Le secret de nos souvenirs : des chercheurs décodent les circuits du cerveau qui les rendent stables
Auteur: Mathieu Gagnon
On se demande souvent comment notre cerveau fait pour garder une trace de nos souvenirs, parfois pendant des décennies. Eh bien, des chercheurs de NYU Langone Health viennent de faire une sacrée découverte à ce sujet. Ils ont réussi à décoder les circuits qui permettent à notre cerveau de rendre nos souvenirs plus stables lorsqu’on apprend quelque chose de nouveau.
Publiée dans la prestigieuse revue Science, leur étude nous montre comment des signaux entre deux zones du cerveau – le cortex entorhinal et une partie de l’hippocampe appelée CA3 – aident les souris à mémoriser des lieux, un peu comme si elles créaient des cartes mentales. C’est une avancée assez fascinante, vous allez voir.
Un circuit essentiel pour se souvenir
Ce n’est pas tout à fait nouveau, on savait déjà que ce circuit entre l’hippocampe et le cortex entorhinal était crucial. Il nous sert à la fois à fabriquer de nouveaux souvenirs et à les rappeler, même quand on n’a qu’un petit indice. Vous savez, comme quand une odeur vous rappelle soudainement un souvenir d’enfance ? C’est un peu grâce à ça.
Pour que ce rappel fonctionne bien, il faut que ces fameuses « cartes mentales » dans l’hippocampe restent stables, qu’elles ne s’effacent pas au moindre changement dans notre environnement. C’est cette stabilité qui est au cœur du problème, et de la solution.
Quand la mémoire nous joue des tours
Mais que se passe-t-il quand ce mécanisme s’enraye ? Les auteurs de l’étude expliquent que des problèmes dans cette région CA3 peuvent entraîner des symptômes qui ressemblent à ceux de la schizophrénie ou du stress post-traumatique. Dans ces maladies, la mémoire devient imprécise, instable. C’est terrible à imaginer.
Ils donnent un exemple très parlant : un simple ballon qui éclate lors d’une fête pourrait déclencher chez un ancien soldat une peur panique, son cerveau rappelant à tort le souvenir d’une explosion. Cela montre à quel point la fiabilité de nos souvenirs est fondamentale.
Le ballet complexe des neurones
Pour comprendre, il faut s’imaginer le cerveau comme un immense orchestre. Les neurones, nos cellules cérébrales, « s’allument » pour envoyer des signaux électriques. Quand un signal arrive au bout d’un neurone, il libère des substances chimiques qui vont soit encourager le neurone suivant à s’allumer (c’est l’excitation), soit l’en empêcher (l’inhibition).
C’est cet équilibre parfait entre les deux qui sculpte nos pensées. En temps normal, tout est en harmonie. Mais quand on apprend, le cerveau augmente l’excitation pour graver de nouvelles informations. C’est un peu comme monter le volume sur une information importante pour qu’elle soit bien enregistrée.
La grande découverte : un double signal pour tout stabiliser
Alors, quelle est la nouveauté ? L’équipe a découvert que deux types de signaux longue distance, venant du cortex entorhinal, agissent en même temps sur la zone CA3 pour stabiliser les réseaux d’apprentissage. C’est là que ça devient subtil.
Un premier signal, appelé LECGLU, excite les neurones de la zone CA3, mais déclenche aussi une légère inhibition pour affiner le message. Pendant ce temps, un deuxième signal, le LECGABA, vient supprimer cette inhibition locale. En gros, il dit aux « modérateurs » de se taire un instant, ce qui a pour effet d’encourager encore plus l’activité. C’est ce qu’on appelle la désinhibition. Ce double jeu astucieux permet de renforcer les circuits et de rendre les souvenirs de lieux vraiment solides.
Comme le dit Vincent Robert, l’un des auteurs : « Le cerveau augmente l’excitation pour prêter plus d’attention à certaines informations en diminuant l’inhibition dans des microcircuits clés. » C’est une mécanique de haute précision.
Conclusion : de nouvelles pistes pour soigner la mémoire
Finalement, cette étude est bien plus qu’une simple curiosité scientifique. Elle comble un vide important dans notre compréhension de la mémoire. En saisissant mieux comment le cerveau construit et maintient ces cartes mentales, on peut espérer des choses très concrètes.
Jayeeta Basu, l’auteure principale, pense que cela pourrait guider la conception de traitements futurs plus précis pour les maladies qui touchent la mémoire. C’est une lueur d’espoir pour des millions de personnes. Comprendre ces mécanismes fondamentaux, c’est vraiment la première étape, la plus importante, pour un jour pouvoir réparer ce qui est cassé. Et ça, c’est une nouvelle qui fait du bien.
Selon la source : medicalxpress.com