La comète interstellaire 3I/ATLAS nous livre les ingrédients de la vie dans une abondance surprenante : qu’est-ce que ça veut dire ?
Auteur: Mathieu Gagnon
Un visiteur pas comme les autres

C’est fascinant, quand on y pense. Nous avons repéré notre troisième visiteur interstellaire, la comète baptisée 3I/ATLAS, et figurez-vous qu’elle transporte des molécules essentielles à la vie. Mais alors, qu’est-ce que tout cela signifie vraiment pour nous ? Ce n’est pas un vaisseau alien, soyons clairs d’entrée de jeu (même si l’idée amuse beaucoup de monde), mais ce qu’elle transporte est peut-être encore plus précieux : des ingrédients clés pour la vie, et en quantités bien plus importantes que ce que l’on trouve habituellement sur les comètes de notre propre système solaire.
Si vous n’avez pas suivi toute l’histoire – et je ne vous en voudrais pas, il se passe tellement de choses –, tout a commencé le 1er juillet 2025. Ce jour-là, le système d’alerte Asteroid Terrestrial-impact Last Alert System (qu’on appelle ATLAS pour faire plus court) a fait son travail à la perfection. Il a repéré un objet qui fonçait à toute allure à travers notre système solaire. Au début, on se posait des questions, mais son comportement caractéristique a vite confirmé qu’il s’agissait d’une comète. Et pas n’importe laquelle : une comète interstellaire, probablement plus vieille que notre propre système solaire, qui ne fait que passer temporairement par chez nous.
Une carte de visite venue du fond des âges
Cette voyageuse solitaire a erré, peut-être pendant des milliards d’années, avant d’arriver dans notre coin du cosmos. C’est une aubaine incroyable. Les astronomes sur Terre, aidés par nos télescopes spatiaux, ont sauté sur l’occasion pour l’étudier. C’est un peu comme recevoir un courrier d’une autre partie de la galaxie, et d’une époque antérieure de l’univers. Même si le 19 décembre a marqué son approche la plus proche de la Terre, il ne nous reste plus beaucoup de temps avant qu’elle ne reparte loin de nos télescopes curieux.
Pour reprendre les mots très justes de la professeure associée Michele Bannister, de l’École des sciences physiques et chimiques de l’Université de Canterbury (ou Te Whare Wānanga o Waitaha, c’est important de le noter), qui fait partie de l’équipe étudiant l’objet : « C’est la grande joie des objets interstellaires, ils nous donnent des indices, car ils sont constitués des blocs de construction de la formation planétaire ailleurs dans la galaxie ». Elle a ajouté quelque chose qui donne le vertige : « Ils nous parlent d’une étoile si ancienne qu’elle n’existe peut-être même plus. Cette comète est une carte de visite du passé, et nous n’avons que quelques centaines de jours pour essayer d’interpréter ce qu’elle nous dit. » C’est beau, non ?
Et justement, en ce court laps de temps où nous l’avons observée, les scientifiques ont trouvé des choses bizarres, enfin, disons une chimie inhabituelle. Ce qui retient surtout l’attention, c’est la présence de molécules clés pour la vie, en abondance comparé à la plupart des comètes de chez nous.
Une richesse chimique surprenante : les chiffres parlent

Alors, entrons un peu dans le vif du sujet, même si ça peut paraître technique. Un récent papier prépublié nous rapporte la détection de méthanol (CH3OH) et de cyanure d’hydrogène (HCN) sur la comète 3I/ATLAS. Ces observations ont été faites grâce au réseau compact d’Atacama du grand réseau millimétrique/submillimétrique de l’Atacama, qu’on appelle plus simplement ALMA. Les dates sont précises : le méthanol a été repéré les 28 août, 18 et 22 septembre, ainsi que le 1er octobre 2025. Pour le cyanure d’hydrogène, c’était les 12 et 15 septembre.
Ce qui est dingue, c’est que le taux de production de méthanol a grimpé en flèche d’août à octobre. Si on compare aux comètes mesurées jusqu’à aujourd’hui via les ondes radio, les ratios CH3OH/HCN sur 3I/ATLAS sont exceptionnels. Tenez-vous bien : le 12 septembre, ce ratio était de 124 (+30/-34) et le 15 septembre, il était de 79 (+11/-14). Je sais, ce sont des chiffres bruts, mais pour vous donner une idée, ces valeurs sont parmi les plus enrichies jamais mesurées sur une comète ! Elles ne sont dépassées que par une comète assez anormale de notre propre système solaire, la C/2016 R2 (PanSTARRS).
Pour être tout à fait clair – et c’est important pour ne pas s’emballer –, ces molécules ne sont pas une preuve de vie sur la comète. On a déjà assez entendu d’hypothèses farfelues sur le fait que 3I/ATLAS serait un vaisseau spatial alien (merci Internet), donc ne commençons pas à croire qu’elle transporte des petits hommes verts. Mais ce sont ce qu’on appelle les « briques élémentaires » de la vie. Comme l’explique la NASA, « la vie telle que nous la connaissons nécessite des blocs de construction, comme les acides aminés, et le cyanure d’hydrogène est l’une des molécules les plus importantes et polyvalentes pour former ces acides aminés ».
De la même manière, le méthanol peut servir à former des molécules plus complexes, comme des sucres, des acides aminés et même des précurseurs d’ADN ou d’ARN. Dans 3I/ATLAS, le méthanol est incroyablement abondant : il constitue environ 8 % de la vapeur de la comète. Pour vous donner un ordre de grandeur, dans les comètes de notre système solaire, c’est plutôt autour de 2 %. C’est une énorme différence ! Martin Cordiner, du Centre de vol spatial Goddard de la NASA dans le Maryland et auteur de l’étude, a confié au New Scientist : « Il semble chimiquement vraiment invraisemblable que vous puissiez suivre un chemin vers une très haute complexité chimique sans produire de méthanol ».
Conclusion : Un espoir pour comprendre nos origines

Même si voir ces briques élémentaires ne signifie pas qu’il y a des molécules complexes toutes faites sur 3I/ATLAS, c’est quand même intrigant – je dirais même émouvant – de les voir sur notre troisième visiteur interstellaire. Ça fait longtemps qu’on suggère que les astéroïdes et les comètes auraient pu ensemencer la Terre primitive avec les ingrédients essentiels à la vie, comme les molécules organiques et l’eau. Et devinez quoi ? Ces éléments, y compris des preuves de glace d’eau, ont tous été vus sur la comète 3I/ATLAS.
Alors, pendant que certains sur Internet, et même certains astronomes de Harvard, s’accrochent encore à l’hypothèse du « vaisseau spatial alien », la présence de ces ingrédients nécessaires à la vie pourrait bien être l’une de nos premières preuves que les blocs de construction de la vie existent ailleurs dans la galaxie. Il faudra attendre plus d’études, peut-être même un quatrième visiteur interstellaire pour confirmer tout ça, mais avouez que c’est plutôt excitant, non ? Pour les curieux qui voudraient aller plus loin, sachez que le papier prépublié a été soumis à The Astrophysical Journal Letters et est disponible via arXiv.
Ce contenu a été créé avec l’aide de l’IA.