Affaire Nooran Rezayi : le ministre Ian Lafrenière s’engage à « faire la lumière » sur le délai d’alerte du BEI
Auteur: Adam David
L’ombre d’un doute et l’engagement du ministre

C’est une zone d’ombre particulièrement épaisse qui entoure la mort tragique du jeune Nooran Rezayi, survenue le 21 septembre dernier après qu’un agent ait tiré sur l’adolescent. Franchement, la question qui reste sur toutes les lèvres, et qui met mal à l’aise, c’est celle-ci : pourquoi le Service de police de l’agglomération de Longueuil (SPAL) a-t-il mis plus d’une heure et demie avant de prévenir le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI)?
Invité samedi à l’émission « Tout peut arriver » sur les ondes d’ICI Première, le ministre de la Sécurité publique, Ian Lafrenière, a tenu à rassurer, promettant qu’une enquête permettrait d’« enlever cette zone d’ombre ». Oui, il l’a dit clairement : « On va la faire, la lumière. »
Cette intervention médiatique fait suite à une demande formelle déposée jeudi par la mairesse de Longueuil, Catherine Fournier. Celle-ci a réclamé ni plus ni moins qu’une enquête administrative sur le SPAL et sur son directeur, Patrick Bélanger, considérant que le processus habituel d’alerte n’avait pas été respecté. C’est quand même préoccupant, n’est-ce pas?
Le cœur de la controverse : un retard lourd de conséquences
L’élément qui cristallise toutes les préoccupations, et qui a poussé la mairesse Fournier à intervenir, c’est bien ce fameux délai. Le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) est censé être alerté dès qu’un drame comme celui-ci se produit, et idéalement, dès le transport de l’adolescent à l’hôpital. Sauf que dans le cas de Nooran Rezayi, cela n’a pas été le cas.
Les faits rapportés par le BEI sont précis et très troublants. L’adolescent a été atteint par balle à 14 h 58 ce jour-là. Pourtant, le BEI affirme n’avoir été informé des événements que bien plus tard, à 16 h 34. C’est un gouffre temporel, une heure et trente-six minutes pendant lesquelles l’enquête indépendante n’a pas pu commencer son travail.
Pire encore, pendant cette période de flottement, des policiers de Longueuil avaient déjà lancé leur propre investigation, menant des actions entre 15 h 26 et 18 h 22. On se demande alors si ces interventions parallèles n’auraient pas tout simplement **entravé l’enquête indépendante**, ce qui est une accusation sérieuse. Le ministre Lafrenière est resté prudent sur la question de la culpabilité, préférant s’en tenir aux faits : « Moi, je ne veux pas le savoir, je veux le prouver. » Il ne veut pas « les condamner » d’avance, mais comprendre « qu’est-ce qui s’est passé, qu’est-ce qui a amené à ça? ».
Quant au moment où cette enquête administrative sera officiellement lancée, M. Lafrenière n’a pas voulu s’avancer. Il doit d’abord se coordonner avec d’autres entités cruciales, notamment le BEI, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP), et même le Service de Police de la Ville de Montréal (SPVM), pour s’assurer qu’ils ne nuisent pas aux autres enquêtes déjà en cours. C’est une démarche complexe, je suppose.
La perte de confiance et le poids de la plainte civile de 2,2 millions de dollars
Il faut se mettre à la place de la famille. Un mois et demi s’était écoulé sans réponse concrète, comme l’a reconnu M. Lafrenière, qui est aussi député de Vachon, la circonscription où cette tragédie s’est produite. La mère de Nooran, Fahima Rezayi, et son père, Sharif Rezay, ont dû faire face à l’horreur. Le ministre, lui-même « père de deux grandes filles », a avoué que c’était « horrible » comme situation parentale, même s’il a rappelé qu’une enquête, oui, « ça prend du temps. »
Devant ce manque de clarté, la famille Rezayi a agi plus tôt cette semaine en déposant une **plainte civile d’un montant de plus de 2,2 millions de dollars** contre la Ville de Longueuil et les policiers impliqués. Les proches y dénoncent, entre autres choses, un usage de la force qu’ils jugent « déraisonnable et disproportionné ».
Ce climat de flou, admet le ministre, est malheureusement susceptible d’alimenter le cynisme envers nos forces de l’ordre et, avouons-le, envers la classe politique. Ce doute est d’autant plus tenace quand on regarde les chiffres du BEI de 2024 : sur les 369 enquêtes lancées en huit ans d’existence, seules deux ont abouti à des accusations contre des policiers. Ce n’est pas beaucoup, c’est vrai. M. Lafrenière a cependant tenu à préciser qu’il ne s’agit pas uniquement d’enquêtes criminelles, mais de tous les événements où une personne est décédée après l’intervention policière, donnant l’exemple d’un suicide par saut de balcon survenu après l’arrivée des agents. Ces cas doivent tout de même faire l’objet d’une enquête indépendante.
- À noter : la présence d’une arme à feu avait été mentionnée à au moins **quatre reprises** lors des appels au 911 avant l’intervention fatale.
L’expérience de l’ancien porte-parole du SPVM au service de la critique
Une question légitime, soulevée par l’animatrice Marie-Louise Arsenault, portait sur la capacité du ministre à garder une distance critique suffisante, étant donné son passé professionnel. Rappelons en effet que le député de Vachon a été porte-parole du Service de Police de la Ville de Montréal (SPVM) pendant une **vingtaine d’années**. Comment être juge et partie, même indirectement?
Le ministre a fait sa propre défense : « Quand on aime quelque chose, on est capable de critiquer. Si je ne connaissais pas la police, j’aurais de la misère à la critiquer, mais j’aime assez la police pour être critique là-dedans », a-t-il affirmé. C’est un argument intéressant, celui de la critique interne, fondée sur l’expérience.
Dans l’attente des conclusions de l’enquête administrative demandée, et alors que le BEI a exhorté les citoyens à ne pas mener leur propre enquête parallèle, l’objectif reste le même : établir ce qui s’est réellement passé. Pour les parents, qui disaient de leur fils de 15 ans qu’il était « encore un bébé », cette attente est insoutenable. Espérons que la lumière promise par Ian Lafrenière sera faite rapidement et apportera enfin des réponses claires à Longueuil.
Ce contenu a été créé avec l’aide de l’IA.