Aller au contenu
Des abeilles pour protéger les fermiers des éléphants ? L’étonnante situation au Botswana
Crédit: lanature.ca (image IA)

Vivre avec les géants de la savane

credit : lanature.ca (image IA)
Imaginez un instant vous réveiller au petit matin, non pas par le chant du coq, mais par le bruit sourd d’une présence massive juste à côté de votre maison. C’est le quotidien de nombreuses familles dans le nord du Botswana, une région qui abrite la plus grande population d’éléphants au monde, avec environ 130 000 de ces magnifiques créatures. Ici, partager son espace avec ces géants n’est pas une anecdote de safari, mais une réalité de tous les jours. Les fermiers cultivent leurs terres le long des mêmes routes que ces animaux empruntent depuis des générations pour rejoindre les rivières et les points d’eau. Le problème, c’est qu’une seule visite nocturne d’un troupeau affamé peut anéantir des mois de travail acharné en quelques minutes seulement. Pour ces familles, les récoltes ne sont pas un simple complément de revenu ; elles représentent bien souvent l’unique source de nourriture et de revenus pour toute une année. Une visite d’éléphants au mauvais moment, et c’est la sécurité alimentaire de toute une famille qui est menacée jusqu’à la prochaine saison des pluies.

Face à ce défi de taille, des chercheurs comme le Dr Tempe Adams, de l’université de Nouvelle-Galles du Sud, consacrent leur vie à trouver des solutions. Installée au Botswana, elle connaît bien cette réalité. « Pour les fermiers ici, il n’est pas rare de se réveiller et de trouver un éléphant dans sa cour », explique-t-elle. Son travail n’est pas seulement académique, il est profondément humain : aider les gens à cohabiter, sans conflit, avec ces animaux incroyables. C’est un véritable paradoxe. D’un côté, nous célébrons le succès des efforts de conservation qui ont permis aux populations d’éléphants de croître. C’est une excellente nouvelle pour la biodiversité. Mais de l’autre, cette croissance met une pression immense sur les communautés locales qui vivent aux premières loges. Le Dr Adams ne cherche pas des solutions agressives, mais plutôt des moyens intelligents et respectueux pour éloigner les éléphants des cultures sans leur faire de mal. Son approche consiste à développer et tester des méthodes de dissuasion qui pourraient enfin apporter un peu de sérénité aux agriculteurs, sans pour autant nuire à ces magnifiques pachydermes.

L’idée des abeilles, une solution miracle ?

credit : lanature.ca (image IA)
Ailleurs en Afrique, une idée aussi simple que géniale a fait ses preuves : les abeilles. Oui, vous avez bien lu. Des chercheurs au Kenya, au Mozambique ou encore en Tanzanie ont découvert que les éléphants ont une peur bleue de ces petits insectes bourdonnants. Ils ont donc eu l’idée de construire des « clôtures de ruches ». Le principe est simple : on suspend des ruches d’abeilles africaines, bien vivantes, à des fils tendus entre des poteaux tout autour des champs. Quand un éléphant tente de passer, il secoue le fil, dérange les abeilles, et une nuée furieuse sort pour le piquer. Il semble que les éléphants, malgré leur peau épaisse, soient très sensibles aux piqûres, surtout autour des yeux et à l’intérieur de la trompe. L’expérience est si désagréable qu’ils s’en souviennent et apprennent à éviter ces zones protégées par les abeilles. C’est une solution gagnant-gagnant : les cultures sont protégées, les abeilles produisent du miel que les fermiers peuvent vendre, et personne n’est blessé, ni l’homme, ni l’éléphant. On utilise la nature pour résoudre un problème créé par la cohabitation entre l’homme et la nature.

Cependant, le Dr Adams savait qu’on ne pouvait pas simplement importer cette solution au Botswana sans la vérifier. Chaque écosystème est unique, et ce qui fonctionne dans les plaines humides du Kenya pourrait très bien échouer dans le climat aride du Botswana. « Nous sommes dans une région très sèche, avec le sol sableux du Kalahari. Chaque territoire d’éléphants a des facteurs environnementaux différents », souligne-t-elle. Plutôt que de se lancer dans la construction coûteuse de kilomètres de clôtures de ruches, elle a décidé de procéder avec prudence et intelligence. Son équipe a mis en place un test bien plus simple et moins cher : diffuser des enregistrements de bourdonnements d’abeilles à des éléphants sauvages et observer attentivement leurs réactions. C’était une manière de tester le concept fondamental : les éléphants du Botswana ont-ils, oui ou non, peur des abeilles ? Cette démarche scientifique rigoureuse était absolument essentielle avant d’investir du temps et de l’argent dans une solution qui n’était peut-être pas adaptée à la réalité locale. C’est ça, la vraie science : douter, vérifier, et s’adapter.

