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L’étonnante survie des macaques japonais handicapés grâce à la solidarité du groupe
Crédit: lanature.ca (image IA)

Le cas Nina, macaque sans mains

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Nina, une macaque japonais au visage rubicond, appartient à ces fameux ‘singes des neiges’ que l’on imagine volontiers se prélassant dans les sources chaudes. Bien qu’elle vive en totale liberté dans la forêt, elle se rend presque quotidiennement au centre des singes d’Awajishima pour y trouver sa subsistance. Car Nina porte une différence frappante : elle est née sans mains.

Cette malformation n’est pas unique dans son groupe. Les scientifiques soupçonnent d’ailleurs un lien avec l’exposition aux pesticides ou à d’autres contaminants présents dans l’environnement, une hypothèse lourde de sens sur l’impact humain.

La résilience face aux idées reçues

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La survie de Nina, véritable défi dans un environnement sauvage, est le résultat d’une remarquable combinaison de facteurs. Elle a développé des stratégies comportementales uniques pour pallier ses déficiences, bénéficié des soins attentifs de sa mère durant sa petite enfance et, surtout, elle est traitée par son groupe sans la moindre discrimination.

Après des heures passées à les observer, il est clair que cette résilience contredit une idée reçue tenace : celle qu’un animal handicapé n’aurait aucune chance de survie dans la nature. Or, comme Nina et ses compagnons le prouvent, les primates handicapés sont non seulement en mesure de survivre, mais aussi de se reproduire.

Un phénomène plus commun qu’on ne le pense

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Nos observations à Awajishima nous ont poussés à creuser le sujet. En examinant la littérature scientifique sur les primates non humains, nous avons été surpris de constater que les handicaps physiques sont bien plus répandus chez les espèces sauvages et en liberté qu’on ne l’imaginait. C’est un pan souvent ignoré de la vie animale.

Une revue de littérature récente, publiée dans l’American Journal of Primatology, a recensé 114 articles portant sur 37 espèces – singes, lémuriens ou grands singes – étudiées sur 70 sites différents. Ces articles ne représentent d’ailleurs qu’une fraction des observations, sans compter toutes les notes de terrain qui n’ont jamais été formellement publiées. Environ 45 % des déficiences observées sont congénitales, tandis que le reste est principalement dû à des blessures ou des maladies.

Innovation et souplesse comportementale

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Au-delà des causes, c’est la façon dont ces primates gèrent l’adversité qui est fascinante. La clé de leur adaptation réside dans la **plasticité comportementale**, soit cette capacité à innover et à modifier ses actions en fonction des circonstances. Les mères jouent aussi un rôle essentiel, en apportant des soins supplémentaires et spécifiques à leurs petits atteints de handicap.

Nous avons trouvé soixante-dix articles décrivant cette souplesse. Mieux encore, la sélection sociale n’est que très rarement tournée contre ces individus. Nous avons au contraire d’innombrables exemples où les primates handicapés sont traités de manière indifférenciée par leur groupe, voire dans quelques cas, bénéficient d’une attention accrue de la part de leurs proches.

L’ombre des activités humaines

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Si cette résilience nous rassure sur l’adaptabilité du règne animal, une donnée de notre revue a soulevé une vive inquiétude : un grand nombre de ces handicaps ont une origine clairement anthropique. En effet, près de 60 % des invalidités recensées chez les primates sont directement ou indirectement liées aux activités humaines.

Les causes sont multiples et souvent dramatiques : blessures causées par des collets ou des pièges, accidents de la route, électrocutions près des lignes électriques (chez le babouin sud-africain ou l’alouate d’Amérique du Sud), sans oublier les effets des maladies transmissibles entre humains et primates. C’est un rappel tragique des conséquences durables de notre présence sur la santé de nos plus proches cousins.

le défi de l’avenir

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Partout dans le monde, qu’ils soient sous les tropiques ou dans le froid du Japon, les populations de primates non humains sont confrontées à des menaces grandissantes. L’expansion agricole et urbaine, l’extraction des ressources, le braconnage et le changement climatique poussent de nombreuses espèces vers l’extinction.

Dans ce contexte de pression croissante, l’histoire de Nina et de ses congénères nous offre un modèle important pour examiner la capacité d’adaptation du comportement des primates. Elle souligne surtout le rôle essentiel et souvent destructeur que nous, les humains, jouons dans l’avenir de nos plus proches parents. La question n’est plus seulement de savoir si ces individus peuvent survivre grâce à la compassion de leur groupe, mais si même les espèces les plus résilientes pourront faire face à l’ampleur inédite de ces bouleversements anthropiques.

Selon la source : theconversation.com

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