Une danseuse devenue cheffe des armées

C’est une trajectoire pour le moins inattendue, vous ne trouvez pas ? Imaginez une jeune fille au Québec, rêvant de scènes illuminées et de ballets gracieux. Et pourtant, cette même Jennie Carignan, aujourd’hui âgée de 57 ans, a troqué les chaussons de danse pour les bottes de combat. Nommée en juillet 2024, elle est devenue la toute première femme à occuper le poste de chef d’état-major de la défense, le grade le plus élevé des Forces armées canadiennes (FAC). Une sacrée ascension.
Ingénieure de formation, elle traîne ses guêtres dans l’institution depuis plus de 35 ans. Elle a vu du pays, comme on dit : l’Afghanistan, la Bosnie, l’Irak, la Syrie… Ce n’est pas rien. En 2013, elle avait déjà brisé un plafond de verre en devenant la première femme commandant du Collège militaire royal de Saint-Jean. Côté vie privée — parce qu’il y a toujours un humain derrière l’uniforme —, elle est mariée et mère de quatre enfants, dont deux ont suivi ses traces dans les FAC. La danse ? C’est devenu un simple passe-temps, histoire de décompresser, j’imagine.
Début décembre, le National Post l’a rencontrée au Forum sur la sécurité internationale d’Halifax. L’ambiance était sérieuse, les questions pointues. Pour l’interroger, ils ne sont pas allés de main morte : ils ont compilé les interrogations d’experts comme le lieutenant-général à la retraite Michel Maisonneuve, l’ancien conseiller au renseignement Vincent Rigby, le professeur Paul Mitchell et l’analyste David Perry. Bref, du lourd pour savoir si le Canada est vraiment prêt.
Un monde dangereux et une défense à reconstruire

La question qui brûle les lèvres, c’est évidemment : sommes-nous prêts si ça dérape ? La Générale Carignan assure que oui, « nous sommes toujours prêts », mais… il y a un « mais ». Elle explique, avec beaucoup de pragmatisme, que le contexte a radicalement changé. Après la Guerre froide, on demandait à nos soldats de faire de la contre-insurrection, comme en Afghanistan. À l’époque, on avait la suprématie aérienne, donc personne ne s’inquiétait des missiles ennemis. Résultat ? En l’an 2000, le Canada s’est débarrassé de ses systèmes de défense aérienne. On n’en avait plus besoin, pensait-on.
Sauf qu’aujourd’hui, l’air est contesté. La technologie a fait des bonds de géant en 20 ou 25 ans, et il faut tout reconstruire. Carignan parle de systèmes « en couches » (le fameux GBAD, défense aérienne au sol) qu’il faut absolument acquérir. C’est un retour vers des conflits entre pairs, et ça ne se fait pas en claquant des doigts. Et puis, il y a l’Ukraine. Jennie Carignan a qualifié la proposition de la Maison-Blanche de novembre — pour mettre fin à la guerre — de point de départ. Mais après ? Il faudra reconstruire les forces ukrainiennes. Le Canada, qui travaille avec la « coalition des volontaires », est prêt à fournir jusqu’à 600 membres pour maintenir la paix si nécessaire.
Cela dit, pas question de déshabiller Pierre pour habiller Paul. La mission en Lettonie, l’Opération Réassurance, reste notre plus gros déploiement à l’étranger avec environ 2 400 soldats. La Générale a été très claire là-dessus : on ne touchera pas à notre posture en Lettonie. C’est un engagement ferme envers l’OTAN.
Le défi humain : Recrutement et culture

Parlons chiffres, même si c’est parfois un peu aride. Actuellement, la force régulière compte 65 677 membres. C’est précis, hein ? Le problème, c’est qu’il en manque 5 823 pour atteindre l’objectif de 71 500 fixé pour mars 2032. Côté réserve, ce n’est guère mieux : avec une moyenne de 24 393 personnes, on est loin des 30 000 espérés. Mais Jennie Carignan reste optimiste. Elle affirme qu’ils ont modernisé et numérisé le recrutement ces trois dernières années.
Et ça semble porter ses fruits, tenez-vous bien : l’an dernier, ils visaient 6 400 recrues et ont fini à 6 600. Pour cette année, la barre est plus haute, à 7 600. Aux dernières nouvelles, ils en étaient déjà à 5 000 (soit 65 % de l’objectif) alors qu’il reste encore quelques mois à l’année fiscale. Plutôt encourageant, non ? Mais recruter, c’est bien ; former, c’est mieux. Il faut des infrastructures, des logements, et moderniser les écoles pour que ces nouvelles recrues soient opérationnelles rapidement. C’est un chantier énorme.
On a aussi évoqué l’idée d’utiliser des fonctionnaires civils pour gonfler les rangs de la réserve, surtout pour la gestion de crises comme les inondations ou les feux de forêt. Carignan trouve l’idée excellente. Par contre, ne lui parlez pas de service obligatoire ! Elle n’est « pas une grande fan ». Elle préfère de loin le volontariat. Et sur la culture militaire ? Elle est catégorique : la conformité est mortelle. Pour elle, la diversité est la clé pour résoudre des problèmes complexes et créer des équipes performantes. Si on ne peut pas se faire confiance, c’est foutu.
Gros sous, radars et géopolitique

Tout ça coûte une fortune, on s’en doute. Le Canada vise désormais des dépenses militaires à hauteur de 3,5 % du PIB. En juin 2024, une injection de 9 milliards de dollars a été annoncée. La priorité ? La préparation opérationnelle : pièces de rechange, carburant, munitions, soins de santé… les bases, quoi. Mais l’avenir se prépare aussi avec des technologies de pointe : frappes de précision à longue portée, drones et lutte anti-drones. Pour les sous-marins, par contre, il faudra patienter ; ils ne sont pas encore budgétisés, mais feront partie des futurs investissements.
Et nos voisins du Sud dans tout ça ? Avec les États-Unis qui parlent parfois de « dôme doré » (Golden Dome) pour protéger leurs infrastructures, le Canada doit suivre. Nous modernisons le NORAD, notamment avec un radar transhorizon pour surveiller l’Arctique. C’est vital. On reste des partenaires, même si la géographie nous lie bon gré mal gré. D’ailleurs, Jennie Carignan souligne que le Canada est aussi présent dans l’Indo-Pacifique, travaillant avec le Japon, la Corée du Sud, les Philippines et l’Indonésie.
Enfin, un petit mot sur le F-35 : est-ce le meilleur avion ? La Générale botte un peu en touche, rappelant que son rôle est de conseiller, mais que la décision finale revient au gouvernement. Prudent. En attendant, elle semble déterminée à ce que l’industrie de défense canadienne se renforce pour soutenir cet effort de guerre potentiel, car comme elle le dit si bien, l’industrie ne peut pas « appuyer sur un interrupteur » du jour au lendemain.
Conclusion : Un chantier de longue haleine
En somme, Jennie Carignan a du pain sur la planche. Entre combler les effectifs, moderniser un équipement parfois désuet et naviguer dans des eaux géopolitiques troubles, la tâche est immense. Ce qui ressort, c’est cette volonté de redonner au Canada sa souveraineté défensive, plutôt que de compter uniquement sur les autres.
Ce n’est pas juste une question de matériel, c’est une question de vision. Reste à voir si les milliards promis se traduiront concrètement sur le terrain dans les années à venir.
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