Des scientifiques découvrent une protéine qui perce littéralement des trous dans le cœur après une crise cardiaque.
Auteur: Mathieu Gagnon
On sait tous qu’une crise cardiaque, c’est grave. C’est quand une artère du cœur se bouche. Mais ce qu’on sait moins, c’est que le danger ne s’arrête pas là. Juste après, dans les heures qui suivent, notre propre corps peut, sans le vouloir, aggraver les choses. Des chercheurs viennent de faire une découverte assez incroyable : une protéine, fabriquée par nos propres cellules de défense, s’attaque directement à notre cœur et peut provoquer des troubles du rythme mortels. C’est un peu comme si les pompiers, venus éteindre un incendie, se mettaient soudainement à percer des trous dans les murs de la maison.
Le coupable : une protéine qui fait des trous
Alors, qui est ce traître ? Les scientifiques de l’Hôpital Général du Massachusetts lui ont donné un nom : Resistin-like molecule gamma, ou pour faire plus simple, RELMy. Cette protéine est produite par les neutrophiles, qui sont une sorte de globule blanc. Normalement, ces cellules sont nos soldats, elles combattent les infections. Mais après une crise cardiaque, elles se précipitent vers le cœur abîmé et certaines d’entre elles se mettent à fabriquer cette fameuse protéine RELMy.
Et que fait-elle ? Eh bien, comme l’explique l’étude publiée dans la prestigieuse revue Science, elle s’attaque aux cellules du muscle cardiaque et, littéralement, elle y perce des trous. C’est cette action directe et agressive qui est au cœur du problème.
Le chaos dans le rythme du cœur
Imaginez que votre cœur a un circuit électrique très précis pour battre régulièrement. Maintenant, imaginez que quelqu’un vienne faire des trous dans les fils de ce circuit. C’est exactement ce qui se passe. Ces trous dans les cellules cardiaques créent un véritable court-circuit. Le rythme normal est perdu et le cœur peut s’emballer de façon désordonnée et dangereuse. C’est ce qu’on appelle une arythmie.
Les deux plus redoutables sont la tachycardie ventriculaire (TV), où le cœur bat très vite mais de façon coordonnée, et la fibrillation ventriculaire (FV), qui est encore pire : le cœur bat de manière totalement chaotique et ne pompe plus le sang. Ces deux arythmies peuvent entraîner la mort en quelques minutes si rien n’est fait. Et tout ça se joue principalement dans les 48 heures suivant la crise cardiaque, pile au moment où notre armée de globules blancs arrive en force.
La preuve par l'expérience
Pour être sûrs de leur coup, les chercheurs ont mené une véritable enquête. Ils ont d’abord analysé des données génétiques très précises sur des souris ayant eu une crise cardiaque. C’est là qu’ils ont vu que le gène responsable de la fabrication de la protéine RELMy était hyperactif chez les neutrophiles dans la zone du cœur endommagée. Ils ont aussi trouvé un gène très similaire chez les humains, qui se comporte de la même façon.
Mais la preuve la plus frappante est venue d’une expérience. Ils ont utilisé des souris génétiquement modifiées pour que leurs neutrophiles ne puissent plus fabriquer cette protéine. Le résultat est sans appel : chez ces souris, le nombre d’arythmies graves après une crise cardiaque a été réduit de 12 fois. C’est énorme. C’est la confirmation que cette protéine est bien un acteur majeur du drame qui se joue après un infarctus.
Vers de nouveaux traitements plus ciblés
Qu’est-ce que cette découverte change pour nous, concrètement ? Beaucoup de choses. Jusqu’à présent, pour soigner une crise cardiaque, on se concentre sur le fait de déboucher l’artère au plus vite pour que le sang circule à nouveau. C’est essentiel, bien sûr. Mais cette étude nous dit qu’il y a une deuxième bataille à mener : celle contre cette réaction immunitaire néfaste.
Cela ouvre la porte à de tout nouveaux médicaments. Au lieu de calmer tout le système de défense du corps (ce qui peut avoir des effets secondaires indésirables), on pourrait imaginer un traitement qui ne cible que cette protéine RELMy, pour la neutraliser. On garderait ainsi les bons côtés de la réponse immunitaire tout en bloquant son action destructrice sur le cœur. C’est une approche beaucoup plus fine et intelligente.
Et maintenant, que va-t-il se passer ?
Le chemin est encore long, bien sûr. La prochaine étape pour les chercheurs est de trouver une molécule capable de bloquer efficacement cette protéine dangereuse. Ils vont d’abord la tester sur des souris, pour voir si cela réduit bien les arythmies et peut-être même la taille de la zone endommagée du cœur. Si les résultats sont concluants, des essais sur les humains pourraient un jour être envisagés.
Il faudra aussi confirmer que cette protéine joue un rôle aussi important chez l’homme que chez la souris. Mais c’est une piste de recherche extrêmement prometteuse. Comprendre l’ennemi est toujours la première étape pour le vaincre.
Conclusion : Un nouvel espoir pour le cœur
En résumé, cette découverte est une avancée majeure. Elle nous montre que dans la bataille pour la survie après une crise cardiaque, l’ennemi peut aussi venir de l’intérieur. En identifiant cette protéine « perforeuse de cœur », la science a mis le doigt sur un coupable que l’on ne soupçonnait pas. Même si un médicament n’est pas pour demain, c’est un immense espoir dans la lutte pour prévenir la mort subite, la complication la plus terrible de l’infarctus. Une nouvelle page de la cardiologie est peut-être en train de s’écrire.
Selon la source : scitechdaily.com