Une maladie que l’on croyait vaincue est de retour au canada

La fin d’une victoire historique

Lundi dernier, l’annonce a été brutale pour la santé publique canadienne. Après près de trente ans, le pays a officiellement perdu son statut de « pays ayant éliminé la rougeole ».

Cette maladie respiratoire extrêmement contagieuse, caractérisée par ses éruptions cutanées, n’est donc plus qu’un mauvais souvenir : elle circule à nouveau sur le territoire. C’est un revers cuisant pour un pays qui se voulait un modèle dans la lutte contre les infections transmissibles.

Le principe fondamental de l’immunité collective

L’élimination réussie d’une maladie n’est jamais définitive sans une vigilance constante. Pour chasser efficacement un virus comme la rougeole — qui est l’une des maladies les plus contagieuses connues — la clé réside entièrement dans la vaccination massive.

Comme l’explique Alain Lamarre, professeur et chercheur à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), l’enjeu est d’atteindre le seuil critique pour l’immunité collective : si un individu est infecté, il ne pourra pas contaminer sa communauté, car celle-ci est largement protégée. C’est cette barrière invisible que le Canada avait réussi à ériger.

La mécanique du retour après 1998

Comment la rougeole a-t-elle pu faire son retour après avoir été officiellement déclarée éliminée en 1998 ? La réponse est simple : la circulation mondiale. Le scénario classique est celui d’une personne non vaccinée qui contracte le virus lors d’un voyage à l’étranger, dans une zone où la maladie est encore endémique.

Une fois de retour au pays, si la couverture vaccinale locale est insuffisante, le virus trouve immédiatement des hôtes vulnérables et commence à se propager. Le système, mis sous tension, craque au premier maillon faible de la chaîne.

Le seuil critique des 95 %

Le problème principal réside dans le fait que le filet de sécurité canadien s’est dangereusement effiloché ces dernières années. On a observé une baisse notable du nombre d’enfants vaccinés contre la rougeole, ce qui ouvre des brèches dans l’immunité collective.

Au Québec, par exemple, même si plus de 90 % des élèves du primaire sont protégés, les autorités sanitaires martèlent qu’il faudrait atteindre un taux de 95 % pour garantir une protection totale et éviter les transmissions épidémiques. Nous sommes donc très proches du seuil critique, et le risque est désormais concret.

Plus qu’un simple accroc à la réputation

Bien sûr, comme le souligne le chercheur Alain Lamarre, la perte de ce statut n’entraîne pas de « punition » internationale concrète ; elle est surtout symbolique. Cependant, cette régression ternit sérieusement la réputation du Canada sur la scène internationale en matière de santé publique, ce qui est, en soi, gênant.

Mais au-delà de l’embarras diplomatique, c’est surtout un signal d’alarme pour les plus vulnérables. Les nourrissons, les personnes ayant un système immunitaire affaibli et celles qui ne peuvent être vaccinées dépendent entièrement de l’immunité collective pour leur protection. C’est pour eux que cette résurgence est la plus dangereuse.

L’impératif de la sensibilisation

Remonter ces chiffres vers les 95 % requis sera loin d’être une mince affaire. Cela demande un effort considérable de sensibilisation et de démystification. Il faut déconstruire les mythes et les peurs autour des vaccins, souvent nourris par de la désinformation ou des croyances tenaces.

Le message doit être clair : la vaccination n’est pas seulement un acte individuel. C’est un geste fort, posé dans un véritable esprit de communauté, visant à protéger ceux qui ne peuvent pas se défendre eux-mêmes. Le Canada doit se mobiliser pour retrouver son statut perdu et, surtout, pour garantir la sécurité de ses citoyens.