Imaginez notre Terre, il y a très, très longtemps. Elle est née il y a environ 4,6 milliards d’années. À cette époque, qu’on appelle l’Hadéen, notre planète était une boule de feu, incroyablement chaude. Le nom « Hadéen » vient d’ailleurs d’Hadès, le dieu des enfers dans la mythologie grecque, c’est pour vous dire !
Puis, tout doucement, elle a commencé à refroidir. Il y a environ 4,35 milliards d’années, une première croûte terrestre a pu se former, un peu comme la peau qui se forme sur le lait chaud. C’est peut-être à ce moment-là que les premières formes de vie sont apparues. Le problème, c’est qu’on ne sait presque rien de cette période, car les roches de cet âge sont devenues extrêmement rares. C’est comme essayer de reconstituer une histoire avec seulement quelques pages d’un livre très ancien.
Une découverte majeure au nord du Québec
Mais voilà qu’une équipe de chercheurs vient de nous apporter une pièce manquante du puzzle. Ils ont confirmé que les plus anciennes roches connues sur Terre se trouvent chez nous, dans le Grand Nord du Québec. Et leur âge est tout simplement vertigineux : on parle de 4,3 milliards d’années.
Ces cailloux ne sont pas de simples pierres. Non, ce sont des témoins directs de la naissance de notre monde, une fenêtre ouverte sur un passé incroyablement lointain et mystérieux.
Ces roches qui ont semé le doute
Cette histoire ne date pas d’hier. Déjà en 2008, un chercheur québécois, Jonathan O’Neil, avait avancé que ces roches du Québec, situées dans un endroit appelé la « ceinture de roches vertes de Nuvvuagittuq », étaient les plus vieilles du monde. Pour être précis, il s’agit surtout d’un type de roche que les Inuits appellent « Ujaraaluk », ce qui veut dire « grosse vieille roche solide ». Un nom bien choisi !
Cependant, tous les scientifiques n’étaient pas d’accord. C’est normal en science, on aime bien vérifier ! D’autres équipes avaient étudié de petits cristaux trouvés dans ces roches et pensaient qu’elles étaient plus jeunes, autour de 3,78 milliards d’années. C’est déjà très vieux, bien sûr, mais pas assez pour remonter jusqu’à l’Hadéen. Le débat était donc ouvert.
L'enquête sur le terrain pour trouver la preuve
Pour en avoir le cœur net, une nouvelle équipe de chercheurs est retournée sur place en 2017. Et ils ont eu une idée brillante. Au lieu de regarder encore les mêmes roches, ils ont cherché d’autres roches qui seraient venues couper les premières.
Imaginez que vous avez une vieille couche de peinture sur un mur (c’est notre roche Ujaraaluk). Si quelqu’un vient faire une entaille dans cette peinture, l’entaille est forcément plus récente que la peinture elle-même. C’est la même logique. Ils ont trouvé des roches, appelées métagabbros, qui ont traversé les vieilles roches Ujaraaluk. La mission était donc de dater ces roches « intrusives ». Si elles étaient déjà très anciennes, alors les roches qu’elles ont coupées devaient l’être encore plus !
Le verdict est tombé : un âge record confirmé
De retour au laboratoire, les scientifiques ont utilisé non pas une, mais deux méthodes de datation différentes sur ces roches intrusives pour être absolument sûrs de leur coup. Et les deux méthodes ont donné le même résultat, sans aucune ambiguïté.
Ces roches qui ont coupé les plus anciennes sont âgées de 4,16 milliards d’années. La conclusion est donc limpide : les roches Ujaraaluk, celles qui ont été coupées, sont obligatoirement encore plus vieilles. Cette découverte met fin à la controverse et confirme qu’il s’agit bien des vestiges de la première croûte terrestre, datant de l’Hadéen.
Pourquoi est-ce si important pour nous aujourd'hui ?
On pourrait se dire que ce ne sont que de vieux cailloux. Mais en réalité, c’est bien plus que ça. Ces roches de Nuvvuagittuq sont pour l’instant notre seul lien direct avec l’enfance de la Terre. C’est une chance inouïe de les avoir.
En les étudiant, les scientifiques peuvent commencer à répondre à des questions fondamentales : Comment les premiers continents se sont-ils formés ? À quel moment notre planète est-elle devenue un endroit où la vie pouvait apparaître et se développer ? En comprenant nos origines les plus lointaines, on comprend un peu mieux la planète fragile et merveilleuse sur laquelle nous vivons tous aujourd’hui.
Selon la source : apnews.com