Un espoir caché au cœur de nos cellules

C’est parfois là où on s’y attend le moins que la nature cache ses meilleures armes. Le 12 décembre 2025, Jan Berndorff a rapporté une découverte fascinante issue de l’Institut Paul Scherrer (PSI) : une molécule que notre corps produit naturellement, la spermine, pourrait bien changer la donne dans la lutte contre Alzheimer et Parkinson. Ce n’est pas de la science-fiction, mais bien le résultat d’une mécanique cellulaire précise où cette molécule aide à neutraliser les amas de protéines toxiques.
Pour faire simple — et c’est une image que les chercheurs utilisent eux-mêmes —, la spermine agit un peu comme du fromage râpé sur des spaghettis. Elle encourage les brins de protéines nocives à s’agglutiner, ce qui permet ensuite aux cellules de les recycler et de les éliminer plus facilement via un processus appelé autophagie. C’est une piste sérieuse, je dirais même prometteuse, pour l’avenir des traitements neurodégénératifs.
Le défi du vieillissement et des « spaghettis » cérébraux

On vit plus longtemps, c’est un fait, mais cela s’accompagne d’une hausse des risques liés à l’âge. Les maladies comme Alzheimer ou Parkinson surviennent généralement lorsque des protéines amyloïdes mal repliées s’accumulent dans le cerveau. Elles forment alors de longues structures fibreuses, ces fameux « spaghettis » microscopiques dont je parlais plus tôt. Le problème actuel, c’est qu’on manque cruellement de traitements capables d’empêcher ou d’éliminer ces dépôts destructeurs.
Cependant, les expériences menées sur de minuscules vers nématodes ouvrent une fenêtre d’espoir. La spermine y a non seulement prolongé la durée de vie, mais elle a aussi amélioré leur mobilité et la santé de leurs mitochondries — vous savez, ces petites centrales énergétiques de nos cellules. Cela suggère un rôle bien plus large de cette molécule dans la protection du cerveau vieillissant.
Les travaux de Jinghui Luo au PSI

C’est au Centre des sciences de la vie du PSI que ces recherches ont été menées, sous la direction de Jinghui Luo. Ce chercheur se consacre à l’étude de ces accumulations de protéines amyloïdes qui endommagent nos nerfs. Son équipe a observé que la spermine ne se contente pas de « booster » les vers ; elle aide carrément le système immunitaire à nettoyer les amas protéiques nocifs qui pourraient blesser les cellules nerveuses.
Luo et son équipe voient dans ces résultats une base solide. Ce n’est pas encore un médicament en pharmacie, bien sûr, mais cela pose les fondations de futures stratégies thérapeutiques. L’idée serait d’exploiter ou d’améliorer ce système de défense que nous possédons déjà, ce qui est souvent plus malin que d’essayer de tout réinventer chimiquement.
La spermine : Un nom curieux pour une molécule essentielle

Alors, parlons franchement de ce nom… « spermine ». Il ne sort pas de nulle part. Cette petite molécule organique, qui appartient à la famille des polyamines, a été identifiée il y a plus de 150 ans et nommée ainsi car elle est particulièrement abondante dans le liquide séminal. Mais — et c’est là que ça devient intéressant — elle est en réalité présente partout dans le corps, surtout dans les cellules actives qui se divisent.
Elle est cruciale pour le fonctionnement biologique normal. La spermine interagit avec les acides nucléiques de la cellule, aidant à réguler quels gènes s’expriment et comment ils se transforment en protéines. Elle soutient la croissance, la division et même la mort cellulaire programmée. Elle participe aussi à ce qu’on appelle la condensation biomoléculaire, formant des sortes de gouttelettes à l’intérieur de la cellule qui servent de mini-centres de réaction.
Comprendre la mécanique du nettoyage cellulaire

On se doutait déjà que la spermine pouvait protéger les neurones et réduire le déclin de la mémoire, mais on ne comprenait pas vraiment comment. C’est ce mécanisme que l’équipe de Luo a décortiqué en utilisant la microscopie optique et la diffusion SAXS à la Source de Lumière Suisse (SLS) du PSI. Ils ont combiné des études in vitro (dans un capillaire en verre) et in vivo avec le modèle animal C. elegans.
Leurs trouvailles montrent que la spermine pousse les protéines nocives à se rassembler par condensation biomoléculaire. Ce comportement favorise l’autophagie, ce système de recyclage naturel où les protéines abîmées sont enfermées dans des vésicules membranaires puis dégradées par des enzymes. C’est un peu comme si la spermine facilitait la mise en sac poubelle des déchets toxiques.
L’analogie du fromage et des spaghettis

Jinghui Luo explique que l’autophagie gère mieux les gros amas de protéines que les fibres isolées. « La spermine est, pour ainsi dire, l’agent liant qui rassemble les brins », précise-t-il. Il s’agit de forces électriques faiblement attractives qui organisent les molécules sans les coller fermement. C’est subtil, mais efficace.
Il reprend cette image culinaire parlante : « La spermine est comme le fromage qui relie les nouilles longues et fines sans les coller ensemble, ce qui les rend plus faciles à digérer. » C’est une façon brillante de visualiser comment une simple interaction physique à l’échelle nanométrique peut avoir un impact biologique aussi massif.
Vers de nouveaux horizons thérapeutiques

La spermine ne s’arrête pas là ; elle semble aussi jouer un rôle dans d’autres maladies, y compris le cancer. Bien sûr, il faut encore beaucoup de recherches pour clarifier tout ça avant d’envisager des traitements concrets. Comme le dit Luo avec philosophie : « Si nous comprenons mieux les processus sous-jacents, nous pourrons cuisiner des plats plus savoureux et plus digestes, car nous saurons exactement quelles épices, et en quelles quantités, rendent la sauce particulièrement bonne. »
L’intelligence artificielle commence d’ailleurs à guider ces recherches en identifiant rapidement les combinaisons prometteuses de ces « ingrédients » moléculaires. Luo souligne aussi l’importance des méthodes de diffusion résolue en temps et de l’imagerie haute résolution — des capacités rares que le PSI est l’un des seuls à offrir dans le monde — pour observer ces processus en temps réel.
Références et conclusion

Cette étude complète a été publiée le 21 novembre 2025 dans Nature Communications. Elle est signée par une large équipe incluant Xun Sun, Debasis Saha, Xue Wang, Cecilia Mörman, Rebecca Sternke-Hoffmann, Juan Atilio Gerez, Fátima Herranz-Trillo, Roland Riek, Wenwei Zheng et bien sûr Jinghui Luo. C’est un travail collaboratif immense.
Pour ceux qui voudraient aller voir la source originale, l’article s’intitule « Spermine modulation of Alzheimer’s Tau and Parkinson’s α-synuclein: implications for biomolecular condensation and neurodegeneration », avec le DOI 10.1038/s41467-025-65426-3. Une lecture technique, certes, mais qui porte en elle un espoir très humain.
Ce contenu a été créé avec l’aide de l’IA.