« Il ne respirait plus, il était bleu » : un bébé victime du syndrome du bébé secoué, sa mère condamnée à 5 ans
Auteur: Adam David
C’est une peine qui sonne presque dérisoire face à une vie abîmée. Ce jeudi 2 octobre, la cour criminelle de l’Oise a condamné Charlotte C., 30 ans, à cinq ans de prison avec sursis. Les faits qui lui sont reprochés, d’une violence inouïe, ont laissé son fils, aujourd’hui âgé de 10 ans, avec une « infirmité permanente ». L’histoire d’un drame familial où un geste, un seul, a tout fait basculer.
Décembre 2015, la première alerte
Tout commence le 23 décembre 2015. Dans leur domicile de Méru, le petit Mathéo (prénom d’emprunt), alors nourrisson, pleure, s’agite, jette son biberon. La suite, c’est sa mère qui la raconte à la barre, la voix tremblante : « D’un seul coup, il n’a plus pleuré. Je l’ai pris par les bras. Il était bleu, il ne respirait plus. » Prise de panique, elle dit l’avoir secoué pour le « réveiller ». Conduit à l’hôpital, le bébé ne bénéficiera pas des examens qui auraient pu, peut-être, révéler la gravité de son état. Ses parents signeront une décharge pour « passer Noël en famille ». Une décision aux conséquences tragiques.
Quand le diagnostic tombe, brutal et sans appel
Quelques semaines plus tard, le 3 février 2016, le cauchemar se répète. Après une nouvelle nuit de pleurs, le nourrisson tétanise. Cette fois, le corps médical ne passe pas à côté. Le diagnostic est un coup de massue : « traumatisme crânien par secouement ». Les examens révèlent un hématome sous-dural, des saignements « frais et anciens », des hémorragies rétiniennes multiples… Des termes cliniques qui décrivent l’horreur. Transféré en urgence à l’hôpital Necker, puis à Saint-Maurice, le petit garçon sera ensuite placé en famille d’accueil, loin de ses parents, jusqu’en 2023.
Une défense sur les mots, face à la réalité des blessures
Face à ses juges, Charlotte C. a tenté de minimiser. Elle reconnaît le premier épisode, mais nie le second. « J’ai peut-être été brusque avec mon bébé, mais jamais violente », a-t-elle affirmé. Elle s’est même lancée dans une distinction sémantique troublante, après avoir visionné des vidéos de prévention projetées à l’audience : « Je n’ai pas fait ça. Une secousse, c’est une secousse mais pas un secouement ». Une manière de se défendre qui, pour l’accusation, ne fait que traduire son refus d’admettre la réalité.
Le dilemme de la cour et le poids du déni
Pour le ministère public, cette ligne de défense ne tient pas. « Plus le temps passe, plus madame est dans le déni. Elle n’a toujours pas pris conscience des dommages causés à l’enfant », a martelé le procureur, qui avait requis six ans de prison ferme avec mandat de dépôt. La cour de Beauvais a finalement opté pour une peine plus clémente, cinq ans entièrement assortis du sursis. À l’énoncé du verdict, la mère de famille s’est effondrée en larmes, reconnue coupable de « violences volontaires suivies de mutilation sur mineur ».
Mathéo, une enfance marquée par un handicap invisible
Aujourd’hui, près de dix ans après les faits, Mathéo vit avec les cicatrices indélébiles de ses premiers mois de vie. Atrophie du cerveau, troubles cognitifs, crises de violence… Son handicap est qualifié d’« invisible », mais il pèse lourdement sur chaque instant de son quotidien, sur son apprentissage, sur ses relations aux autres. C’est le destin brisé d’un enfant qui portera toute sa vie le fardeau d’un geste d’une violence que sa propre mère peine encore à nommer.
Un drame qui interroge
Au-delà du cas de Charlotte C., ce drame rappelle une fois de plus la terrible réalité du syndrome du bébé secoué. Un geste souvent commis dans un moment d’épuisement, d’exaspération, par un adulte dépassé par les pleurs d’un nourrisson. Un geste dont les conséquences, elles, sont absolues et irréversibles. Et qui laisse une question en suspens : comment mieux accompagner les parents au bord du gouffre, avant que l’irréparable ne soit commis ?
Selon la source : aufeminin.com