C’est un événement rare, pour ne pas dire sans précédent. Près de 300 employés et anciens collaborateurs de la NASA, l’agence spatiale américaine, ont décidé de monter au créneau. Dans une lettre ouverte au ton particulièrement ferme, ils dénoncent les décisions de l’administration Trump, qu’ils jugent non seulement néfastes pour la recherche, mais aussi dangereuses pour la sécurité des astronautes. Une prise de parole collective qui met en lumière les tensions profondes qui secouent l’une des institutions scientifiques les plus prestigieuses au monde.
La « Voyager Declaration » : un cri d’alarme pour l’avenir
Le document au cœur de cette contestation porte un nom symbolique : la « Voyager Declaration ». Signée le 21 juillet par 287 personnes, dont 156 ont choisi de rester anonymes, cette lettre a été adressée directement à Sean Duffy, le tout nouvel administrateur par intérim de l’agence. Elle rend d’abord hommage aux astronautes qui ont perdu la vie par le passé, avant d’alerter sur les risques que les nouvelles orientations font peser sur les missions actuelles et futures.
Les signataires pointent du doigt « des changements rapides et coûteux qui ont compromis notre mission et eu des conséquences catastrophiques sur les effectifs de la NASA ». Des mots forts, publiés par l’organisation Stand Up For Science, qui traduisent un profond sentiment d’urgence et d’inquiétude.
Des coupes budgétaires qui menacent des projets cruciaux
Concrètement, de quoi parle-t-on ? Dès son arrivée, Sean Duffy a acté des décisions aux conséquences financières immédiates. La lettre dénonce une coupe budgétaire de plus de 120 millions de dollars et, chose encore plus alarmante, une proposition visant à amputer de près de 50 % les fonds alloués à la Direction des missions scientifiques. Un véritable séisme pour des programmes de recherche parfois validés de longue date par le Congrès américain lui-même.
Ces arbitrages ne se limitent pas à de simples chiffres sur un tableur. Ils se traduisent par l’annulation de missions en cours de développement, la fin brutale de contrats et de subventions, et des réorganisations internes qui, selon les employés, sèment le chaos et nuisent à l’efficacité de leur travail.
Plus grave encore : la sécurité des astronautes remise en question
Mais au-delà des budgets, c’est une autre crainte, bien plus grave, qui tenaille les équipes : la sécurité des vols habités. La déclaration s’inquiète des modifications envisagées pour l’« Autorité technique » de la NASA. Ce système, c’est un peu le garde-fou de l’agence. Il a été mis en place après le terrible accident de la navette Columbia en 2003, qui avait coûté la vie à sept astronautes.
Son principe est simple mais essentiel : permettre à n’importe quel employé de signaler un problème technique en dehors de sa chaîne de commandement directe, pour s’assurer qu’aucune préoccupation de sécurité ne soit ignorée pour des raisons de calendrier ou de budget. Comme l’explique anonymement un ingénieur du Goddard Space Flight Center, toucher à ce système pourrait constituer « une menace sérieuse pour les équipes impliquées dans les vols spatiaux habités ».
Un mouvement de contestation qui dépasse la NASA
Il faut dire que ce vent de contestation n’est pas un cas isolé. L’administration Trump a bousculé en profondeur de nombreuses agences fédérales, particulièrement dans le secteur scientifique. Le schéma est souvent le même : suppressions d’emplois, coupes budgétaires drastiques et annulations de programmes.
Par exemple, plus d’une centaine d’employés ont été licenciés de la National Science Foundation (NSF), un pilier du financement de la recherche. En juin, plus de 300 de leurs confrères des National Institutes of Health (NIH) avaient déjà signé une déclaration pour protester contre la suppression de subventions pour des traitements vitaux, jugée purement politique.
parler, mais à quel prix ?
Prendre ainsi la parole n’est pas sans risque, loin de là. Le fait que plus de la moitié des signataires de la NASA aient exigé l’anonymat en dit long sur le climat de censure interne qui semble s’être installé. Les employés craignent des représailles pour leur carrière, comme l’a confié l’une des sources à la presse, estimant toutefois que les enjeux étaient trop importants pour se taire.
Leur peur est fondée. Au début du mois, 140 employés de l’Agence de protection de l’environnement (EPA) qui avaient signé une pétition similaire ont tout simplement été placés en congé administratif forcé. Un acte de résistance courageux donc, de la part des équipes de la NASA, qui se battent non seulement pour leurs emplois, mais aussi pour l’intégrité de la science et la sécurité de ceux qui portent nos rêves vers les étoiles.
Selon la source : trustmyscience.com