On les croise tous les jours. Ce collègue surinvesti, cet ami qui semble tout anticiper, jusqu’à l’obsession. Derrière ces façades de contrôle se cache parfois un mal-être profond, discret mais dévorant : le trouble anxieux généralisé (TAG), l’un des troubles psychiques les plus fréquents, et pourtant l’un des plus méconnus.
Quand le cerveau ne se met jamais sur pause
Au cœur du TAG, il y a cette rumination. Une inquiétude sourde, permanente, qui ne s’arrête jamais. La personne ne s’inquiète pas *de* quelque chose, elle est simplement… inquiète. Le moindre événement, même heureux comme des vacances ou une promotion, peut devenir le point de départ d’un scénario catastrophe. C’est une machine à anticiper le pire qui tourne à plein régime, pendant des mois.
« Leur cerveau est en activité constante », résume la psychologue Bérénis Lefebvre. Cette hypervigilance épuisante répond à une croyance profonde : l’imprévu est une menace. Pour ces personnes, le hasard n’est tout simplement pas permis, et chaque parcelle d’incertitude doit être maîtrisée.
Un mal qui s'inscrit violemment dans le corps
Et non, tout ne se passe pas « dans la tête ». Loin de là. L’anxiété s’exprime de manière brutale dans le corps : la mâchoire qui se serre sans crier gare, la nuque raide comme du bois, ces palpitations soudaines qui font croire au pire. S’ajoutent souvent des vertiges, une sensation d’étouffement ou des sueurs froides qui peuvent survenir n’importe quand, sans prévenir.
L'errance médicale, ou la peur de mourir d'angoisse
Ce déferlement de symptômes est si intense qu’il mène parfois tout droit aux urgences. Confondue avec une crise cardiaque ou un trouble grave, l’attaque de panique entraîne souvent une longue errance médicale avant que le bon diagnostic soit posé. Le patient passe d’un spécialiste à l’autre, sans qu’on ne trouve de cause « physique » à ses maux.
« L’anxiété peut se traduire par un ressenti de mort imminente, ce qui rend le quotidien insupportable », précise Bérénis Lefebvre. C’est cette dimension physique qui rend l’expérience si terrifiante et si difficile à expliquer à son entourage.
Éviter pour survivre, contrôler pour ne pas sombrer
Pour faire face à ce chaos intérieur, la personne met en place, souvent inconsciemment, des stratégies de survie. Celles-ci prennent deux formes principales : l’évitement et l’hyper-contrôle. On va fuir les lieux publics, refuser une invitation par peur de l’imprévu. Ou, à l’inverse, on va tout vérifier : le trajet, le contenu de son sac, les aliments que l’on ingère – par exemple, ne manger que des aliments mous par peur de s’étouffer.
Un véritable carcan qui isole et éteint peu à peu toute spontanéité. La psychologue évoque même des cas extrêmes, où des personnes, prisonnières de leur anxiété, ne sortent plus de chez elles pendant des mois.
Reconnaître les signes pour desserrer l'étau
Cette charge mentale, physique et comportementale transforme le quotidien en un champ de mines. Le trouble anxieux généralisé n’est ni une faiblesse de caractère, ni une simple phase de stress. C’est une maladie à part entière, qui ronge de l’intérieur et qui nécessite une prise en charge adaptée.
En parler, consulter, et surtout comprendre que cette souffrance n’est pas une fatalité : voilà sans doute la première étape pour, enfin, commencer à respirer.
Selon la source : passeportsante.net