Découverte d’un sous-marin de la Première Guerre mondiale disparu depuis un siècle
Auteur: Adam David
Il y a des histoires qui dorment au fond de l’océan, attendant qu’une lumière vienne les tirer de l’oubli. Celle de l’USS F-1 est l’une d’entre elles. Disparu dans les eaux californiennes en 1917 avec 19 marins à son bord, ce sous-marin américain vient tout juste de livrer ses secrets, plus d’un siècle après son naufrage, grâce à une mission d’exploration d’une précision inouïe.
Le drame de 1917, une collision en plein brouillard
On est le 17 décembre 1917. Au large de San Diego, l’US Navy teste ses nouvelles armes sous-marines, une technologie encore balbutiante. L’USS F-1 manœuvre aux côtés de deux autres submersibles, les F-2 et F-3, quand une nappe de brouillard épaisse engloutit la flottille. Le drame se noue en quelques secondes : l’USS F-3 percute violemment le flanc du F-1. La coque se déchire. Le sous-marin coule à pic en moins de dix secondes, emportant la majorité de son équipage.
Sur les vingt-quatre hommes à bord, seuls cinq survivent au choc et à la noyade. Pour les autres, l’océan devient leur sépulture, à une profondeur de plus de 400 mètres. Un mur infranchissable pour les moyens de l’époque.
Un siècle d'attente et une découverte fortuite
Le fracas de la Grande Guerre a vite étouffé l’écho de cette tragédie locale. L’USS F-1 est tombé dans un relatif oubli, une cicatrice douloureuse pour les familles des victimes, mais une simple ligne dans les archives de la marine. Il faudra attendre 1972 pour qu’un véhicule télécommandé, lors d’une mission sans rapport, bute par hasard sur sa carcasse. Une brève lueur d’espoir, vite éteinte, car aucune exploration n’est alors engagée.
Le sous-marin a donc continué de reposer dans l’obscurité, gardien silencieux de son histoire. Jusqu’à ce printemps.
La technologie perce le secret des abysses
C’est une expédition du prestigieux Woods Hole Oceanographic Institution qui a finalement changé la donne. À bord du navire Atlantis, une équipe de scientifiques a déployé un arsenal technologique de pointe. Le submersible habité *Alvin* et le drone autonome *Sentry* ont littéralement dansé autour de l’épave pendant plusieurs jours, capturant des milliers d’images en très haute résolution.
Assemblées par la photographe océanographe Zoë Daheron, ces photos ont donné naissance à un modèle 3D d’une clarté stupéfiante. On peut y observer la tourelle de commandement, les écoutilles, et surtout, la brèche béante laissée par la collision fatale. C’est un peu comme si le temps s’était figé il y a 108 ans.
Bien plus qu'une simple épave, un devoir de mémoire
Mais cette mission va bien au-delà de la prouesse technique. Pour Brad Krueger, archéologue au Naval History and Heritage Command, descendre à bord d’*Alvin* pour voir l’épave de ses propres yeux fut un choc. L’équipe a approché le site avec un respect infini, sans jamais toucher la structure, considérée comme un sanctuaire militaire.
À la surface, un hommage a été rendu aux 19 disparus. Leurs noms ont été lus un à un, suivis par le son d’une cloche qui a résonné à travers le silence de l’océan. Un nom, un coup de cloche. Dix-neuf fois. Une manière de dire qu’on ne les avait pas oubliés.
une mémoire numérique pour l'éternité
Cette expédition est un carrefour entre la science, l’histoire et l’émotion. Elle a non seulement permis de documenter un pan méconnu de l’histoire navale, mais aussi de former une nouvelle génération de chercheurs aux technologies d’exploration des grands fonds. Au passage, les chercheurs ont aussi identifié l’épave d’un avion torpilleur de la Seconde Guerre mondiale, gisant non loin de là.
L’USS F-1 ne remontera jamais. Mais grâce à une poignée de scientifiques et à leurs robots, son histoire, elle, a refait surface. Elle est désormais conservée dans des archives numériques, accessible à tous, pour que la mémoire de ces hommes ne sombre plus jamais dans l’oubli.
Selon la source : science-et-vie.com