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Pétrole : les raffineries américaines pourraient remplacer le brut canadien par du pétrole vénézuélien
Crédit: shutterstock / lanature.ca (image IA)

Entre menaces de guerre et réserves colossales

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C’est reparti pour un tour. Avec l’administration Trump qui saisit des pétroliers, exige le « retour » d’actifs et brandit carrément la menace d’une guerre contre le régime de Maduro, le destin des plus grandes réserves de pétrole prouvées au monde est de nouveau… disons, incertain. C’est assez ironique quand on y pense : à cause des sanctions américaines, le Venezuela est quasiment exclu du marché international, alors qu’il est assis sur plus d’or noir que le Canada ou même l’Arabie saoudite.

Mais imaginons un instant. Si ce pétrole recommençait à couler à flots — comme c’était le cas avant l’ère Hugo Chavez et son successeur Nicolas Maduro —, l’impact sur le Canada pourrait être brutal. Pourquoi ? Parce que nos destins pétroliers sont liés depuis un quart de siècle. Lino Carrillo, un ingénieur chimiste qui sait de quoi il parle, est formel : « Le bitume de la ceinture de l’Orénoque est identique à celui de l’Alberta. Identique. »

Ce type a passé 22 ans à la PDVSA (la compagnie nationale vénézuélienne) avant d’atterrir à Fort McMurray. Il connaît la musique. Sauf que le Venezuela a un atout dans sa manche : sa géographie. Là-bas, le sol est plus chaud, ce qui rend le brut lourd plus fluide ; on peut l’extraire sans avoir à le miner. Et surtout, que ce soit les dépôts près du delta de l’Orénoque ou le pétrole conventionnel du bassin de Maracaibo, tout ça est beaucoup plus près de la mer que nos sables bitumineux.

L’exode des cerveaux : Quand la perte du Venezuela est devenue le gain du Canada

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Les problèmes actuels de l’industrie vénézuélienne ? Ils se les sont créés eux-mêmes, soyons honnêtes. Carrillo était cadre supérieur sur un projet conjoint avec Total Oil quand le couperet est tombé. En 2003, suite à une grève, le gouvernement socialiste de Chavez a viré 23 000 employés de la PDVSA. Vous imaginez ? Une perte d’expertise dont ils ne se sont jamais remis.

Mais le malheur des uns fait le bonheur des autres, comme on dit. « Suncor Energy savait qu’on avait tous été virés », raconte Carrillo. Ils ont sauté sur l’occasion pour recruter des gens qui connaissaient l’industrie, pile au moment du boom en Alberta. Carrillo faisait partie des 25 premiers ingénieurs arrivés au Canada en 2004. Et ça a fait boule de neige : fin 2008, on comptait environ 400 familles vénézuéliennes installées dans les sables bitumineux.

Pendant ce temps, sur le marché, le Canada a pris la place. Historiquement, les raffineries du Golfe du Mexique et du Midwest américain étaient calibrées pour le brut lourd et soufré du Venezuela (et le Maya mexicain). Quand la production vénézuélienne a chuté, le pétrole canadien a comblé le vide. Rory Johnston, analyste de marché et prof à l’Université de Toronto, explique que le Canada est entré assez tardivement sur le marché du Golfe. On a d’abord saturé le Midwest, puis on a débordé vers le Sud, jusqu’à produire tellement que les États-Unis réexportaient une partie de notre brut.

Résultat ? Le Canada est devenu victime de son propre succès, forcé d’accepter des rabais importants (les fameux différentiels de prix) face à des raffineurs qui se frottaient les mains. Le pétrole vénézuélien a disparu des radars, et les pipelines ont même été inversés pour faire descendre le pétrole canadien vers le sud.

Sabotage interne et infrastructures en ruines

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Pendant qu’on s’activait en Alberta, au Venezuela, c’était la débâcle. Entre les licenciements politiques, la fuite des cerveaux et l’incompétence des gouvernements Chavez et Maduro, le résultat était prévisible. Carrillo estime que dès 2011-2012, ils ont tout simplement arrêté la maintenance majeure. L’infrastructure est aujourd’hui « complètement détruite ».

Les bas salaires ont fini de faire fuir ceux qui restaient. « C’est pour ça qu’on est partis en Arabie saoudite, au Mexique, au Brésil, en Colombie, aux États-Unis… » soupire Carrillo. Aujourd’hui, les pipelines sont tellement HS que le pétrole voyage par camions sur de longues distances — des camions souvent en piteux état, vers des ports tout aussi lamentables.

Les chiffres font peur : la production s’est effondrée, passant de 3,4 millions de barils par jour à environ un million. Et encore, la majeure partie est bradée sur le marché noir chinois à cause des sanctions américaines (bien qu’environ 15 % partent aux USA via un accord avec Chevron). Ceux qui restent bossent la peur au ventre, surveillés par la police et l’armée qui les forcent à ignorer les règles de sécurité. Pas étonnant qu’il y ait autant d’accidents.

Le coût du retour et la menace pour le Canada

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Si les sanctions tombaient et que la production reprenait, le Canada aurait du souci à se faire. Le brut lourd de l’Orénoque ressemble tellement au nôtre qu’il pourrait nous concurrencer directement dans les raffineries du Texas et de la Louisiane, et probablement pour moins cher. Pas besoin de nouveaux pipelines : un tanker suffit. Rory Johnston note que le marché le plus naturel pour eux, c’est justement la côte du Golfe. Ils arrivent, ils déchargent, et bam, ils sont en concurrence frontale avec nous.

Pour nous, atteindre ces marchés est une autre paire de manches, surtout après l’échec du pipeline Keystone XL qui devait transporter 800 000 barils par jour. Francisco Monaldi, de l’Université Rice à Houston, souligne que les Américains ont toujours soif de pétrole lourd que le Canada ne peut pas livrer faute de tuyaux. Le Venezuela, lui, a un boulevard devant lui.

Mais attention, ne nous emballons pas. Monaldi prévient : remettre la machine en route coûterait une fortune. Pour atteindre quatre millions de barils par jour en dix ans, il faudrait investir au nord de 100 milliards de dollars. Et qui va payer ? La compagnie nationale est en faillite et le pays traîne une dette extérieure de plus de 150 milliards. Il faudrait des investissements privés massifs, ce qui implique une stabilité politique… ce qui n’est pas gagné.

Entre les coups d’État, les nationalisations, la violence et les groupes armés, le risque politique est énorme. Sans parler des exigences de Trump qui veut se faire « rembourser » le pétrole. C’est le flou total.

Conclusion : Vers l’Ouest, toute ?

Pourtant, si le régime Maduro tombait, l’incitation à relancer l’industrie serait gigantesque. Et le Venezuela possède une ressource cachée : sa diaspora. Ces ingénieurs et géologues éparpillés dans le monde, notamment au Canada, seraient cruciaux. Lino Carrillo l’admet lui-même, il serait prêt à aider : « Je retournerais. Je n’ai aucun doute là-dessus… Je viendrais aider pour deux ou trois ans. » Même si ses petits-enfants sont Canadiens, l’appel du pays reste fort.

Pour le Canada, la leçon est claire. Johnston estime que cette menace potentielle venue du Sud doit nous pousser à regarder ailleurs, vers l’Ouest. L’expansion de TransMountain est vitale pour ne pas dépendre d’un seul client. En matière de sécurité énergétique, on parle souvent de l’offre, mais pour un exportateur comme nous, le vrai enjeu, c’est la « sécurité de la demande ». Et la seule façon de l’obtenir, c’est la variété.

Selon la source : cbc.ca

Ce contenu a été créé avec l’aide de l’IA.

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