Imaginez pouvoir sentir une maladie, des années avant même que les médecins ne posent un diagnostic. Ça ressemble à de la science-fiction, n’est-ce pas ? C’est pourtant l’histoire bien réelle de Joy Milne, une Écossaise de 74 ans. Au début, quand elle a affirmé pouvoir « sentir » la maladie de Parkinson, les scientifiques étaient plus que sceptiques. Ils pensaient qu’elle associait simplement l’odeur des personnes âgées à la maladie. Une idée un peu folle.
Mais Joy était sûre d’elle. Des années plus tôt, elle avait remarqué que son mari, Les, dégageait une nouvelle odeur, un peu boisée, musquée. Plus tard, le diagnostic est tombé : Parkinson. Ce n’est qu’en participant à un groupe de soutien qu’elle a tout compris. Dans la salle, tous les malades avaient cette même odeur. C’est là que tout a commencé.
Le test qui a tout changé
Pour en avoir le cœur net, des chercheurs de l’Université d’Édimbourg ont décidé de la mettre à l’épreuve. Franchement, ils ne s’attendaient pas à grand-chose. Ils ont demandé à Joy de renifler 12 t-shirts : six portés par des patients atteints de Parkinson et six par des personnes en bonne santé. Le résultat a stupéfié tout le monde.
Non seulement elle a identifié correctement les six malades, mais elle a aussi désigné un t-shirt du groupe « sain » en affirmant que cette personne avait l’odeur. Les scientifiques lui ont dit qu’elle s’était trompée sur ce dernier. Sauf que… moins d’un an plus tard, cette même personne a été officiellement diagnostiquée avec la maladie de Parkinson. Joy avait raison depuis le début. Elle possède un don rare appelé l’hyperosmie héréditaire, un super-odorat, en quelque sorte.
Quand notre corps nous envoie des signaux... odorants
L’histoire de Joy peut sembler unique, mais en réalité, nos corps parlent constamment à travers les odeurs. Une nouvelle odeur corporelle peut être un signe que quelque chose a changé, ou ne va pas bien. Vous n’avez pas besoin d’un super-nez pour remarquer certains de ces signaux. Par exemple :
Une personne diabétique peut avoir une haleine qui sent les « pommes pourries » si son taux de sucre est mal équilibré.
Une maladie du foie peut provoquer une odeur de moisi ou de soufre.
Si l’haleine sent l’ammoniaque ou le poisson, cela pourrait indiquer un problème aux reins.
Même des infections comme la tuberculose ont leur « signature » : une odeur de bière éventée ou de carton mouillé.
Les chiens, des super-détecteurs sur pattes
Et si les humains ne sont pas les seuls à avoir ce don ? Nos amis les chiens ont un odorat jusqu’à 100 000 fois plus puissant que le nôtre. Ce n’est donc pas surprenant que les scientifiques les entraînent à devenir de véritables détecteurs médicaux.
Des chiens ont été formés pour renifler et identifier plusieurs types de cancers (poumon, sein, prostate…). Pour le cancer de la prostate, par exemple, des études ont montré que les chiens pouvaient le détecter dans des échantillons d’urine avec un taux de réussite incroyable de 99 % ! Ils peuvent aussi sentir les signes avant-coureurs d’une crise d’épilepsie ou des changements liés au diabète. C’est fascinant, mais former un chien prend du temps et tous n’en sont pas capables.
Mais comment ça marche, scientifiquement parlant ?
Alors, pourquoi une maladie change-t-elle notre odeur ? Tout est une question de chimie. Notre corps est une formidable usine qui transforme ce que nous mangeons en énergie pour vivre. Ce processus crée des milliers de petites molécules, des sortes de « déchets » de fabrication. Certaines de ces molécules sont volatiles, c’est-à-dire qu’elles s’évaporent facilement dans l’air. Ce sont les Composés Organiques Volatils (COV).
Quand une maladie, une infection ou même une blessure survient, elle perturbe le fonctionnement normal de notre usine intérieure. La production de ces molécules change, et donc, l’odeur que nous dégageons aussi. Chaque maladie a en quelque sorte sa propre « empreinte olfactive », même si elle est souvent trop subtile pour que notre nez puisse la remarquer.
La technologie à la rescousse : des tests simples pour demain
Puisque nous ne pouvons pas tous compter sur un super-odorat ou un chien renifleur, les scientifiques travaillent sur des technologies capables de faire la même chose. L’équipe de la chercheuse Perdita Barran, qui a testé Joy, met au point un test simple par prélèvement sur la peau pour Parkinson.
Ils ont découvert qu’environ 30 molécules présentes dans le sébum (la substance grasse de la peau) sont différentes chez les personnes atteintes. L’objectif ? Avoir un test rapide et non invasif. Fini les longues attentes pour voir un neurologue. Un simple coton-tige sur la peau pourrait orienter rapidement les médecins. D’autres équipes développent même des « nez robotiques » capables de sentir des maladies comme le cancer de la prostate ou les commotions cérébrales chez les sportifs.
Conclusion : faites confiance à votre instinct (et à votre nez !)
Aujourd’hui, Joy Milne, du haut de ses 75 ans, collabore avec les chercheurs. Son don, autrefois jugé farfelu, est maintenant une source d’inspiration pour la médecine de demain. Elle est la preuve vivante que des observations, même les plus étranges, peuvent avoir une signification profonde.
L’histoire de Joy et de son mari Les nous rappelle une chose essentielle : il faut s’écouter. Nous connaissons notre corps, et celui de nos proches, mieux que personne. Si quelque chose vous semble « différent », que ce soit une odeur, une douleur ou un changement de comportement, n’ayez pas peur d’en parler à un médecin. Parfois, notre intuition est le premier et le plus important des diagnostics.
Selon la source : bbc.com