Des résultats surprenants et mitigés

credit : lanature.ca (image IA)
L’expérience menée par le Dr Adams et son équipe était fascinante. Ils se sont rendus dans le parc national de Chobe pendant la saison sèche, un moment où les éléphants se rassemblent près des points d’eau. Ils cherchaient des animaux au repos, idéalement en train de dormir, pour que leur réaction au son soit la plus pure possible, non influencée par d’autres facteurs. Imaginez la scène : des scientifiques, cachés, qui diffusent soudainement un intense bourdonnement d’abeilles en direction d’un géant endormi. Les résultats ont été… mitigés. Certains éléphants se sont redressés d’un coup et ont détalé sans demander leur reste, clairement paniqués par le bruit. D’autres, en revanche, n’ont eu aucune réaction, ou presque. Ils sont restés tranquillement là où ils étaient, semblant complètement indifférents. Pour s’assurer que les éléphants ne réagissaient pas simplement à un bruit étranger, l’équipe a aussi diffusé un son neutre, une sorte de « bruit blanc », comme celui d’une radio mal réglée. C’est ce qu’on appelle un groupe de contrôle en science, et c’est crucial pour pouvoir comparer les résultats et tirer des conclusions fiables sur le comportement spécifique lié aux abeilles.

En analysant les données, les chercheurs ont constaté que tout de même 53,3 % des groupes familiaux d’éléphants ont eu une réaction moyenne ou forte aux enregistrements d’abeilles, contre seulement 26,6 % pour le bruit de contrôle. Quatre familles ont même fui à plus de vingt mètres, alors qu’une seule l’a fait pendant la diffusion du son neutre. « C’est en soi un résultat incroyable », affirme le Dr Adams. Ce qui est particulièrement intéressant, c’est justement cette absence d’uniformité. Cela montre que la peur des abeilles n’est pas innée chez tous les éléphants du Botswana. Certains l’ont apprise, probablement après une mauvaise rencontre, et s’en souviennent très bien. D’autres, n’ayant jamais été piqués, ne voient aucune raison de s’inquiéter. Le Dr Adams insiste sur l’importance de publier ces résultats nuancés. En science, on a trop souvent tendance à ne montrer que ce qui « marche » parfaitement. Mais comprendre pourquoi une méthode ne fonctionne pas partout est tout aussi crucial, surtout quand on a affaire à des animaux aussi intelligents et dotés d’une personnalité propre que les éléphants. Ces résultats mitigés sont une porte ouverte vers une compréhension plus profonde du problème.

Un nouveau défi pour l’avenir

credit : lanature.ca (image IA)
Alors, quelle est la prochaine étape ? Face à ces découvertes, le Dr Adams et son équipe ont compris que le problème était peut-être plus complexe qu’il n’y paraissait. Plutôt que de se concentrer uniquement sur le comportement des éléphants, leur attention se tourne désormais vers les abeilles elles-mêmes. L’enquête a changé de suspect, si l’on peut dire. La nouvelle mission est de comprendre ce qui se passe avec les populations d’abeilles dans le nord du Botswana. Sont-elles en déclin ? Si oui, pourquoi ? Est-ce lié au changement climatique, à une maladie, à un manque de fleurs ? « Comprendre le statut de nos abeilles pourrait avoir plus d’impact que de faire d’autres études sur le comportement des éléphants », admet le Dr Adams. C’est une approche fascinante. La solution au conflit homme-éléphant pourrait bien résider dans la restauration des populations de pollinisateurs. Si l’on parvenait à augmenter le nombre d’abeilles, cela aurait un double, voire un triple bénéfice : plus de pollinisation pour l’agriculture locale, une source de revenus supplémentaire avec le miel, et peut-être, à terme, un moyen de dissuasion naturel et efficace contre les éléphants dans certaines zones.

Cette histoire est une belle leçon d’humilité et de persévérance. Elle nous rappelle que dans la nature, tout est lié. Un problème aussi imposant que la cohabitation avec 130 000 éléphants pourrait trouver sa solution dans le sort d’un insecte minuscule. Le travail mené par des gens comme le Dr Tempe Adams, soutenue par des organisations comme Elephants Without Borders et en collaboration avec des pionniers comme le Dr Lucy King, est absolument essentiel. Il ne s’agit pas de trouver une solution magique et universelle, mais de tisser patiemment des solutions locales, adaptées à la réalité du terrain et respectueuses de tous les êtres vivants. Le chemin est encore long, et les questions sont nombreuses. Mais cet effort pour comprendre et agir avec intelligence et compassion offre une véritable lueur d’espoir. Il nous montre qu’un avenir où les humains et la faune sauvage peuvent non seulement coexister, mais s’entraider, est peut-être possible après tout. Et c’est une perspective qui mérite tous nos encouragements.

Selon la source : earth.com

Ce contenu a été créé avec l’aide de l’IA.

facebook icon twitter icon linkedin icon
Copié!
Plus de contenu