Le secret dans nos assiettes : comment choisir le bon riz peut aider notre planète
Auteur: Mathieu Gagnon
Le coupable n'est pas toujours l'engrais
Pendant longtemps, on a cru que la quantité d’engrais était le principal problème. Mais une équipe de chercheurs menée par Conor Walthall de l’Université de Cranfield a tout remis en question. Ils ont analysé les données de 42 essais différents, sur 180 variétés de riz à travers le monde. Leur découverte est fondamentale : pour le méthane, un gaz à effet de serre très puissant, c’est la génétique du riz, bien plus que l’engrais, qui détermine la quantité de gaz relâchée.
En d’autres termes, certaines variétés de riz sont naturellement plus « propres » que d’autres. C’est une nouvelle incroyable. Bien sûr, pour un autre gaz, l’oxyde nitreux, c’est bien l’excès d’engrais azoté qui reste le principal responsable. Mais pour le méthane, la clé se trouve dans les gènes de la plante elle-même.
Comment les racines du riz libèrent-elles du gaz ?
Pour comprendre, il faut regarder sous la terre, au niveau des racines. Les plants de riz ont une particularité : leurs racines contiennent des tissus remplis d’air, un peu comme de minuscules pailles. On appelle ça des aérenchymes. Ces « pailles » permettent aux gaz de circuler entre la terre et l’air. C’est par là que le méthane, produit par des microbes dans le sol inondé des rizières, s’échappe dans l’atmosphère.
Ce qu’on a découvert, c’est que la taille de ces pailles et les substances que les racines libèrent varient beaucoup d’une variété de riz à l’autre. Et ça change tout ! Il faut savoir que le méthane est un sacré problème : sur 20 ans, il réchauffe l’atmosphère environ 81 fois plus que le dioxyde de carbone (CO2). Réduire ces émissions, même si elles semblent petites en quantité, a donc un effet gigantesque.
Créer un riz plus 'propre' pour l'avenir
Maintenant qu’on sait ça, que fait-on ? L’idée est de créer, ou plutôt de sélectionner, des variétés de riz qui sont à la fois productives et qui émettent peu de méthane. C’est là que la technologie moderne nous aide. Grâce à des outils comme la « sélection génomique », les scientifiques peuvent analyser l’ADN d’un plant de riz et prédire s’il sera un bon candidat, sans même avoir besoin de le cultiver pendant des années.
En gros, on cherche le riz parfait : celui qui a de plus petites « pailles » dans ses racines et qui utilise l’engrais efficacement, pour qu’il pousse bien sans polluer. C’est un travail de patience, mais les banques de semences publiques et les instituts agricoles du monde entier pourraient bientôt intégrer ces critères dans leurs programmes de sélection.
L'azote, un équilibre délicat à trouver
N’oublions pas l’autre gaz, l’oxyde nitreux. Lui, il est directement lié à l’engrais azoté. Quand on en met trop, plus que ce que la plante peut absorber, le surplus s’échappe dans l’air sous forme de ce gaz très polluant. C’est un vrai gaspillage, pour le portefeuille de l’agriculteur et pour la planète.
La solution ? D’une part, appliquer la juste dose d’engrais, au bon moment. D’autre part, là encore, la génétique peut aider. En sélectionnant des variétés de riz qui sont plus efficaces pour transformer l’engrais en grains, on peut obtenir la même récolte avec moins d’engrais. Et donc, moins de pollution. C’est gagnant-gagnant.
Du champ à la politique climatique mondiale
Cette approche est vraiment intéressante car elle pourrait aider les pays à atteindre leurs objectifs climatiques, comme ceux de l’Accord de Paris, sans demander aux agriculteurs de changer radicalement leurs habitudes. C’est plus simple de leur proposer une nouvelle semence que de leur demander de refaire tout leur système d’irrigation.
Mieux encore, des programmes financiers commencent à voir le jour pour récompenser les agriculteurs qui font des efforts pour réduire leurs émissions. Cultiver un riz « faible en méthane » pourrait donc, à l’avenir, leur rapporter de l’argent via des crédits carbone ou des certifications de durabilité. Ça rend le changement concret et attractif.
Conclusion : Un espoir immense, mais encore du chemin à faire
Bien sûr, il reste du travail. La plupart des études ont été faites en Asie, dans des rizières inondées. Il faut vérifier que ça marche aussi dans d’autres conditions. Mais le principe est là. Et ce qui est valable pour le riz pourrait l’être demain pour le blé, le maïs… C’est peut-être le début d’une agriculture plus intelligente, qui nourrit les hommes tout en prenant soin de notre maison commune.
Selon la source : earth.com