Patagonie : des paléontologues découvrent un nouveau mégaraptor, retrouvé avec les restes de sa dernière proie coincés entre les dents
Auteur: Adam David
C’est une scène figée dans la roche, vieille de près de 70 millions d’années. En Patagonie, des chercheurs argentins viennent de mettre au jour une nouvelle espèce de mégaraptor, un prédateur redoutable qui arpentait l’Amérique du Sud juste avant la grande extinction. La découverte est exceptionnelle : l’animal a été retrouvé avec les restes de sa dernière proie encore coincés dans la mâchoire.
Un prédateur au sommet de la chaîne
On les appelle les mégaraptors. Loin des T-Rex massifs d’Amérique du Nord, ces théropodes du Crétacé étaient des chasseurs plus élancés, presque graciles, mais tout aussi mortels. Ils se distinguaient par un crâne allongé et, surtout, par de longs bras terminés par des griffes immenses et acérées. Ce nouveau venu, baptisé Joaquinraptor casali, confirme leur statut de superprédateurs dans l’hémisphère sud, juste avant que l’astéroïde de Chicxulub ne vienne tirer le rideau.
« Ce dinosaure carnivore était certainement l’un des principaux prédateurs de son écosystème », confirme Lucio Ibiricu, auteur principal de l’étude menée par l’Institut patagonien de géologie et de paléontologie. Il s’agit de l’un des tout derniers représentants de sa lignée, un témoin des derniers instants du règne des dinosaures.
Une découverte qui comble un vide
Pourtant, malgré leur règne, le portrait de famille des mégaraptors restait flou. La faute à des fossiles souvent fragmentaires, qui laissaient les scientifiques sur leur faim. La découverte de Joaquinraptor dans la formation de Lago Colhué Huapi, au cœur de la Patagonie, change la donne. L’équipe a exhumé un squelette remarquablement bien conservé, fruit de trois campagnes de fouilles successives.
« Ce fossile éclaire la phase finale de leur évolution en Amérique du Sud, avant l’extinction massive », souligne Darla Zelenitsky, paléontologue à l’Université de Calgary, qui n’a pas participé aux travaux. C’est une pièce manquante du puzzle, qui nous aide à comprendre comment vivaient et évoluaient ces créatures énigmatiques.
Le portrait-robot d'un chasseur
Mais qui était vraiment Joaquinraptor ? Les analyses nous dressent le portrait d’un animal impressionnant : un peu plus de sept mètres de long pour environ une tonne. L’étude de ses os révèle qu’il avait au moins 19 ans à sa mort, un âge respectable. « Il s’agissait d’un individu sexuellement mature, mais il aurait pu croître encore davantage », précise Lucio Ibiricu. Le paysage qu’il habitait n’avait rien à voir avec la Patagonie sèche d’aujourd’hui ; c’était alors une plaine inondable, chaude et humide, non loin de la mer.
Pris la mâchoire dans le sac
Le détail le plus fascinant de cette découverte, c’est sans doute ce petit os qui n’appartient pas au dinosaure. Coincé entre ses mâchoires, les paléontologues ont identifié un humérus de crocodyliforme, un lointain cousin des crocodiles actuels. C’est une preuve directe, quasi photographique, de son régime alimentaire. Il ne se contentait pas de petites proies ; il s’attaquait à d’autres carnivores.
« Il a été trouvé entre ses mâchoires, ce qui donne une idée des sources de nourriture possibles pour Joaquinraptor en particulier et pour les mégaraptoridés en général », s’enthousiasme le chercheur. Cette trouvaille confirme sans l’ombre d’un doute sa place au sommet de la pyramide alimentaire locale.
une nouvelle page de l'histoire
Au-delà de l’anecdote de son dernier repas, Joaquinraptor casali est une pièce cruciale du puzzle. Si le T-Rex était le poids lourd d’Amérique du Nord, écrasant ses proies avec sa mâchoire surpuissante, le mégaraptor était le bretteur agile du Sud. Ses armes ? La vitesse, l’agilité, et des griffes disproportionnées, semblables à des faucilles, parfaites pour lacérer et démembrer.
Comme le souligne Rubén Martínez, coauteur de l’étude, cette découverte permet de nouvelles comparaisons et affine notre compréhension de l’arbre généalogique de ces prédateurs. Chaque fossile de ce type est une fenêtre sur un monde sur le point de disparaître, nous rappelant à quel point la vie sur Terre peut être à la fois féroce et fragile.
Selon la source : trustmyscience.com