Perdre une dent, c’est un petit deuil. Un trou dans le sourire, une gêne pour manger, et souvent le début d’un long parcours de soins. Jusqu’à présent, la seule réponse était le bricolage, aussi sophistiqué soit-il : un implant, un bridge, un dentier. Mais si la solution n’était plus de remplacer, mais bien de régénérer ? Ce qui relevait de la science-fiction est en train de devenir une piste de recherche sérieuse, promettant de faire repousser nos propres dents.
Un implant n'est jamais une vraie dent
Demandez à n’importe qui portant un implant : c’est une solution fonctionnelle, mais rarement parfaite. Une vis dans l’os, une couronne en céramique… Le corps le tolère plus ou moins bien, mais la sensation naturelle, elle, a disparu. Pas de racine vivante, pas d’information transmise au cerveau. C’est de là qu’est né ce rêve un peu fou : et si on pouvait convaincre le corps de refaire ce qu’il a déjà fait une fois dans l’enfance ? Lancer un nouveau cycle de croissance dentaire, à la demande.
Sur la piste du gène qui freine la pousse
Pour percer le secret de la fabrication d’une dent, les scientifiques ont d’abord joué les détectives. Ils se sont penchés sur des cas rares d’hyperdontie, ces personnes qui naissent avec des dents en trop. L’enquête a fini par payer. Plusieurs équipes, notamment au Japon, ont identifié un suspect clé : le gène USAG-1. Son rôle ? Agir comme un frein naturel, qui empêche la formation de bourgeons dentaires supplémentaires une fois notre dentition en place. L’idée est donc simple sur le papier : si on pouvait désactiver temporairement ce frein, le corps pourrait-il relancer la machine ?
En laboratoire, la promesse a déjà pris forme
Chez la souris et le furet, la réponse est oui. En administrant un anticorps capable de neutraliser la protéine issue du gène USAG-1, des chercheurs ont réussi à déclencher la croissance d’une nouvelle dent, parfaitement formée et fonctionnelle. L’objectif n’est pas de faire pousser n’importe quoi, mais bien de recréer une dent complète, avec son émail, sa dentine, sa pulpe et sa racine. Une vraie dent, intégrée à la mâchoire. C’est cette réussite qui a ouvert la voie aux essais sur l’humain.
Le Japon, pionnier des essais cliniques
C’est la société biopharmaceutique japonaise Toregem Biopharma qui est en première ligne. Des essais cliniques sont prévus pour démarrer dès cette année, avec une prudence de mise. La première phase concernera des enfants atteints d’anodontie congénitale, une maladie rare qui les prive de la plupart de leurs dents de lait et définitives. Si les résultats sont concluants, la technologie pourrait ensuite être adaptée aux adultes ayant perdu des dents pour des raisons plus communes, comme une carie ou un accident. D’autres équipes, en Europe et aux États-Unis, explorent des pistes parallèles, notamment via la reprogrammation de cellules souches prélevées directement dans la gencive du patient.
le principal frein n'est plus la science, mais l'argent
Pourtant, le chemin du laboratoire au fauteuil du dentiste reste semé d’embûches. Il y a les obstacles réglementaires, la nécessité de garantir une sécurité absolue et, surtout, le coût exorbitant de ces thérapies de pointe. Aujourd’hui, le principal verrou n’est peut-être plus biologique, mais économique. Il faudra convaincre les investisseurs que le marché du « sourire authentique » est plus prometteur que celui des prothèses. Si ce pari est gagné, on pourrait assister à une véritable révolution, passant de l’ère de la réparation à celle de la régénération. Le sourire de demain pourrait bien avoir le goût de l’authentique.
Selon la source : ma-grande-taille.com