2 infimes ajustements moléculaires pourraient révolutionner l’agriculture mondiale
Auteur: Mathieu Gagnon
Un pas vers une production plus verte

« Nous sommes un peu plus près d’une production alimentaire plus verte et plus respectueuse du climat. » C’est par cette affirmation, pleine d’espoir je trouve, que s’ouvre ce dossier fascinant. Cette conclusion nous vient directement de Kasper Røjkjær Andersen et Simona Radutoiu, tous deux professeurs de biologie moléculaire à l’Université d’Aarhus.
Dans un article daté du 14 décembre 2025, leur recherche met en lumière une piste sérieuse qui pourrait bien changer la donne. De quoi s’agit-il exactement ? Eh bien, ils ont découvert un indice crucial qui pourrait aider à réduire notre dépendance mondiale, souvent excessive, aux engrais synthétiques.
C’est une nouvelle qui arrive à point nommé, ne trouvez-vous pas ? Surtout quand on considère les défis environnementaux actuels.
L’autosuffisance des plantes : le rêve de l’azote

Pour grandir, les plantes ont besoin d’azote, c’est un fait. La plupart des cultures, celles que nous voyons dans nos champs, l’obtiennent principalement via les engrais. Mais la nature est bien faite, car il existe un petit groupe de plantes — pensez aux pois, au trèfle ou aux haricots — qui arrivent à pousser sans aucun ajout d’azote.
Comment font-elles ? C’est assez ingénieux : elles hébergent des bactéries qui vivent en partenariat avec leurs racines. Ces bactéries transforment l’azote de l’air en une forme que la plante peut utiliser. C’est ce qu’on appelle la symbiose. Aujourd’hui, des chercheurs du monde entier tentent de comprendre les processus moléculaires et génétiques derrière cette capacité naturelle, avec l’espoir un peu fou de l’introduire dans les grandes cultures vivrières comme le blé, l’orge et le maïs.
Si ce trait pouvait être transféré avec succès, ces cultures deviendraient alors autosuffisantes en azote. Imaginez l’impact : cela réduirait la demande en engrais artificiels. Il faut savoir que la production de ces engrais consomme actuellement environ deux pour cent de l’énergie totale mondiale et produit des émissions de CO2 significatives. L’orge, par exemple, est l’une des cultures qui semble réagir positivement à une modification génétique lui permettant de fixer l’azote de l’air grâce à cette symbiose bactérienne.
Un interrupteur moléculaire et deux acides aminés

Les scientifiques de l’Université d’Aarhus ont mis le doigt sur quelque chose de précis. Ils ont identifié de petits changements, mais critiques, dans les récepteurs des plantes. Ces récepteurs influencent si le système immunitaire est désactivé assez longtemps pour permettre aux bactéries fixatrices d’azote de former un partenariat avec la plante. En gros, les plantes utilisent des récepteurs à la surface de leurs cellules pour détecter les signaux chimiques des micro-organismes du sol.
Certaines bactéries libèrent des composés qui disent à la plante qu’elles sont des « ennemies », déclenchant une réponse défensive. D’autres signalent qu’elles sont des « amies » capables de fournir des nutriments. Les légumineuses comme les pois et les haricots accueillent ces bactéries utiles. À l’intérieur des tissus racinaires, les bactéries convertissent l’azote de l’air et le partagent. C’est cette fameuse symbiose qui explique pourquoi elles poussent sans engrais.
Les chercheurs ont découvert que cette capacité est fortement influencée par deux acides aminés. Ce sont de petits « blocs de construction » dans une protéine située dans les racines de la plante. « C’est une découverte remarquable et importante », déclare Simona Radutoiu. La protéine racinaire agit comme un « récepteur » qui lit les signaux des bactéries et décide s’il faut activer le système immunitaire (l’alarme) ou permettre la symbiose.
L’équipe a identifié une petite région dans la protéine réceptrice appelée Symbiosis Determinant 1. Cette région fonctionne comme un interrupteur qui contrôle quel message est envoyé à l’intérieur de la cellule végétale. En modifiant seulement deux acides aminés dans cet interrupteur, les chercheurs ont pu changer un récepteur qui déclenche normalement l’immunité pour qu’il initie à la place une symbiose avec les bactéries fixatrices d’azote. Radutoiu explique : « Nous avons montré que deux petits changements peuvent amener les plantes à modifier leur comportement sur un point crucial – passant du rejet des bactéries à la coopération avec elles. »
Conclusion : Vers des champs de céréales autonomes

Lors d’expériences en laboratoire, les chercheurs ont modifié avec succès la plante Lotus japonicus. Ils ont ensuite, et c’est là que ça devient concret, appliqué la même approche à l’orge et observé le même effet. « Il est assez remarquable que nous soyons maintenant capables de prendre un récepteur de l’orge, d’y apporter de petits changements, et que la fixation de l’azote fonctionne à nouveau », s’enthousiasme Kasper Røjkjær Andersen.
L’impact potentiel est substantiel, je dirais même énorme. Si cette modification peut être introduite dans les céréales largement cultivées, il pourrait un jour être possible de cultiver du blé, du maïs ou du riz capables de fixer eux-mêmes l’azote, tout comme les légumineuses. Cependant, restons prudents, comme le souligne Simona Radutoiu : « Mais nous devons d’abord trouver les autres clés essentielles. » Elle ajoute : « Seules très peu de cultures peuvent réaliser la symbiose aujourd’hui. Si nous pouvons étendre cela aux cultures largement utilisées, cela peut vraiment faire une grande différence sur la quantité d’azote à utiliser. »
Pour les plus curieux d’entre vous qui voudraient consulter l’étude complète publiée le 5 novembre 2025 dans Nature, voici les détails. L’article s’intitule « Two residues reprogram immunity receptors for nitrogen-fixing symbiosis ». Il a été rédigé par une longue liste de chercheurs dévoués : Magdalini Tsitsikli, Bine Simonsen, Thi-Bich Luu, Maria M. Larsen, Camilla G. Andersen, Kira Gysel, Damiano Lironi, Christina Krönauer, Henriette Rübsam, Simon B. Hansen, René Bærentsen, Jesper Lundsgaard Wulff, Sarah Holt Johansen, Gülendam Sezer, Jens Stougaard, Kasper Røjkjær Andersen et Simona Radutoiu (DOI: 10.1038/s41586-025-09696-3).
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