Santé : plusieurs traitements contre l’Alzheimer, l’obésité et le cholestérol ne sont pas remboursés en France
Auteur: Adam David
Un espoir immense, puis la douche froide. C’est le sentiment qui domine chez de nombreux patients français atteints d’Alzheimer, d’obésité sévère ou de formes rares de la maladie de Charcot. Des traitements jugés révolutionnaires à l’étranger peinent à franchir le cap du remboursement en France, créant une fracture entre la promesse scientifique et la réalité administrative. Au cœur de la polémique, la Haute Autorité de Santé (HAS), accusée de frilosité, se défend de priver les malades d’un avenir meilleur.
Leqembi, le traitement d'Alzheimer qui cristallise les tensions
Le cas du Leqembi est emblématique. Ce médicament, qui promet de ralentir le déclin cognitif lié à Alzheimer, a vu sa demande de remboursement anticipé sèchement refusée. Pour les associations de patients, c’est un « espoir envolé ». Mais pour le professeur Lionel Collet, président de la HAS, la décision est pragmatique. Il explique que « le ralentissement du déclin cognitif est trop faible pour être pertinent », surtout mis en balance avec des effets secondaires potentiellement graves, comme des œdèmes ou des hémorragies cérébrales. La prudence avant tout, donc.
La doctrine de la HAS : protéger, quitte à frustrer ?
Alors, la HAS, ange gardien ou fossoyeur d’espoirs ? Pour justifier ses arbitrages, l’autorité met en avant un critère clé : la « présomption d’innovation ». En clair, pour qu’un médicament bénéficie d’un accès précoce et soit pris en charge par la collectivité avant même la fin de toutes les évaluations, il doit apporter un changement majeur, une vraie rupture pour les patients. Une exigence que le Leqembi, selon elle, ne remplit pas.
Le Pr Collet tient toutefois à nuancer : un refus d’accès précoce ne signifie pas une condamnation définitive. La procédure classique de remboursement suit son cours pour le traitement anti-Alzheimer, et une décision finale est attendue à l’automne. Un bien maigre lot de consolation pour ceux qui attendent.
Obésité, cholestérol, maladies rares : une même logique de refus
Mais le malentendu ne s’arrête pas là. D’autres molécules très médiatisées se sont heurtées au même mur. C’est le cas du Wegovy et du Mounjaro contre l’obésité, ou encore du Praluent et du Repatha, des anti-cholestérol puissants. Plus récemment, le refus opposé au Qalsody, destiné à une forme génétique de la sclérose latérale amyotrophique (maladie de Charcot), a été vécu comme un choc. La raison invoquée ? Des données jugées encore insuffisantes pour prouver un bénéfice clinique solide. Une décision difficile à entendre quand on se bat contre une maladie incurable.
Derrière la science, la question de l'argent public
Car derrière les arguments scientifiques, une autre réalité se profile : celle de l’argent. Tant qu’un prix n’est pas fixé au terme d’une négociation entre l’État et le laboratoire, ce dernier est libre de fixer son tarif. Accorder un accès précoce, c’est accepter de payer le prix fort avec l’argent public, sans garantie totale sur le service rendu. La mission de la HAS, comme le rappelle son président, est donc aussi de s’assurer « que chaque euro investi bénéficie réellement aux malades ». Un rôle de gardien du temple qui la place inévitablement en première ligne face à l’impatience des industriels et des patients.
la France, une forteresse sanitaire en décalage ?
Cette ligne de fermeté, assumée, vise à garantir la sécurité des patients et la pérennité de notre système de santé solidaire. Mais elle pose une question de fond : à force de prudence, la France ne risque-t-elle pas de décourager l’innovation sur son sol et de se couper des thérapies de demain ? Entre la protection des malades contre des promesses excessives et le risque de les priver d’une chance, même infime, la crête est étroite. Et l’équilibre, de plus en plus difficile à tenir.
Selon la source : passeportsante.net