Trump réclame 230 millions de dollars à la justice américaine, affirmant que ses droits ont été violés
Auteur: Simon Kabbaj
C’est une histoire qui pourrait sembler tout droit sortie d’une série politique, et pourtant, elle est bien réelle. Le président Donald Trump réclamerait la somme colossale de 230 millions de dollars au Département de la Justice (DOJ) en compensation des enquêtes fédérales menées contre lui. L’affaire prend une tournure encore plus surréaliste quand on découvre qui pourrait avoir le dernier mot sur ce paiement : Todd Blanche, son propre ex-avocat, aujourd’hui numéro deux du même ministère de la Justice. Un conflit d’intérêts qui atteint des sommets.
Les deux plaintes au cœur de la demande
Cette demande de dédommagement, révélée par le New York Times, ne sort pas de nulle part. Elle repose sur deux plaintes distinctes, déposées via un ‘processus de réclamation administrative’.
La première, soumise en 2023, concerne l’enquête du FBI sur l’ingérence russe dans l’élection de 2016, que Trump a toujours qualifiée de ‘chasse aux sorcières’.
La seconde, déposée en 2024, vise directement la spectaculaire perquisition du FBI dans sa résidence de Mar-a-Lago en 2022, dans l’affaire des documents classifiés. Trump accuse le FBI d’avoir violé sa vie privée lors de ce raid qu’il juge ‘illégal’.
L'incroyable conflit d'intérêts : l'ex-avocat devenu juge et partie
C’est ici que l’histoire bascule dans l’absurde. La décision finale d’approuver ou non un tel paiement pourrait revenir à un homme que Trump connaît très bien : Todd Blanche. Avant de devenir le procureur général adjoint, soit le numéro deux du ministère de la Justice, Blanche était l’avocat personnel de Donald Trump. Et pas pour n’importe quelles affaires : il l’a défendu dans son procès pénal à New York, mais aussi dans les deux affaires fédérales pour lesquelles Trump réclame aujourd’hui de l’argent : celle des documents classifiés et celle de l’ingérence électorale. L’avocat qui défendait Trump contre le DOJ pourrait donc, en tant que membre du DOJ, décider de lui accorder des millions de dollars de dédommagement. Un conflit d’intérêts monumental.
La réaction de Trump : « Ils me doivent probablement beaucoup d'argent »
Interrogé sur cette demande à la Maison-Blanche, Donald Trump n’a pas semblé perturbé par la situation. ‘Eh bien, je suppose qu’ils me doivent probablement beaucoup d’argent’, a-t-il déclaré aux journalistes. Fidèle à lui-même, il a immédiatement enchaîné sur ce qu’il ferait de cette somme : ‘Mais si je reçois de l’argent de notre pays, je ferai quelque chose de bien avec, comme le donner à des œuvres de charité ou le donner à la Maison Blanche pendant que nous la restaurons’. Une manière de se présenter en philanthrope, tout en réclamant une somme colossale à l’État.
La mécanique juridique derrière la demande
Techniquement, les plaintes de Trump ne sont pas encore des procès. Elles ont été déposées via un formulaire administratif, le ‘Standard Form 95‘. C’est une étape qui peut précéder une action en justice si aucun accord n’est trouvé. Mais c’est là qu’un détail crucial entre en jeu. Selon le manuel du Département de la Justice, tout règlement de plainte dépassant 4 millions de dollars doit être approuvé par le… procureur général adjoint. Soit, potentiellement, Todd Blanche. De plus, le DOJ n’a pas l’obligation de rendre publics ces règlements administratifs. Le paiement pourrait donc se faire dans la plus grande discrétion.
Le tollé chez les démocrates : « Sa tirelire personnelle »
Sans surprise, la nouvelle a provoqué un tollé chez les démocrates, qui accusent Trump d’utiliser sa position pour s’enrichir personnellement. Ken Martin, le président du Comité National Démocrate, a déclaré : ‘Donald Trump n’aidera pas les Américains, mais il s’aidera certainement lui-même. Il a transformé le contribuable en sa tirelire personnelle’. Le sénateur Ruben Gallego a été encore plus direct sur X : ‘@POTUS ordonne au gouvernement qu’il dirige de le payer. Au moins, dans d’autres pays, les dirigeants essaient de cacher quand ils volent l’argent des citoyens’.
Conclusion : une présidence qui brouille toutes les lignes
Cette affaire est bien plus qu’une simple demande de dédommagement. C’est le symbole d’une présidence qui brouille toutes les lignes entre l’intérêt personnel du président et l’intérêt de l’État. Le fait qu’un président en exercice puisse réclamer des centaines de millions de dollars au gouvernement qu’il dirige, et que la décision puisse reposer sur son ancien avocat qu’il a lui-même nommé à un poste clé, est une situation sans précédent dans l’histoire américaine. L’Amérique assiste, médusée, à un nouveau chapitre de la saga Trump, où les frontières entre l’intérêt personnel et l’État n’ont jamais semblé aussi floues.
Selon la source : newsweek.com