Les oiseaux comprennent-ils vraiment ce qu’ils disent ? La réponse surprenante des diamants mandarins
Auteur: Mathieu Gagnon
On a longtemps cru que les oiseaux réagissaient aux sons un peu comme nous à une alarme : un bruit, une action, point final. Mais si c’était bien plus complexe que ça ? Une nouvelle étude sur les diamants mandarins vient tout chambouler. Figurez-vous que ces petits oiseaux ne font pas qu’entendre des sons, ils semblent comprendre le sens des cris de leurs congénères, un peu comme nous comprenons des mots.
Cette découverte est énorme. Elle suggère que les oiseaux ne sont pas de simples automates réagissant à des stimuli. Ils écoutent, ils traitent l’information et ils y associent une signification. C’est une toute nouvelle façon de voir leur intelligence.
Le vocabulaire bien fourni du diamant mandarin
Les diamants mandarins sont de petits oiseaux très sociaux et, disons-le, très bavards. On connaissait déjà bien leurs chants, que les jeunes mâles apprennent des plus âgés pour séduire les femelles. C’est un sujet d’étude fascinant pour comprendre comment le cerveau traite les sons.
Mais leur langage ne se résume pas à la chansonnette. Ils possèdent en réalité toute une palette de cris différents, environ 11 types de vocalisations, chacun ayant un but précis. Il y a des cris pour alerter d’un danger, d’autres pour garder le contact avec le groupe, pour la parade amoureuse, pour la nourriture ou même pour exprimer sa détresse. Un vrai petit dictionnaire.
Le sens avant le son : une découverte capitale
Et c’est là que ça devient vraiment incroyable. Les chercheurs ont remarqué que les oiseaux confondaient parfois certains cris. Mais pas au hasard ! Ils ne se trompaient pas entre deux cris qui se ressemblent phonétiquement. Non, ils confondaient des cris qui ont un sens similaire, même si leur sonorité est très différente.
Julie Elie, qui a dirigé l’étude, l’explique très bien : si deux types de cris ont des significations bien distinctes pour l’oiseau, il les différenciera parfaitement, même s’ils se ressemblent. En revanche, des cris qui peuvent être regroupés dans la même catégorie de sens seront plus souvent confondus. Cela prouve qu’ils pensent à l’idée derrière le son, pas juste au son lui-même.
Comment les scientifiques ont-ils percé ce mystère ?
Pour en avoir le cœur net, l’équipe a mené une expérience ingénieuse. D’abord, ils ont enregistré plus de 8 000 cris de plus de 30 oiseaux, en associant chaque son à un comportement précis. Un travail de fourmi.
Ensuite, ils ont diffusé ces enregistrements aux oiseaux et les ont récompensés lorsqu’ils parvenaient à identifier un type de cri spécifique. Les oiseaux ont très vite appris à ‘zapper’ entre les sons, un peu comme nous avec une télécommande, pour trouver celui qui leur rapporterait un prix. Pour les scientifiques, c’était clair : les oiseaux reconnaissent bien les différents ‘mots’ de leur propre langage.
L'étonnante logique des erreurs
La preuve la plus forte vient peut-être de leurs erreurs. Par exemple, le cri ‘tet’ est un son doux utilisé quand les oiseaux sont proches pour se dire ‘je suis là’. Le ‘pitchiou’ (pour les mâles) est un son plus fort qui veut dire la même chose, mais quand ils sont éloignés. Eh bien, il arrivait que les oiseaux les confondent.
En revanche, ils ne confondaient jamais le ‘tet’ avec un cri d’alarme, même si, acoustiquement, le cri d’alarme est plus proche du ‘tet’ que du ‘pitchiou’. C’est la confirmation qu’ils ne classent pas les sons par leur ressemblance, mais bien par ce qu’ils signifient. C’est une forme de pensée abstraite qu’on ne soupçonnait pas forcément.
Un aperçu fascinant de l'intelligence animale
Cette façon de trier les informations par catégorie de sens, c’est une compétence cognitive que l’on pensait très humaine. Si les oiseaux le font aussi, cela signifie qu’ils organisent leur monde mentalement, un peu comme nous. Frédéric Theunissen, professeur à l’UC Berkeley, le résume ainsi : ‘Nous avons montré, indirectement, que les oiseaux comprennent ce qu’ils disent’.
C’est la première fois que des chercheurs vérifient si des animaux sont d’accord avec les significations que les experts humains attribuent à leurs cris. Et la réponse est oui. Si un petit diamant mandarin a ces capacités, on peut se demander ce qu’il en est pour des oiseaux plus complexes comme les corbeaux. Le potentiel est immense.
Conclusion : Vers une meilleure communication avec le monde animal ?
La prochaine étape pour les chercheurs est encore plus ambitieuse : observer l’activité cérébrale des oiseaux pendant qu’ils passent ces tests sonores. L’objectif est de localiser précisément où la ‘signification’ est traitée dans leur cerveau. On passe de la simple sensation auditive à la perception, c’est-à-dire à l’attribution d’une étiquette, d’un sens.
Cette recherche nous prouve que la communication des oiseaux n’est pas purement instinctive. Il y a une part de réflexion, de décision. En continuant à déchiffrer leur langage, on ne fait pas que mieux les connaître. On se donne une chance de mieux comprendre l’intelligence animale dans son ensemble. Et qui sait, peut-être qu’un jour, en faisant l’effort de vraiment les comprendre, nous pourrons communiquer avec eux d’une manière que nous n’osons même pas imaginer.
Selon la source : earth.com