Selon une étude scientifique, 4 schémas cérébraux clés seraient la preuve de la conscience humaine.
Auteur: Mathieu Gagnon
On s’est tous déjà posé la question, en regardant un nouveau-né dormir paisiblement : à quoi peut-il bien penser ? Est-ce que sa petite tête est une page blanche, comme le disait le philosophe John Locke il y a des siècles, attendant que nous, les adultes, y écrivions une histoire ? Ou bien, est-ce qu’une petite lumière de conscience brillait déjà avant même sa naissance ?
C’est une colle, évidemment. Les bébés ne peuvent pas nous raconter leurs secrets. Mais des scientifiques ont récemment proposé une nouvelle manière d’aborder cette question fascinante. Ils ne cherchent plus à deviner, mais à observer des signes concrets dans le cerveau des tout-petits.
Quatre indices pour traquer la conscience
Imaginez des détectives du cerveau. C’est un peu le travail de Timothy Bayne, un professeur de philosophie, et de Joel Frohlich, un spécialiste du cerveau. Dans une étude publiée en octobre 2024, ils ont eu une idée : et si on cherchait chez les bébés les mêmes signes de conscience que l’on observe chez les adultes ?
Ils ont identifié quatre schémas cérébraux bien précis qui, chez nous, montrent que nous sommes conscients de ce qui nous entoure. L’idée est simple : si on retrouve ces mêmes indices chez les nourrissons, et même avant leur naissance, cela pourrait vouloir dire que la conscience est là, bien plus tôt qu’on ne le pense.
Le réseau du « moi » : une première connexion interne
Le premier indice est ce que les scientifiques appellent le « réseau du mode par défaut ». C’est un peu le réseau de notre conscience de soi, de nos pensées intérieures. Quand vous rêvassez, que vous pensez à vous-même, c’est ce réseau qui s’active dans votre cerveau. Eh bien, les chercheurs ont découvert des traces de ce réseau, encore très simples, chez les nouveau-nés. Juste après la naissance, il commence déjà à se connecter à d’autres zones du cerveau liées à l’attention. C’est un peu comme si les fondations de la maison de la conscience étaient déjà posées.
L'attention : une première lueur d'éveil
Le deuxième indice, c’est tout simplement l’attention. Pour être conscient de quelque chose, il faut pouvoir se concentrer dessus, même un tout petit peu. Il existe un test amusant pour ça, appelé « l’effet de clignement attentionnel ». C’est quand on vous montre deux images très vite l’une après l’autre : vous avez souvent du mal à voir la deuxième. C’est un signe que votre attention est occupée.
Les chercheurs ont remarqué que les bébés, dès l’âge de cinq mois, montrent aussi cet effet, mais en beaucoup plus long. Leur attention est plus lente, c’est sûr, mais elle est bien là. C’est une preuve que leur conscience, même si elle est en plein développement, existe déjà.
Quand tous les sens se parlent
Le troisième signe est la capacité à mélanger les informations de nos différents sens : la vue, l’ouïe, le toucher. C’est ce qui nous permet de comprendre le monde comme un tout. Pour le tester, il y a « l’effet McGurk » : on vous montre une vidéo de quelqu’un qui prononce « ga » mais on vous fait entendre le son « ba ». Étonnamment, votre cerveau entendra un troisième son, souvent « da ». Il a fusionné ce qu’il a vu et entendu.
Cette illusion, qui est un signe de traitement conscient chez l’adulte, fonctionne aussi sur les bébés ! Des études ont montré que dès quatre ou cinq mois, les nourrissons ne sont pas dupes et réagissent à cette fusion des sens. Leur cerveau fait déjà le lien entre ce qu’il voit et ce qu’il entend.
La surprise : le signal cérébral qui en dit long
Le dernier indice est peut-être le plus troublant. Il s’agit de la réaction du cerveau à l’inattendu. Quand un adulte remarque quelque chose de surprenant, son cerveau produit une onde électrique spécifique, appelée l’onde P300. C’est une signature claire de la reconnaissance consciente d’un événement.
Et tenez-vous bien : une réaction très similaire à cette onde a été observée non seulement chez les nouveau-nés, mais aussi chez des fœtus de 35 semaines dans le ventre de leur mère. C’est l’un des indices les plus forts suggérant qu’une forme de conscience pourrait exister avant même que bébé ne pousse son premier cri.
Conclusion : Alors, conscient ou pas ? Le chemin est encore long
Avec tous ces indices, on pourrait croire que l’affaire est dans le sac. Mais les scientifiques, comme Timothy Bayne, nous appellent à la prudence. « Je dirais que c’est suggestif, mais rien de plus », confie-t-il. Il faut se rappeler que la conscience d’un bébé est probablement très différente de la nôtre. Même s’ils montrent ces signes, cela ne veut pas dire qu’ils vivent les choses comme nous.
Le mystère de la première étincelle de conscience humaine reste donc entier. Chaque indice est une petite pièce du puzzle, mais il en manque encore beaucoup. Pour l’instant, la seule certitude est que la vie intérieure d’un bébé est bien plus riche et complexe qu’une simple « page blanche ». Et c’est déjà une très belle découverte.
Selon la source : popularmechanics.com