas à rassurer les experts en droit. C’est la conclusion de juristes et de spécialistes que Radio-Canada a consultés. Le professeur émérite à la Faculté de droit de l’Université de Montréal, Pierre Trudel, est catégorique : « On ne peut pas prétendre que ces données-là sont protégées. »Selon lui, même si les données sont au Québec, si l’entreprise qui les gère est soumise aux lois américaines, les tribunaux là-bas peuvent les réclamer. Avec tout ce qui se passe aux États-Unis, on ne peut pas exclure des procédures contre des Canadiens, nous dit-il. Le Ministère de la Cybersécurité le reconnaît à moitié, admettant qu’il serait possible pour les autorités américaines d’obtenir les données en cas de « mandat ou une ordonnance judiciaire valide ». 

Le dilemme économique : le coût de la souveraineté

Alors, si les risques sont connus, pourquoi ne pas se tourner vers des solutions purement québécoises? Des entreprises locales existent, comme DATAenligne, qui offrent des services infonuagiques et qui installent leurs serveurs dans la province. Mais le cofondateur et président de DATAenligne, Étienne F. Carrier, pointe du doigt le véritable problème : le prix.Les entreprises québécoises sont de « plus petits joueurs que les géants du web », explique-t-il, ce qui rend difficile de proposer des offres aussi bon marché. Ces géants américains, par leur taille, peuvent se permettre de « quasiment donner leurs produits » pour ensuite rendre les clients dépendants. M. Carrier le formule bien : il vaut mieux un « petit chez-soi qu’un grand chez les autres », mais cette sécurité, cette souveraineté, a un coût. Un coût que le gouvernement doit visiblement accepter de payer s’il veut vraiment protéger nos informations. 

Faire de la place aux choix locaux

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Ce dossier du Portail d’inscription aux services de garde soulève une question essentielle : Quelle est la véritable valeur que le Québec accorde à la protection de ses données les plus sensibles? Si le gouvernement Legault affirme vouloir miser sur la souveraineté numérique, ses actions dans un domaine aussi crucial que les informations de nos enfants semblent fragiliser ce discours.Le risque du Cloud Act est réel, selon les experts, même si le Ministère assure que les données sont physiquement au Canada. Il est clair que le gouvernement a pris conscience du problème, mais les mesures doivent suivre, et vite. Si nous voulons encourager les entreprises québécoises à compétitionner avec les géants du web et garantir notre indépendance numérique, il faudra accepter que la sécurité et la souveraineté ont un prix, et qu’il est peut-être temps de payer plus cher pour s’assurer que les informations de nos tout-petits échappent complètement aux lois étrangères

Selon la source : ici.radio-canada.ca

Cet article a été rédigé avec l’aide de l’IA, puis révisé par un humain pour en garantir la précision et la clarté

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