Face à la douleur vive et soudaine d’un aphte, de plus en plus de Français se tournent vers l’aromathérapie, perçue comme une alternative douce et efficace. Laurier noble, tea tree ou clou de girofle sont vantés pour leurs propriétés apaisantes. Pourtant, derrière la promesse d’un remède 100 % naturel se cache un danger bien réel que les spécialistes rappellent sans cesse. Mal utilisées, ces huiles peuvent se révéler non seulement inefficaces, mais aussi dangereuses pour la santé.
Des actifs puissants, pas des remèdes anodins
Il est indéniable que certaines huiles essentielles possèdent des propriétés intéressantes pour soulager les affections buccales. Comme le soulignent des aromathérapeutes comme Danièle Festy, l’huile essentielle de laurier noble est reconnue pour ses vertus analgésiques, celle de tea tree pour son action cicatrisante et immunostimulante, et celle de clou de girofle pour son effet anesthésiant local puissant grâce à l’eugénol qu’elle contient. Ces composés actifs expliquent leur popularité. Cependant, leur concentration élevée en fait des produits à manier avec une extrême précaution, loin de l’image inoffensive qu’on leur prête parfois.
Un risque d'effets secondaires majeur et invisible
Le principal piège réside dans l’ignorance des contre-indications. « Penser que ‘naturel’ signifie ‘sans danger’ est une erreur fondamentale en toxicologie », alerte le Dr. Alain Soria, allergologue à l’hôpital Tenon (AP-HP). L’application directe sur une muqueuse, zone très perméable, peut entraîner des effets indésirables notables. Les experts pointent plusieurs risques majeurs :
- Risques pour les populations fragiles : La plupart de ces huiles sont formellement déconseillées aux femmes enceintes ou allaitantes, ainsi qu’aux jeunes enfants (les seuils d’âge variant de 3 mois à 12 ans selon l’huile).
- Interactions médicamenteuses : L’huile de clou de girofle, par exemple, ne doit pas être utilisée par des personnes sous traitement anticoagulant. Celle de tea tree demande une prudence accrue en cas de prise d’antibiotiques.
- Pathologies spécifiques : Les personnes souffrant d’asthme, d’épilepsie, de troubles de la tension ou de certains cancers hormono-dépendants doivent éviter plusieurs de ces huiles.
- Irritations et brûlures : Une huile essentielle pure, en particulier celle de clou de girofle, est dermocaustique. Appliquée sans dilution sur un aphte, elle peut agresser et brûler la muqueuse, aggravant la lésion au lieu de la soigner.
Le bain de bouche, une fausse bonne idée ?
Les recettes de bains de bouche « maison » qui circulent peuvent également s’avérer problématiques. Le principal écueil : les huiles essentielles ne sont pas hydrosolubles, c’est-à-dire qu’elles ne se mélangent pas à l’eau. « Verser quelques gouttes directement dans un verre d’eau est inutile et dangereux », explique Françoise Couic-Marinier, pharmacienne et auteure de ‘Se soigner avec les huiles essentielles’. « L’huile va rester en surface en gouttelettes pures et entrer en contact direct avec les muqueuses, avec un risque de brûlure. » L’usage d’un dispersant adapté, comme le préconisent les spécialistes, est donc une étape non négociable pour qui voudrait tenter la préparation.
Comment se protéger ? les bons réflexes à adopter
Pour une utilisation minimisant les risques, les professionnels de santé s’accordent sur un protocole strict. Voici les recommandations essentielles à suivre :
- Ne jamais appliquer pur : Sauf mention explicite d’un professionnel pour une huile très douce comme le tea tree, une huile essentielle doit toujours être diluée dans une huile végétale alimentaire (olive, tournesol) avant une application buccale.
- Faire un test cutané : Avant toute utilisation, appliquez une goutte du mélange dilué dans le pli du coude et attendez 24 heures pour vérifier l’absence de réaction allergique.
- Respecter la posologie : Ne dépassez jamais le nombre de gouttes et la fréquence d’application recommandés (généralement 3 à 4 fois par jour pendant 3 jours maximum).
- Demander un avis médical : En cas de doute, de traitement en cours ou de pathologie chronique, l’avis d’un médecin ou d’un pharmacien formé à l’aromathérapie est indispensable.
la prudence comme meilleur remède
Si les huiles essentielles peuvent offrir un soulagement ponctuel contre les aphtes, elles doivent être considérées comme des actifs biochimiques puissants et non comme de simples remèdes de grand-mère. Leur efficacité ne peut être dissociée de leurs précautions d’emploi rigoureuses. En matière de santé, ‘naturel’ ne doit jamais être synonyme de ‘sans danger’, et l’avis d’un professionnel reste le meilleur des remparts contre les mauvaises surprises.
Selon la source : passeportsante.net