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La qualité du sommeil, facteur silencieux dans l’accélération du déclin cognitif
Crédit: lanature.ca (image IA)

Quand le manque de repos menace le cerveau

Alors que l’incidence des maladies neurodégénératives, comme Alzheimer, ne cesse de croître à l’échelle mondiale, les chercheurs explorent toutes les pistes pour en identifier les facteurs de risque. L’une des variables les plus sous-estimées, mais peut-être la plus cruciale, est celle du sommeil. De nouvelles données scientifiques viennent renforcer l’idée que des nuits agitées ou trop courtes pourraient littéralement accélérer le vieillissement cérébral, augmentant dangereusement la probabilité de développer une démence.

L’insomnie chronique sur le banc des accusés

credit : lanature.ca (image IA)
Ce n’est pas la première fois que le lien étroit entre le repos nocturne et la santé cérébrale est mis en évidence. D’autres travaux, notamment publiés dans la revue Brain, avaient déjà suggéré que des réveils trop fréquents pourraient endommager les vaisseaux sanguins du cerveau, précipitant ainsi le déclin mémoriel. Plus récemment, une étude parue dans eBioMedicine indiquait que les mauvais dormeurs présentaient souvent un cerveau dont l’âge biologique semblait supérieur à leur âge réel.

Afin de quantifier plus précisément ce risque, des chercheurs de la prestigieuse Mayo Clinic se sont penchés sur les conséquences de l’insomnie chronique. Leurs conclusions, publiées dans la revue Neurology, sont sans appel : la difficulté à trouver le sommeil et certaines modifications cérébrales spécifiques agissent de concert pour favoriser l’apparition de troubles cognitifs.

Un risque de trouble cognitif accru de 40 %

Pour parvenir à ces résultats, l’équipe a suivi les données de 2 750 personnes, toutes âgées d’environ 70 ans, sur une période moyenne d’un peu plus de cinq ans. Au fil du temps, les participants ont été soumis à des tests annuels pour évaluer leur mémoire et leur cognition. Les chercheurs ont croisé ces informations avec leurs habitudes de sommeil déclarées, ainsi qu’avec des examens d’imagerie cérébrale pour identifier d’éventuels marqueurs de maladie neurodégénérative.

Les chiffres recueillis sont éloquents. Sur l’échantillon total, 14 % des personnes signalant une insomnie chronique ont développé soit une déficience cognitive légère, soit une démence complète. Ce taux chute à 10 % chez celles qui ne souffraient pas de troubles du sommeil. Au final, les auteurs estiment que l’insomnie chronique augmente le risque de développer un trouble cognitif léger ou une démence de 40 %.

Un vieillissement cérébral accéléré de quatre ans

Au-delà des pourcentages bruts, les chercheurs ont observé que les performances aux tests cognitifs déclinaient également plus rapidement chez les insomniacs. En moyenne, les résultats des personnes déclarant dormir moins que d’habitude étaient comparables à ceux d’un individu quatre ans plus âgé. C’est une accélération non négligeable du processus de vieillissement cérébral.

Ces effets délétères étaient d’ailleurs exacerbés chez les porteurs du gène APOE ε4, connu pour être associé à un risque accru de maladie d’Alzheimer. Il semble donc que le manque de sommeil agisse comme un amplificateur de vulnérabilité, en particulier chez les sujets génétiquement prédisposés aux troubles neurodégénératifs.

Comprendre les dégâts biologiques : amyloid et substance blanche

credit : lanature.ca (image IA)
Reste à savoir comment le manque de sommeil provoque de tels dégâts. Interrogé par The Conversation, Timothy Hearn, maître de conférences en bio-informatique à l’Université Anglia Ruskin, explique que l’insomnie chronique pourrait être responsable d’une augmentation de la quantité d’amyloïde. Cette protéine est un marqueur clé de la maladie d’Alzheimer.

Le manque de repos nocturne semble aussi éroder la substance blanche – une zone du cerveau où les dommages causés par une maladie des petits vaisseaux sanguins peuvent être les plus visibles. À cela s’ajoute une potentielle élévation de la pression artérielle et de la glycémie, deux facteurs bien connus pour leur impact négatif sur la santé vasculaire cérébrale.

Traiter l’insomnie, un geste de prévention

credit : lanature.ca (image IA)
Ces conclusions sonnent comme une alerte pour la santé publique. Le Dr Diego Z. Carvalho, de la Mayo Clinic de Rochester, a d’ailleurs insisté, dans un communiqué, sur l’« importance de traiter l’insomnie chronique, non seulement pour améliorer la qualité de vie, mais aussi potentiellement pour préserver la santé cérébrale avec l’âge ». Pour lui, ces résultats attestent que le sommeil n’est pas seulement un moment de repos, mais une période essentielle de « résilience cérébrale ».

Toutefois, il faut rester prudent quant à la causalité directe. Comme le rappelle Timothy Hearn, un sommeil de mauvaise qualité est souvent la conséquence ou le compagnon d’autres troubles, comme la dépression, l’anxiété ou l’apnée du sommeil, qui nuisent eux aussi gravement au cerveau. Déterminer précisément quel élément cibler en priorité nécessitera des études longitudinales encore plus rigoureuses. Mais en attendant, prendre son insomnie au sérieux semble être un excellent point de départ pour protéger son avenir cognitif.

Selon la source : femmeactuelle.fr

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