Cette étrange plante, qui ressemble à un champignon, est peut-être « l’expérience la plus bizarre » de l’évolution
Auteur: Adam David
Quand une fleur se prend pour un champignon

Honnêtement, on vous pardonnerait de penser que cette chose est un champignon. Elle a une espèce de chapeau, elle pousse tapie dans la pénombre des sous-bois et surtout, elle n’a absolument aucune trace de chlorophylle. C’est le pigment qui rend nos chères plantes toutes vertes et qui leur permet de faire de la photosynthèse, n’est-ce pas ? Mais tenez-vous bien : malgré les apparences, nous sommes bel et bien face à une espèce de plante à fleurs. Son nom scientifique, Balanophora fungosa, sonne d’ailleurs déjà confus.
Cette plante appartient à la famille des Balanophoraceae, un groupe extrêmement rare qui a réussi l’exploit de survivre et, figurez-vous, de se reproduire sans avoir besoin de lumière du soleil ou même, dans certains cas, de sexe. Kenju Suetsugu, botaniste à l’Université de Kobe au Japon et co-auteur d’une étude fascinante sur le sujet, résume bien la situation : « Beaucoup de gens assimilent les plantes à la photosynthèse, mais Balanophora nous montre que pour être une plante, il n’est pas nécessaire d’être verte. »
Un mode de vie parasitaire et des gènes étrangement réduits

Où trouve-t-on ces drôles de spécimens ? Ils se cachent dans les montagnes de Taiwan ou les forêts subtropicales luxuriantes d’Okinawa. En réalité, Balanophora et toute sa famille sont des parasites. Ils se fixent aux racines des arbres et survivent en siphonnant les nutriments que la plante hôte a collectés. Ce sont de véritables vampires botaniques, si vous voulez !
Pour comprendre comment cette plante a réussi à s’adapter à un mode de vie si… alternatif, des chercheurs ont analysé le génome de pas moins de sept espèces différentes de Balanophoraceae, prélevées dans douze populations situées au Japon et à Taiwan.
La découverte la plus intrigante concerne le génome plastidial de ces plantes : il est incroyablement réduit. Ce génome plastidial est crucial, normalement, pour des processus aussi essentiels que la régulation de l’énergie, le stockage des ressources, la communication cellulaire, et bien sûr, la photosynthèse. Malgré cette réduction spectaculaire, les plantes semblent tout de même capables d’assurer de nombreuses fonctions clés, notamment la production d’acides aminés. Et c’est là que ça devient vraiment bizarre : les Balanophoraceae partagent des similarités importantes avec le Plasmodium, le parasite responsable du paludisme (la malaria), qui possède lui aussi un génome plastidial très diminué. C’est une convergence évolutive assez sidérante.
Une lignée parasitaire vieille de 100 millions d’années et l’art de la reproduction solitaire

Selon l’équipe de recherche, cette réduction génomique fondamentale n’est pas récente. Elle se serait produite avant la diversification de la famille Balanophoraceae, il y a environ 100 millions d’années, soit durant le Crétacé moyen. Cela fait de Balanophoraceae l’une des plus anciennes lignées parasitaires que nous connaissions. Imaginez un peu, c’est une véritable antiquité évolutive !
Pourquoi abandonner la photochimie ? Le professeur Suetsugu l’explique très clairement. Le parasitisme permet la survie et la reproduction dans des habitats où la lumière est très limitée. Quand on vit sous la canopée, pourquoi maintenir une machinerie photosynthétique coûteuse en métabolisme, alors qu’on peut juste la supprimer et réorienter toute cette énergie ? En se rendant fortement dépendant d’un hôte dans ces sous-bois ombragés, la plante a pu « détourner l’investissement des feuilles et des structures photosynthétiques vers les organes parasitaires souterrains et la reproduction ».
Mais ce n’est pas tout. Certaines espèces de Balanophoraceae possèdent un autre atout : elles ont la fascinante capacité de se reproduire seules, ce qui n’est pas si courant dans le règne végétal. Cette stratégie, que l’on appelle parthénogenèse ou reproduction asexuée, leur aurait permis de se propager sur les îles japonaises sans jamais dépendre de l’aide d’un pollinisateur ou de la proximité d’un partenaire. C’est la définition même de l’autonomie écologique.
Un cul-de-sac évolutif ou une stratégie audacieuse ?

Ces découvertes, publiées dans la revue New Phytologist, soulèvent des questions fondamentales sur ce que signifie « être une plante ». Ce n’est pas juste une bizarrerie botanique ; c’est la preuve que l’évolution peut prendre des chemins complètement imprévisibles. Et l’équipe ne compte pas s’arrêter là. La prochaine étape, selon Kenju Suetsugu, sera d’élargir la recherche à d’autres espèces de plantes parasites.
En comparant ces différentes lignées qui ont renoncé au vert, les chercheurs espèrent trancher une question cruciale : est-ce que les plantes qui ont abandonné la photosynthèse représentent un « cul-de-sac évolutif », où elles sont condamnées à terme, ou bien sont-elles « activement en train d’explorer de nouvelles stratégies écologiques » ? C’est une perspective fascinante. Personnellement, je trouve que le pari qu’elles ont fait est incroyablement audacieux, vous ne trouvez pas ?
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