ChatGPT face au trading : une expérience dévoile les véritables limites de l’intelligence artificielle
Auteur: Adam David
Et si une intelligence artificielle, accessible à tous, pouvait faire mieux qu’un trader chevronné ? C’est la question, un peu folle, que s’est posée un investisseur américain en confiant une petite somme d’argent à ChatGPT. Le résultat, bien que mené sur une courte période, a de quoi laisser songeur et interroge la frontière, de plus en plus poreuse, entre l’intuition humaine et la froide logique de l’algorithme.
Le protocole d'une expérience hors norme
L’homme derrière cette initiative, Nathan Smith, a fixé un cadre simple mais rigoureux. En juin, il a alloué 100 dollars à un portefeuille et s’est engagé à suivre à la lettre les recommandations de ChatGPT. Son terrain de jeu : les micro-capitalisations, ces petites entreprises volatiles souvent délaissées par les grands fonds.
Chaque jour, il nourrissait le chatbot avec les données de son portefeuille, et l’IA lui retournait ses ordres : acheter, vendre, conserver. Une fois par semaine, une analyse plus poussée était demandée. Loin des boîtes noires des fonds d’investissement, tout est public : les décisions sont sur GitHub, les bilans sur Substack. Nathan n’était plus qu’un exécutant, la stratégie était entièrement déléguée à la machine.
Des résultats qui laissent pantois
Au bout de cinq semaines, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Le portefeuille piloté par l’IA affichait une progression de 20,1 %. Un pic à plus de 25 % avait même été atteint avant une légère correction. Pendant ce temps, le très respecté indice S&P 500, qui suit les 500 plus grandes entreprises américaines, peinait à atteindre les 3 % de croissance.
La comparaison est brutale. ChatGPT a non seulement surclassé le marché général, mais aussi des indices spécialisés dans les petites capitalisations comme le Russell 2000. Difficile de ne pas y voir autre chose qu’un simple coup de chance.
Dans la tête de l'algorithme
Mais comment le chatbot a-t-il procédé ? Loin d’un pari à l’aveugle, l’IA a semblé développer une forme de logique. Elle a par exemple misé sur Actuate Therapeutics, qui a connu une forte hausse, ou sur Abeona Therapeutics, juste avant que l’un de ses produits ne reçoive le feu vert des autorités sanitaires américaines. Une anticipation quasi parfaite.
À l’inverse, elle n’a pas hésité à se délester de positions jugées trop spéculatives, comme l’action Azitra. On devine une stratégie d’ajustement constant, basée sur l’analyse des « catalyseurs » à venir, qu’ils soient financiers ou réglementaires. Une lecture analytique que beaucoup de traders humains s’efforcent d’appliquer.
Le revers de la médaille : un enthousiasme à modérer
Faut-il pour autant crier au génie et confier toutes ses économies à un programme informatique ? Certainement pas. L’expérience de Nathan Smith, aussi fascinante soit-elle, comporte des limites évidentes. Cinq semaines, c’est bien trop court pour établir une tendance fiable en finance. De plus, l’humain reste indispensable pour nourrir la machine en informations et exécuter les ordres.
Cette performance rappelle d’ailleurs les conclusions d’une étude allemande de 2023, qui montrait en simulation que les IA pouvaient repérer des actions rentables. Mais comme le prévenait alors Alejandro Lopez-Lira, professeur de finance, « l’euphorie des simulations s’effondre souvent au contact du réel ». Si tout le monde se mettait à utiliser la même stratégie, l’avantage s’éroderait instantanément.
Vers un nouveau copilote financier ?
Au fond, cette expérience ne prouve pas qu’une IA peut « battre » le marché de manière autonome et durable. Elle illustre plutôt l’émergence d’un outil d’un nouveau genre : une intelligence assistée. Un copilote capable de traiter une masse d’informations et de proposer une lecture structurée, débarrassée de certains biais émotionnels humains.
Le rôle de l’investisseur ne disparaît pas ; il se transforme. Il devient celui qui fixe le cadre, qui valide les orientations et qui garde la main sur la décision finale. Une chose est sûre : le rapport de force entre l’intuition et l’algorithme est en train d’être profondément redéfini, bien au-delà des salles de marché.
Selon la source : science-et-vie.com