Carburants premium : le grand mythe des additifs qui ne changeraient rien à votre moteur
Auteur: Adam David
Le dilemme de l’automobiliste face à la pompe

C’est une question que chaque conducteur s’est posée au moins une fois : faut-il vraiment payer plus cher pour un carburant dit « premium » ? D’un côté, les promesses des géants pétroliers sur la longévité du moteur et les économies de carburant ; de l’autre, le ticket de caisse, souvent plus doux, des stations de grande surface. Une guerre de convictions qui cache une réalité logistique bien plus simple, et un secret de polichinelle que certains acteurs du secteur n’hésitent plus à éventer.
En coulisses, un carburant quasi identique pour tous

Pour comprendre, il faut s’imaginer d’immenses dépôts pétroliers, comme ceux situés autour de l’étang de Berre, près de Marseille. De là, partent les camions-citernes qui livrent la plupart des stations-service de la région. Qu’il s’agisse de Shell, BP, Esso ou des pompes d’Intermarché et de Carrefour, le produit de base sort souvent des mêmes cuves. Un ancien du secteur pétrolier le confirme : le carburant est fondamentalement le même.
La seule véritable exception notable est parfois celle de groupes comme TotalEnergies, qui disposent de leur propre chaîne logistique. Mais même dans ce cas, la différence sur la molécule de base reste marginale. Au fond, que vous fassiez le plein chez Leclerc ou sur l’autoroute, vous mettez à peu près la même chose dans votre réservoir.
La fameuse « recette secrète » : tout est dans l’additif

Alors, où se niche la différence de prix ? Dans une poignée d’additifs. Juste avant d’être chargé dans les camions, le carburant de base est enrichi de formules spécifiques à chaque marque : V-Power chez Shell, Excellium chez TotalEnergies… Ces cocktails chimiques sont présentés comme des boucliers pour votre moteur. Leurs fonctions ? Principalement détergentes, pour nettoyer les injecteurs et limiter l’encrassement lié à la combustion.
Sur le papier, la promesse est belle : un moteur plus propre, qui dure plus longtemps et, cerise sur le gâteau, consomme un peu moins. C’est cet argument marketing, cette « touche du chef », qui justifie l’écart de prix à la pompe.
Un pavé dans la mare : « c’est le grand mensonge »

Cette version officielle est pourtant dynamitée par des voix dissidentes. La plus virulente est celle de José Rodríguez de Arellano, le patron de Plenergy, un réseau de distribution à bas prix en Espagne. Interrogé par le quotidien El País, il n’y va pas par quatre chemins : « C’est le grand mensonge. L’additif ne sert à rien ». Selon lui, son entreprise utilise l’additif standard recommandé par le logisticien, simplement parce que « les gens trouvent ça bien ».
Il lance un défi : « Pourquoi aucun organisme indépendant n’a-t-il pu prouver qu’un carburant est meilleur qu’un autre ? ». Pour lui, si ces additifs avaient une réelle valeur quantifiable, les pétroliers auraient déjà commandé et publié des études indépendantes pour le prouver noir sur blanc. Le silence, selon lui, est assourdissant.
Entre conviction personnelle et réalité technique

On se retrouve donc face à une bataille de la perception. D’un côté, le marketing puissant des grands groupes, qui a réussi à installer l’idée qu’un bon carburant est un carburant additivé. De l’autre, la réalité d’un produit standardisé dont l’amélioration reste à démontrer scientifiquement. L’argument de de Arellano est simple : la différence, si elle existe, est si infime qu’elle ne justifie pas l’investissement pour l’automobiliste moyen, ni à court ni à long terme.
Le carburant serait donc devenu un peu comme une bouteille de vin : certains paient pour l’étiquette et l’histoire qu’elle raconte, tandis que d’autres se contentent d’un bon vin de table, persuadés que l’essentiel est dans le verre.
Conclusion : à la pompe, la raison ou l’émotion ?

Au final, le choix semble appartenir à chacun. Faut-il croire les ingénieurs des grands groupes ou le pragmatisme d’un distributeur low-cost ? Rien ne prouve que les carburants premium soient une arnaque, mais rien ne prouve non plus de manière irréfutable leur supériorité. Le seul effet tangible et immédiat reste celui sur le portefeuille. Peut-être que le meilleur carburant est simplement celui qui vous permet de rouler l’esprit tranquille, que cette tranquillité vienne de la confiance en une marque ou de la satisfaction d’avoir fait une bonne affaire.