Le grand retournement : pourquoi les jeunes sont aujourd’hui plus tristes que leurs vieux
Auteur: Mathieu Gagnon
On a tous entendu parler de la fameuse « crise de la quarantaine ». Ce moment, autour de 40 ou 50 ans, où l’on se sent au plus bas, où le moral flanche avant de, soi-disant, remonter avec l’âge. C’était une idée bien ancrée, presque un passage obligé dans la vie. Eh bien, il semblerait que cette idée soit complètement dépassée. Des études très sérieuses nous montrent aujourd’hui une réalité bien différente, et assez surprenante : le coup de blues ne frappe plus au milieu de la vie, mais bien plus tôt, dès le début de l’âge adulte.
C’est un véritable basculement qui change tout ce que l’on pensait savoir sur le bonheur et les âges de la vie.
Hier, le bonheur suivait une courbe en U
Pour bien comprendre le changement, il faut se souvenir de ce que les experts nous disaient il y a encore une dizaine d’années. Le bonheur, disaient-ils, ressemblait à une grande lettre ‘U’. On commençait sa vie d’adulte avec un moral au top, plein d’entrain. Puis, petit à petit, vers 30 ans, ça commençait à descendre, pour atteindre un point vraiment bas autour de la cinquantaine. C’était la fameuse crise. Et puis, la bonne nouvelle, c’est qu’après ce creux, le moral remontait, et l’on se sentait de mieux en mieux en approchant de 70 ans.
Cette courbe en U semblait universelle, on la retrouvait dans 145 pays ! Fait amusant, on avait même observé quelque chose de similaire chez les grands singes, comme les chimpanzés. C’était donc vu comme un phénomène presque naturel.
Une étude géante vient tout bousculer
Mais voilà, une nouvelle équipe de chercheurs, menée par un certain Alex Bryson à Londres, a décidé de regarder les chiffres de plus près. Et ils n’ont pas fait les choses à moitié. Ils ont analysé des données venant du monde entier : plus de 10 millions d’adultes aux États-Unis, 40 000 foyers au Royaume-Uni, et même les réponses de près de 2 millions de personnes dans 44 pays différents grâce à un grand projet sur la santé mentale.
Le résultat de cette immense enquête est sans appel : la courbe en U a pratiquement disparu. Le creux de la vague autour de la quarantaine n’existe plus comme avant.
Le vrai changement : la détresse des jeunes adultes
Attention, cela ne veut pas dire que la quarantaine est devenue une période de pur bonheur. Comme le dit le chercheur Alex Bryson, « le milieu de vie reste en réalité assez moyen ». Non, le véritable bouleversement, le voilà : le niveau de mal-être et de détresse psychologique n’arrête pas d’augmenter chez les jeunes adultes.
En gros, la courbe s’est aplatie, et même inversée. Aujourd’hui, les données montrent que plus on avance en âge, plus on se déclare heureux. C’est la jeunesse qui semble être devenue la période la plus difficile à vivre, ce qui va totalement à l’encontre de l’image d’insouciance qu’on en avait.
Mais pourquoi les jeunes vont-ils si mal ?
Alors, comment expliquer ce grand retournement ? Les chercheurs ont plusieurs pistes. Ils pointent du doigt trois grands facteurs qui pèsent lourdement sur les épaules des plus jeunes générations :
- L’utilisation massive des réseaux sociaux : la comparaison permanente avec les autres, la pression de l’image…
- L’isolement lié à la pandémie de Covid-19 : une période qui a particulièrement coupé les jeunes de leurs liens sociaux.
- La difficulté à trouver de l’aide psychologique : même quand ils ne vont pas bien, il est souvent compliqué pour eux d’être accompagnés.
Ces éléments fragilisent tout particulièrement ceux qui ont grandi avec internet et les smartphones.
Un mal-être qui touche surtout les pays riches
Il est important de noter que ce phénomène est surtout visible dans les pays développés où l’on parle anglais, comme les États-Unis ou le Royaume-Uni. La situation n’est pas la même partout dans le monde.
Par exemple, les chercheurs ont regardé la situation en Tanzanie, un pays d’Afrique où tout le monde n’a pas accès à internet. Là-bas, le résultat est intéressant : les jeunes qui n’ont pas de connexion internet se disent plus heureux que ceux qui en ont une. Cela semble confirmer que notre mode de vie très connecté a une part de responsabilité dans ce mal-être grandissant.
Et la quarantaine dans tout ça ? Pas si terrible, finalement
Revenons à nos quadragénaires et quinquagénaires. Si le creux de la vague s’est déplacé vers les plus jeunes, que devient le milieu de vie ? Comme on l’a dit, il reste « moyen ». Il y a toujours des défis, des doutes, des remises en question. La différence, c’est que ce n’est plus le point le plus bas de notre vie en termes de bien-être.
Le grand changement, c’est que la tristesse qui était autrefois associée à la quarantaine s’est maintenant installée bien plus tôt. Le point le plus bas du moral se situe désormais au début de la vie d’adulte, et non plus en son milieu.
Conclusion : vieillir, ce n'est peut-être pas si mal
Finalement, que retenir de tout ça ? D’abord, qu’il faut arrêter de croire au mythe de la crise de la quarantaine. Les temps ont changé. Ensuite, et c’est le plus important, il faut prendre conscience que nos jeunes traversent une période psychologiquement difficile, bien plus qu’on ne l’imagine. C’est un vrai signal d’alarme pour notre société.
Et pour nous, les aînés, il y a peut-être une petite leçon d’optimisme à en tirer. Contrairement aux idées reçues, la science nous montre que le bonheur a tendance à augmenter avec les années. Vieillir, finalement, ça a du bon pour le moral !
Selon la source : slate.fr