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Mark Carney à Radio-Canada: « Je ne peux pas dire que je serai premier ministre pour une décennie »
Crédit: Shutterstock

Ne pas chercher la majorité, mais gérer la crise

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Mark Carney, qui cumule déjà une carrière impressionnante en tant qu’ancien gouverneur des Banques du Canada et du Royaume-Uni, a fait le bilan de ses neuf premiers mois en politique lors d’une entrevue de fin d’année, mardi, avec le chef d’antenne Patrice Roy. Une des questions qui brûlait les lèvres était la durée envisagée pour son mandat, et disons-le, sa réponse était loin d’être celle d’un homme politique sûr de régner longtemps.

« Ah, je ne sais pas. Honnêtement, je ne sais pas », a-t-il lâché, visiblement en pleine réflexion. Il a ajouté qu’être premier ministre est un immense privilège et une grande responsabilité, mais il a immédiatement tempéré les attentes : « Je ne peux pas dire que je serai premier ministre pour une décennie. » Selon lui, l’urgence est d’agir pour résoudre la crise actuelle, qu’il attribue aux Américains, plutôt que de se lancer dans des « chicanes » pour obtenir une majorité ou un autre mandat.

D’ailleurs, il a catégoriquement rejeté l’idée de déclencher des élections générales au printemps prochain, malgré le fait qu’il dirige un gouvernement minoritaire. Il est d’avis que « Les Canadiennes et les Canadiens ne veulent pas [de nouvelles] élections. » Carney insiste : « Mon objectif, c’est de faire de bonnes choses pour les Canadiens. » Jusqu’à présent, il a tout de même réussi à faire adopter quatre projets de loi, notamment celui sur la sécurité frontalière (C-12). De plus, son tout premier budget, présenté début novembre, a franchi avec succès le vote de confiance aux Communes, écartant ainsi le risque de chuter et d’organiser un scrutin imprévu en plein hiver. C’est déjà ça de pris, non ?

La course à la majorité et les défections des conservateurs

Le paysage parlementaire s’est récemment éclairci pour les Libéraux, même si la majorité leur échappe encore de peu. Grâce à la défection surprise de deux députés conservateurs, Chris d’Entremont et Michael Ma, les Libéraux comptent désormais 171 députés. Il ne leur manque donc qu’un seul siège pour atteindre la majorité.

Cette situation n’a pas manqué de provoquer des frictions, car les conservateurs accusent ouvertement Mark Carney de tenter d’obtenir une majorité par des moyens peu démocratiques. Ce à quoi Carney a rétorqué, un peu agacé, qu’il ne s’agissait pas d’une tentative de recrutement de sa part. Les deux députés, qui ont d’ailleurs reproché au chef de l’opposition officielle, Pierre Poilievre, son style de leadership, « ont pris leur décision. Ils [nous] ont approchés, nous », a-t-il expliqué. L’objectif, d’après le premier ministre, n’est pas la manœuvre politique, mais le bon fonctionnement du système. Il a affirmé : « Je veux que le Parlement fonctionne. Ça, c’est la job, de trouver une manière pour le Parlement de fonctionner, et nous l’avons fait pendant les derniers mois. »

ACEUM, Trump et la défense de la gestion de l’offre

credit : lanature.ca (image IA)

Les enjeux commerciaux avec nos voisins du Sud, particulièrement les États-Unis, occupent une place centrale dans les préoccupations de M. Carney. Il a révélé qu’un accord avec le président Donald Trump était « presque un deal » avant que les négociations ne soient interrompues il y a deux mois. La cause de cette suspension? La diffusion d’une publicité anti-tarifs par le gouvernement ontarien. C’est le genre de petit grain de sable inattendu qui vient tout gâcher, n’est-ce pas ?

Selon Carney, une reprise des discussions reste possible, mais il est clair pour lui, comme pour le Mexique et les États-Unis, que l’ACEUM, l’accord de libre-échange trilatéral, doit être réexaminé. Cette revue a d’ailleurs officiellement débuté le 5 décembre dernier, en marge du tirage au sort de la FIFA pour la Coupe du monde de 2026, lors d’un sommet impromptu à Washington réunissant Carney, Trump et Claudia Sheinbaum. L’administration Trump, on le sait, menace depuis un moment de démanteler l’ACEUM pour le remplacer par des accords bilatéraux séparés, mais Carney assure que si l’accord va changer, il n’est pas « nécessairement en danger. »

Un autre défi est celui de la succession de l’ambassadrice du Canada aux États-Unis, Kirsten Hillman, qui doit quitter ses fonctions en 2026. Le nom de l’homme d’affaires Mark Wiseman, cofondateur de l’Initiative du siècle, circule pour lui succéder. Or, le Bloc québécois s’oppose fermement à cette nomination, car M. Wiseman a déjà critiqué le système de gestion de l’offre, le considérant comme un « obstacle à la productivité ».

Carney s’est montré inflexible sur ce point : la gestion de l’offre (le contrôle de la production et de la demande pour les produits laitiers, les œufs, le poulet et la dinde, qui vise à prévenir les pénuries et les excédents) sera défendue. « Moi, j’aime la gestion de l’offre », a-t-il martelé, précisant que même si le prochain ambassadeur serait un membre de l’équipe de négociation, c’est lui, Mark Carney, qui en serait le chef, face au « chef de l’équipe américaine » qui est « absolument clair que c’est le président Trump. » Pour protéger cette politique agricole chère à beaucoup, il a rappelé que la Chambre des communes avait déjà adopté en juin une motion du Bloc québécois visant à restituer le projet de loi C-202, garantissant ainsi la protection intégrale de la gestion de l’offre dans toutes les négociations commerciales.

La politique climatique et le choc avec Steven Guilbeault

Enfin, le premier ministre a été interpellé sur sa politique climatique, surtout après l’entente controversée conclue avec sa contrepartie albertaine, Danielle Smith, qui autorise la construction d’un nouvel oléoduc dans l’ouest canadien. On se souvient bien que cet accord a provoqué un véritable tremblement de terre politique, menant à la démission spectaculaire de l’ancien ministre de l’Environnement, Steven Guilbeault.

Ce dernier a accusé M. Carney de démanteler des politiques environnementales cruciales qui étaient, selon lui, indispensables pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) fixés pour 2035. Carney, cependant, ne partage pas du tout ce point de vue. Il a tenu à souligner que l’accord avec l’Alberta intègre le financement du projet Pathways, qui représente le plus grand projet au monde de captage, d’utilisation et de stockage du carbone.

Quel est l’objectif derrière tout ça ? Faire en sorte que le baril de pétrole de l’Alberta devienne l’un des plus faibles en intensité carbone au monde. Il faut dire que selon M. Carney, certaines lois environnementales héritées du gouvernement précédent de Justin Trudeau, comme le plafonnement des émissions de GES dans les secteurs pétrolier et gazier, finissaient par freiner les investissements et créaient des tensions inutiles avec l’Alberta.

Carney a insisté sur son engagement environnemental personnel : « J’ai dédié la plupart de ma carrière [aux] enjeux environnementaux. » Il soutient une approche de « fédéralisme coopératif », rappelant que même le Québec va continuer d’utiliser du pétrole dans la transition énergétique. La vraie question, conclut-il, n’est pas d’arrêter d’utiliser du pétrole, mais d’utiliser « Le pétrole du Canada », en visant à ce qu’il ait « les plus [basses émissions de] GES dans la production et la transportation. » Pour lui, il est crucial d’avoir « le gouvernement de l’Alberta avec nous. »

Selon la source : ici.radio-canada.ca

Ce contenu a été créé avec l’aide de l’IA.

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